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ne s’en apercevaient point ! Après quoi, n’ayant pu les attirer ni par un grand nombre de miracles, ni par sa doctrine et ses instructions, il les entretient enfin de son crucifiement et leur dit : « Quand vous aurez élevé en haut le Fils de l’homme », dit-il, « alors vous connaîtrez qui je suis, et que je ne parle point de moi-même, et que mon Père, qui m’a envoyé, est avec moi et ne m’a point laissé seul ». Jésus-Christ fait voir par là que c’est avec justice qu’il a dit : « Je suis le principe de toutes choses, moi-même qui vous parle ».
2. Tant les Juifs étaient peu attentifs à ce que leur disait Jésus-Christ. « Lorsque vous aurez élevé en haut le Fils de l’homme » alors, dit-il, vous pensez me faire périr, vous débarrasser de moi : mais moi, je vous dis que c’est principalement alors que vous connaîtrez « qui je suis » ; vous le connaîtrez par les prodiges et les miracles que je ferai, par ma résurrection, par votre ruine. En effet, toutes ces choses étaient bien propres à faire éclater la puissance du Seigneur. Il n’a point dit : Vous connaîtrez alors qui je suis ; mais il dit Lorsque vous verrez que la mort n’aura point eu d’empire sur moi, qu’elle n’aura produit en moi nul changement, ni aucune altération, alors vous connaîtrez qui je suis, savoir, que je suis le Christ, Fils de Dieu, qui gouverne et conduit tout ; et qui ne suis pas contraire au Père. Voilà pourquoi il a ajouté : « Et je ne dis rien de moi-même ». Vous connaîtrez, en effet, ces deux vérités, et ma puissance, et mon union avec mon Père. Car ce mot : « Je ne dis rien de moi-même », montre l’égalité et l’unité de substance, et qu’il ne dit rien contre la volonté de son Père. Quand votre culte sera changé et aboli, et qu’il ne vous sera plus permis d’adorer le Père selon votre ancienne coutume[1], alors vous connaîtrez, qu’irrité contre ceux qui ne m’ont point écouté, il prend ma défense et me venge lui-même. C’est comme s’il disait : Si j’étais opposé et contraire à Dieu, il n’aurait pas conçu une si grande colère contre vous. Isaïe le déclare aussi : « Il livrera les impies pour sa sépulture » (Is. 53,9) ; et David : « Il leur parlera alors dans sa colère » (Ps. 3,5) ; et le Seigneur lui-même : « Le temps s’approche que votre maison demeurera déserte » (Mt. 23,38) ; écoutez de plus la parabole : « Que fera le Seigneur de la vigne à ces vignerons ? « Il fera périr misérablement ces méchants ». (Mt. 21,40) Ne remarquez-vous pas que partout il parle de même, attendu qu’ils ne le croyaient point encore ?
Que si le Seigneur doit les faire périr, comme véritablement il le fera (car il dit : « Ceux qui ne veulent point m’avoir pour roi, qu’on les amène ici, et qu’on les tue en ma présence). » (Lc. 19,27) ; pourquoi cette œuvre, ne se l’attribue-t-il pas à lui-même, mais au Père ? C’est pour s’accommoder à la portée des Juifs, et aussi pour honorer son Père. Voilà pourquoi il n’a point dit : Je laisse votre maison déserte, mais « votre maison demeurera déserte », parlant impersonnellement. Mais, avoir dit : « Combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, et tu ne l’as pas voulu » (Lc. 13,34) ; et ajouter ensuite : « Elle demeurera » ; c’est montrer assez qu’il est l’auteur de la désolation. Puisque, dit-il, mes bienfaits, ma sollicitude, ne vous ont pas déterminés à croire en moi, les supplices vous feront connaître qui je suis.
« Et mon Père est avec moi ». De peur qu’ils ne crussent que cette parole : « Celui qui m’a envoyé », marquait qu’il était moins grand que le Père, il ajoute : « Il est avec moi ». Car l’un de ces termes se rapporte à l’incarnation, l’autre à la divinité. « Et il ne m’a point laissé seul, parce que je fais toujours ce qui lui est agréable ». Jésus-Christ descend encore à un langage plus humain, combattant sans relâche ce que disaient les Juifs, qu’il n’était point envoyé de Dieu, qu’il ne gardait pas le sabbat ; il dit : « Je fais toua jours ce qui lui est agréable ». Par où il insinue que là violation du sabbat est agréable au Père. De même, lorsqu’on le menait à la croix, il dit : « Croyez-vous que je ne puisse pas prier mon Père ? » (Mt. 26,53) Et toutefois, par cette seule parole : « Qui cherchez-vous ? » (Jn. 18,4, 6), il les renversa tous par terre. Pourquoi donc né dit-il pas : Ne, croyez-vous pas que je puisse vous faire périr, quand il l’a prouvé par des faits ? Il se proportionne à leur portée. Car il avait grand soin de montrer qu’il ne faisait rien de contraire à son Père. De même ici il parle à la manière des hommes et dans le même sens qu’il a dit : « Il ne m’a point laissé seul » ; il dit ici : « Je fais ce qui lui est agréable ».
« Lorsqu’il disait ces choses, plusieurs crurent

  1. C. à d. par des sacrifices et vos cérémonies légales.