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il dit que Jésus-Christ est mû par un autre, et qu’il a besoin du secours d’autrui pour faire ce qu’il fait. Que répond donc Jésus-Christ ? Voyez sa grande douceur. Il n’a point dit : Je n’ai besoin du secours de personne, et je fuis tout par ma puissance et avec autorité : car je suis le vrai Fils de Dieu et j’ai le même pouvoir que mon Père. Il ne s’est pas expliqué alors sur ce point par condescendance pour la faiblesse de son auditeur : ce que je dis souvent, je vous le répéterai ici : pendant longtemps, Jésus-Christ s’est moins attaché à révéler sa dignité qu’à persuader qu’il ne faisait rien contre la volonté de son Père. Voilà pourquoi souvent dans ses discours il se rabaisse : mais il n’en est pas de même quand il agit. Ainsi, opère-t-il des miracles, il parle avec autorité, disant : « Je le veux, soyez guéri (Mc. 1,41) : Ma fille, levez-vous, je vous le commande (Ibid v, 41) : Étendez a votre main (Id. 3,5) : Vos péchés vous sont remis (Mt. 9,5) : Tais-toi ; calme-toi (Mc. 4,39) : Emportez votre lit, et vous en allez en votre maison (Lc. 5,24) : « Esprit impur, sors de cet homme (Mc. 5,8) : Qu’il vous soit fait selon que vous demandez (Mt. 8,13) : Si quelqu’un vous dit quelque chose, dites-lui que le Seigneur en a besoin (Id. 21,3) : Vous serez aujourd’hui avec moi dans le paradis (Lc. 23,43) : Vous avez appris qu’il a été dit aux anciens : vous ne tuerez point ; mais moi je vous dis que quiconque se mettra en colère sans raison contre son frère, méritera d’être condamné par le jugement (Mt. 5,21, 22) : Suivez-moi, et je vous ferai devenir pêcheurs d’hommes ». (Id. 4,19) Et partout nous voyons sa grande autorité. Car personne ne pouvait trouver à redire à ses œuvres : et en quoi l’aurait-on pu ? Encore si l’effet n’avait pas suivi sa parole, quelqu’un aurait pu dire que ces ordres étaient vains et présomptueux ; mais comme ils avaient leur prompt accomplissement, là vérité du miracle forçait les Juifs malgré eux-mêmes à garder le silence. Mais en ce qui regarde les paroles, leur impudence aurait pu les porter à les accuser de hauteur et de vanité.
Maintenant donc Jésus-Christ parlant à Nicodème, ne lui dit ouvertement rien de grand, rien de sublime ; mais par des paraboles et des figures il le ramène et le tire des bas sentiments qu’il avait conçus de lui, lui faisant connaître qu’il se suffisait à lui-même pour opérer des miracles ; car son Père l’a engendré parfait, se suffisant à soi-même et n’ayant aucune imperfection. Mais de quelle manière Jésus-Christ établit-il cette vérité ? Nicodème a dit : « Maître, nous savons que vous êtes venu de la part de Dieu pour nous instruire comme un docteur, et que personne ne saurait faire les miracles que vous faites si Dieu n’était avec lui ». En quoi il crut avoir dit de Jésus-Christ quelque chose de grand. Que fit donc Jésus-Christ ? Il lui fit voir qu’il était encore bien éloigné de la vérité, qu’il n’en avait pas la moindre idée, et que lui et tout autre qui parlait de la sorte, et qui avait une pareille opinion du Fils unique, errait hors du royaume de Dieu et n’approchait pas encore de la véritable connaissance. Que dit-il ? « En vérité, en vérité, je vous dis que personne ne peut voir le royaume de Dieu s’il ne renaît de nouveau » ; c’est-à-dire, si vous ne renaissez d’en haut et si vous ne recevez pas la véritable connaissance des mystères, vous errez au-dehors et vous êtes éloigné du royaume de Dieu. Mais il ne le dit pas clairement, et afin que ce qu’il disait lui cause moins de peine et d’inquiétude, il lui parle d’une manière enveloppée ; il dit en général. « si on ne renaît », comme s’il disait : Si vous, ou quelqu’autre que ce soit, vous avez de moi de tels sentiments, vous êtes tous hors du royaume. Si ce n’était pas dans cet esprit que Jésus-Christ a dit ces choses, sa réponse ne conviendrait point au sujet. Au reste, si les Juifs l’avaient ouïe, ils se seraient retirés et en auraient ri. Mais Nicodème, même en cela, montre un sincère désir de s’instruire : Souvent Jésus-Christ parle d’une manière couverte, et c’est pour rendre ses auditeurs plus prompts à l’interroger et plus attentifs. En effet, ce qui est clair et d’une facile intelligence n’attire pas l’attention de l’auditeur et se, perd aisément de la mémoire ; mais l’attention et la curiosité se réveillent quand on dit quelque chose d’obscur, et aussi on le retient mieux et plus longtemps.
Voici ce que signifient ces paroles de Jésus-Christ : Si vous ne renaissez d’en haut, si vous ne recevez le Saint-Esprit par le baptême de la régénération, vous ne pouvez véritablement me connaître : l’opinion que vous avez de moi n’est point spirituelle, elle est charnelle. Jésus-Christ ne s’est pas servi de ces termes, de peur