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que Jésus-Christ est véritablement le Fils unique, et qu’il est coéternel à son Père ? « Il en a », dit l’évangéliste, « donné la connaissance ». Quelle connaissance a-t-il donnée ? « Nul n’a jamais vu Dieu ». Il n’y a qu’un seul Dieu ; mais les autres prophètes et Moise crient souvent : « Le Seigneur votre Dieu est le seul et unique Seigneur ». (Deut. 6,4) Et Isaïe : « Il n’y a point eu de Dieu formé avant moi, et il n’y en aura point après moi ». (Is. 43,10)
3. Qu’est-ce que le Fils nous a donc appris de plus, lui qui est dans le sein du Père ? Qu’est-ce que le Fils unique nous a enseigné ? Premièrement, que ces choses proviennent de son opération : en second lieu, que nous avons reçu une connaissance beaucoup plus claire, et que nous connaissons que « Dieu est esprit, et qu’il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité ». (Jn. 4,24) Et encore, ceci même : qu’il est impossible de voir Dieu, et que nul ne le connaît, sinon lé Fils : et que Dieu est le Père d’un vrai Fils unique, et universellement tout ce qui est dit de lui.
Or ce mot : « Il a donné la connaissance », marque cette plus claire et plus évidente connaissance, qu’il a donnée, non seulement aux Juifs, mais encore à tout le monde. Tous les Juifs n’avaient pas cru aux prophètes, mais tout l’univers s’est soumis au Fils unique de Dieu, et a cru en lui. Le mot de connaissance signifie donc ici l’évidence de la doctrine Voilà pourquoi il est appelé VERBE et Ange du grand conseil.
Puis donc que nous avons eu le bonheur de recevoir une plus belle et plus parfaite doctrine, et des connaissances plus hautes, Dieu ne nous parlant plus par les prophètes, mais par son propre Fils dans ces derniers jours (Héb. 1,1), ayons une conduite beaucoup plus réglée et plus sainte, et vivons d’une manière digne d’un si grand honneur. Il serait ridicule que Jésus-Christ eût condescendu au point de ne vouloir plus nous parler par ses serviteurs, mais par lui-même, et que nous, nous ne fissions rien de plus que ceux qui sont venus avant nous. Ils ont eu Moïse pour docteur ; et nous, nous avons pour docteur le maître même de Moïse. Professons donc une philosophie digne d’un si grand honneur, et n’ayons rien de commun avec la terre. Car Jésus ne nous a apporté une doctrine du ciel, que pour y élever nos pensées, et afin que nous imitions notre docteur selon nos forces et notre capacité.
Mais, direz-vous, comment pourrions-nous être les imitateurs de Jésus-Christ ? Nous le ferons si nous rapportons tout à l’utilité publique, et si nous ne recherchons pas nos propres intérêts. Jésus-Christ, dit saint Paul, « n’a pas cherché à se satisfaire lui-même, mais comme il est écrit : les ouvrages de ceux qui vous insultaient, sont tombés sur moi. (Rom. 15,3 ; Ps. 68,12) Que personne donc ne cherche ses propres intérêts ». (1Cor. 10,24) Ainsi on cherche ses propres intérêts, si l’on a en vue le bien de son prochain : car le bien de notre prochain est notre propre bien. « Nous ne sommes tous qu’un seul corps, et nous sommes tous réciproquement membres les uns des autres » (Rom. 12,5) et des portions. Ne nous regardons donc pas comme des étrangers séparés les uns des autres. Que personne ne dise : celui-là n’est point mon ami, mon parent, mon voisin, je n’ai rien de commun avec lui : sous quel prétexte irai-je chez lui ? que lui dirai-je ? Il ne vous est pas parent, il n’est point votre ami, mais il est homme de même nature que vous, il a le même maître, il est votre compagnon et il loge sous la même tente ; car il habite le même monde.
Que s’il a la même foi, voilà qu’il est votre membre. Quelle amitié peut former une plus grande union, que la parenté qui vient de l’unité de foi ? Nous ne devons point montrer seulement à l’égard les uns des autres l’attachement qui unit l’ami avec son ami ; mai : celui qui lie un membre avec un membre. El certes, vous ne trouverez pas de plus solide lien d’amitié et de parenté, ni de nœud si fort que celui-ci. Comme un membre ne saurait dire d’un autre membre du même corps : d’où me vient l’étroite liaison et la parenté que j’ai avec lui ; car en cela il y aurait du ridicule ; de même vous ne sauriez le dire de votre frère. « Car nous avons tous été baptisés dans le même esprit, pour n’être tous ensemble qu’un même corps ». (1Cor. 12,12) Pourquoi, peur n’être tous qu’un même corps ? afin que nous ne nous désunissions pas, et que, par cette parenté et cette mutuelle amitié, nous fassions tous ensemble les fonctions d’un seul corps. Ne méprisons donc pas notre prochain, si nous ne voulons nous mépriser nous-mêmes.