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comme cet homme. » (Id. 7,46) Et d’autres encore disaient : « Jamais rien de semblable ne s’est vu dans Israël. Et ils étaient dans l’admiration, parce qu’il les instruisait comme ayant autorité, et non comme leurs scribes et les pharisiens. »
4. Que si vous voulez connaître la grâce par vous-mêmes, écoutez ses préceptes, pesez-les, et vous verrez la force de la grâce : « Si quelqu’un ne renonce pas à tout, et, en outre, s’il ne hait pas sa propre âme, il n’est pas digne de moi. » (Lc. 14,33) Néanmoins, cette parole fut accomplie, tant il possédait de grâce. Et pourtant quoi de plus intime que l’âme ? Eh bien ! l’âme même, on la méprise pour obéir au précepte du Christ. Mais vous, en entendant ces mots « Dieu vous a béni », n’allez point vous scandaliser ni concevoir aucune basse pensée. Comme je l’ai dit plus haut, il s’agit de la chair, de cette chair qui a des lèvres, qui reçoit la grâce, qui reçoit la bénédiction. Quant à Dieu, il n’a besoin ni de bénédiction, ni de grâce, attendu que rien ne manque à la divinité. Il est écrit : « Comme le Père réveille les morts et les rend à la vie, ainsi le Fils vivifie ceux qu’il veut. » (Jn. 5,21) Et encore : « Les œuvres que le Père fait, le Fils les fait pareillement. » (Id. V. 19) Et encore : « Comme mon Père me connaît, moi aussi, je connais mon Père : » (Id. 10,15) Ces mots : Ainsi, Pareillement, Comme, excluent toute idée de différence. Mais ici, il s’agit de l’Incarnation. Lui-même, il dit ailleurs : « Si mon Père m’aime, c’est que je donne ma vie pour mes brebis. » (Id. 10,17) Est-ce donc que son Père ne l’aimait pas auparavant ? Alors comment expliquer ces paroles : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ? » (Mt. 3, 17) Il ne s’est exprimé, comme nous venons dé voir, que pour manifester la grandeur d’une telle œuvre. Si la comparaison de ces passages donne lieu à quelques explications, il n’en est pas besoin à l’égard de celui qui nous occupe. Si le Psal1niste a commencé par dire : « Autrement beau que les fils des hommes, et la grâce a été répandue sur vos lèvres », et encore : « Pour cette raison, Dieu vous a béni pour l’éternité », par allusion à l’Incarnation, c’est afin que vous ne vous scandalisiez pas, lorsqu’il viendrait parler du Fils en termes moins dignes de sa majesté, et que vous voyiez bien de quoi il s’agit. – De même, prédisant l’Incarnation, disait après beaucoup d’autres choses : « Ses yeux sont brillants comme le vin, et ses dents blanches comme le lait. » (Gen. 49,12) La divinité n’a point de dents. Un autre Prophète dit encore : « Il frappera la terre par la parole de sa bouche, et exterminera les impies avec le souffle de ses lèvres. » (Is. 11,4) En cela il se rencontre avec Paul qui dit : « Que le Seigneur détruira par le souffle de sa bouche, et exterminera par la manifestation de sa présence. » (2Thes. 2,8)
Afin que ces paroles ne vous inspirent point de mépris, le Psalmiste vous montre la puissance de la divinité. Car il ne sépare pas la chair de la divinité, ni la divinité de la chair, non qu’il confonde les substances (à Dieu ne plaise !) mais afin d’en montrer l’union. De là ces paroles : « Dieu vous a béni pour l’éternité. » Comment s’opère cette bénédiction ? par les louanges des anges, des archanges, des trônes, des dominations, des puissances, toute la terre, d’un bout à t’autre, rend gloire et hommage au Dieu fait chair. Adam, le premier homme, fut chargé d’imprécations ; celui-ci, au contraire, est chargé de bénédictions. Au premier, il fut dit : « Tu es maudit dans tes œuvres », et ses enfants furent frappés à leur tour de semblables malédictions : « Maudit celui qui fait négligemment les œuvres du Seigneur ; maudit celui qui ne reste pas fidèle à toutes les choses écrites dans ce livre ; maudit celui qui est pendu au bois. » (Gen. 3,17 ; Jer. 48,10 ; Deut. 27,26 ; Id. 21,26) Voyez-vous que de malédictions ? Le Christ nous en délivra, en les assumant sur sa tête. De même qu’il s’est humilié pour nous relever, qu’il est mort pour vous rendre immortels ; de même il a assumé les malédictions afin que vous fussiez comblés de bénédictions. Qu’y a-t-il de comparable à une bénédiction achetée au prix d’une malédiction ? Le Christ n’avait pas besoin de bénédictions pour lui-même ; c’est pour vous qu’il les a gagnées. Quand je dis qu’il s’est humilié, je rie parle pas d’un changement réel, je fats seulement allusion à la condescendance de l’Incarnation ; de même, quand je dis qu’il a été béni, je n’entends pas indiquer qu’il eût besoin de bénédiction ; je désigne encore par là la condescendance de son incarnation. La nature humaine, donc, a été bénie. Le Christ, ressuscité d’entre les morts, ne meurt plus, n’est plus en butte à la malédiction, ou plutôt il n’y était pas davantage en butte auparavant ; il s’en est seulement