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si vous le distribuiez aux pauvres, quelles louanges, quels applaudissements ne vous attireriez-vous pas ? Vous serez applaudies et louées lorsque vous donnerez aux autres ; mais tant que vous garderez tout pour vous, vous serez dans le mépris. Votre trésor n’est point en sûreté chez vous : mettez-le entre les mains des pauvres, alors il sera à couvert et en toute sûreté. Pourquoi parez-vous votre corps, tandis que votre âme est toute souillée ? Pourquoi n’avez-vous pas autant de soin de votre âme que de votre corps, quand vous devriez en avoir un plus grand soin, ou tout au moins, mes chers frères, un soin pareil ?
Dites-moi, je vous prie, si quelqu’un vous demande ce que vous aimeriez mieux, ou que votre corps fût vigoureux, beau et bien fait et simplement couvert d’étoffes communes et de bas prix, ou qu’il fût estropié, malsain, mais couvert d’étoffes d’or. Ne répondrez-vous pas que vous préféreriez au faste des habits un corps sain, bien fait et bien proportionné ? Quoi ! pour votre corps vous feriez ce choix et pour votre âme vous ne le ferez pas ? Quoi ! votre âme est laide, noire, hideuse, et vous croyez vous embellir, vous relever et vous illustrer par des ornements d’or ? Quelle folie !
Attachez-vous à orner votre intérieur ; ces colliers, faites-en un meilleur usage ; qu’ils servent à parer votre âme. Les parures que vous mettez sur votre corps ne lui servent de rien, ni pour la santé, ni pour la beauté : s’il est noir, elles ne le blanchiront pas ; s’il est laid, elles ne le rendront pas beau. Mais si vous en revêtez votre âme, de noire qu’elle était, elle deviendra aussitôt blanche ; de laide et hideuse, vous la rendrez belle et agréable. Ce n’est point moi qui vous le dis, c’est le Seigneur : « Quand vos péchés seraient comme l’écarlate », vous dit-il, « je les rendrai blancs comme la neige » (Is. 1,18) ; et encore : « Donnez l’aumône et toutes choses vous seront pures ». (Lc. 11,41)
Si vous êtes dans ces bonnes dispositions, vous ne vous rendrez pas belle vous seule, mais encore vous rendrez beau votre mari. Quand vous quitterez le luxe, il n’aura pas de grandes dépenses à faire : alors il perdra cette envie qu’il avait d’amasser, et il sera plus porté à faire l’aumône, et vous pourrez avec confiance lui conseiller de faire ce qui convient. Mais à présent, vous n’en avez pas le pouvoir. Auriez-vous l’assurance et la hardiesse d’exhorter vos maris à faire l’aumône, vous qui consumez la plus grande partie de vos richesses à orner votre corps ? Quittez ce faste, cessez de porter des habits enrichis d’or, et alors vous pourrez hardiment parler de l’aumône à vos maris. Et quand vous ne gagneriez rien, vous aurez du moins la consolation d’avoir entièrement fait de votre côté ce que vous deviez.
Mais, que dis-je ? Il est impossible que vous ne les touchiez pas, lorsque vous les prêcherez d’exemple : « Car, que savez-vous, ô femme, si vous ne sauverez point votre mari ? » (1Cor. 7,16) Comme, si vous continuez à vivre de la sorte, vous aurez à rendre compte à Dieu, et pour vous et pour lui ; de même, si vous renoncez à ce vain appareil, vous obtiendrez une double couronne, vous serez couronnée et comblée de gloire avec votre mari, pendant des siècles infinis, et vous jouirez des biens éternels, que je vous souhaite, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartient la gloire, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.