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disaient : « C’est Jésus-Christ », et « Quand le Christ viendra, fera-t-il plus de miracles ? » il montre qu’il faut avoir une foi pure, avoir de lui une juste opinion, et ne point tant croire sur les miracles que sur ce qu’enseignent les Écritures. En effet, un grand nombre de ceux qui lui voyaient faire des miracles, ne le reconnaissaient pas pour le Christ ; et qu’on ne pouvait manquer de lui objecter : les Écritures ne disent-elles pas que le Christ viendra de la race de David ?
Jésus parlait souvent des Écritures, pour faire voir qu’il n’en craignait point le témoignage, et qu’il n’en fuyait point la lumière et c’est pour cela qu’il renvoie les Juifs aux Écritures. Car il avait dit auparavant : « Lisez « avec soin les Écritures » (Jn. 5,39) ; et encore : « Il est écrit dans les prophètes : ils seront tous enseignés de Dieu ». (Jn. 6,45) Et : « Moïse est votre accusateur ». (Jn. 5,45) Mais ici il dit : « Comme a dit l’Écriture : il sortira des fleuves de son ventre ». Par où il marque l’abondance et la fécondité de la grâce ; de même qu’il dit ailleurs : « Une fontaine d’eau qui rejaillira jusque dans la vie éternelle » (Jn. 4,14), c’est-à-dire ; il recevra une abondance de grâces. Ailleurs il avait dit : La vie éternelle ; ici il dit : Une eau vive. Le Sauveur appelle eau vive celle qui coule, qui opère toujours. Car lorsque la grâce du Saint-Esprit est entrée dans une âme et y a établi sa demeure, elle coule et se répand avec plus de force et d’abondance qu’aucune autre source ; elle ne tarit point et ne cesse jamais de couler. Jésus-Christ donc, pour montrer que jamais cette eau ne tarit, et qu’elle agit d’une manière ineffable, dit une fontaine et des fleuves ; non un seul fleuve, mais une infinité de fleuves. Et en cet endroit il s’est servi du mot de rejaillir, pour celui d’inonder.
Voulez-vous le voir clairement, mes frères, que cette eau se multiplie en une infinité de fleuves ? Considérez la sagesse d’Étienne, l’éloquence de Pierre, la force de Paul : considérez que rien n’a pu vaincre ni ralentir leur zèle et leur activité : ni la fureur du peuple, ni la violence des tyrans, ni les pièges des démons, ni la mort à laquelle ils se voyaient tous les jours exposés ; et que, semblables à des fleuves impétueux qui se débordent, ils ont tout entraîné avec eux.
« Ce qu’il entendait de l’Esprit que devaient recevoir ceux qui croiraient en lui, car le Saint-Esprit n’avait pas encore été donné (39) ». Comment donc les prophètes ont-ils prophétisé et opéré tant de miracles ? Car ce n’est point par l’Esprit, mais par la vertu de Jésus, que les apôtres ont chassé les démons, comme il le dit lui-même : « Si c’est par Béelzébuth que je chasse les démons, par qui vos « enfants les chassent-ils ? » Jésus-Christ disait donc cela pour déclarer qu’avant qu’il eût été crucifié ils n’avaient pas tous chassé les démons par le Saint-Esprit, mais par sa vertu. C’est quand il envoya ses disciples prêcher l’Évangile, qu’il leur dit : « Recevez le Saint-Esprit ». Et encore : « Le Saint-Esprit se répandit sur eux et ils faisaient des miracles ». (Mt. 20,22)
2. Au reste, lorsque Jésus-Christ envoya ses disciples, il n’est point écrit qu’il leur donna le, Saint-Esprit, mais il leur donna puissance, disant : « Guérissez les lépreux, chassez les démons, ressuscitez les morts : donnez gratuitement ce que vous avez reçu gratuitement ». (Mt. 10,1, 8) Or, tout le monde sait que le Saint-Esprit avait été donné aux prophètes ; mais aussi on ne doit pas ignorer que cette grâce était donnée par mesure, qu’elle a été ôtée et qu’elle a cessé sur la terre depuis le jour qu’il fut dit : « Votre maison est abandonnée, elle demeurera déserte » (Mt. 23,38) ; et qu’avant ce jour, même le Saint-Esprit commençait déjà à faire plus rarement sentir son opération. Il n’y avait plus de prophètes parmi les Juifs, et s’il s’en trouvait, leur grâce, leur vertu ne s’étendait point jusque sur les choses saintes et salutaires.
Les Juifs donc ayant été privés de la grâce du Saint-Esprit, il est venu un temps auquel elle s’est répandue sur les hommes avec une plus grande effusion, et c’est après le crucifiement du Sauveur qu’elle a commencé de se manifester, non seulement avec plus d’abondance, mais encore par des dons plus grands et plus excellents. Car le don duquel il est dit : « Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes animés » (Lc. 9,55) ; et encore : « Aussi vous n’avez point reçu l’esprit de servitude, mais vous avez reçu l’Esprit de l’adoption » (Rom. 8,15), était effectivement un don plus merveilleux et plus admirable que ceux que Dieu distribuait dans le Vieux Testament ; car les saints de l’ancienne loi recevaient aussi le Saint-Esprit, mais ils ne le communiquaient point aux autres ; au lieu que les apôtres en remplissaient