Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/288

Cette page n’a pas encore été corrigée

au-dessus de la loi n’est pas instruit par elle. Celui qui l’accomplit, non par crainte, mais par un désir plus ardent de la vertu, celui-là l’exécute mieux. Car celui qui craint la peine et celui qui désire l’honneur n’accomplissent pas la loi de la même façon ; on ne peut assimiler celui qui est sous la loi et celui qui est au-dessus de la loi ; vivre au-dessus de la loi, c’est en faire un usage légitime. Celui-là en fait un excellent usage et l’observe, qui fait plus que la loi ne prescrit, et qui ne se fait pas le disciple de la loi. Car, en général, la loi défend le mal, mais cela ne suffit pas pour être juste ; il y faut joindre la pratique du bien. En sorte que ceux qui ne s’abstiennent du mal que par une crainte servile n’accomplissent point le but de la loi. Comme elle est faite pour réprimer la prévarication, ils font bien usage de la loi, mais seulement dans la crainte du châtiment. « Voulez-vous », dit l’Écriture, « ne pas craindre le pouvoir ? Faites le bien » (Rom. 13,3) ; c’est-à-dire, qu’elle ne dénonce le châtiment qu’aux méchants ; mais celui qui mérite des couronnes, à quoi bon une loi pour lui ? Le médecin est utile au blessé, non à celui dont la santé est bonne et satisfaisante.
« La loi », continue l’apôtre, « est faite pour les injustes et les insubordonnés, les impies et les pécheurs (9) ». Par les injustes et les insubordonnés, il entend les Juifs. « La loi », dit-il ailleurs, « opère la colère ». (Rom. 4,15) Qu’a cela de commun avec celui qui mérite l’honneur ? « Par la loi, le péché est reconnu ». (Id. 3,20) Qu’a cela de commun avec le juste ? Comment donc la loi n’est-elle pas faite pour lui ? Parce qu’il n’est pas soumis au châtiment, et parce qu’il n’attend pas qu’elle lui enseigne ce qu’il doit faire, ayant au dedans de lui-même la grâce de l’Esprit qui l’inspire. Car la loi a été donnée pour réprimer par la crainte et les menaces. Mais il n’est pas besoin de frein pour un cheval qui se laisse aisément conduire, ni d’instruction pour celui qui n’en manque pas. « Pour les injustes et les insubordonnés, les impies et les pécheurs, les scélérats et les hommes souillés, les meurtriers de leur père ou de leur mère (9) ». L’apôtre ne s’est pas borné là dans l’indication des péchés, mais il les a parcourus en détail, afin de faire rougir ceux qui sont sous la loi. Et derrière cette énumération, il y a une allusion facile à saisir. De qui veut-il donc parler ? Des Juifs. Les meurtriers de leur père et de leur mère, ce sont eux. Les hommes souillés, les impies, ce sont eux. Ce sont eux que l’apôtre a en vue lorsqu’il dit : « Pour les impies, pour les pécheurs ». Puisqu’ils étaient tels, il fallait bien que la loi leur fût donnée. Dites-moi, en effet, n’adoraient-ils pas continuellement des idoles ? Ne voulaient-ils pas lapider Moïse ? Leurs mains n’étaient-elles pas souillées du meurtre de leurs frères ? Les prophètes ne leur font-ils pas sans cesse ces reproches ? Tout cela est étranger à ceux dont la pensée est dans le ciel.
« Les parricides, les meurtriers, les fornicateurs, les hommes coupables de désordres contre nature, les vendeurs d’hommes libres, les menteurs, les parjures, et tout ce qui peut encore être contraire à la saine doctrine (9, 10, 11) » : c’étaient là toutes les passions des âmes corrompues. « Doctrine qui est conforme », dit-il, « à l’Évangile de la gloire du Dieu bienheureux ; et cet Évangile m’a été confié (11) ». En sorte que maintenant encore la loi est nécessaire pour l’affermissement de l’Évangile ; mais non à ceux qui croient. Si l’apôtre l’appelle Évangile de gloire, c’est ou bien en vue de ceux qui en rougissent à cause des persécutions et de la passion du Christ, et spécialement parce que la passion du Christ et les persécutions sont une gloire ; ou bien pour exprimer mystérieusement l’avenir. Car si l’époque présente est remplie d’opprobres et d’outrages, il n’en sera pas de même de l’avenir, et « l’Évangile » a pour objet l’avenir plutôt que le présent. Comment donc l’ange a-t-il dit : « Voilà que je vous évangélise qu’il vous est né un Sauveur ? » (Lc. 11,10-11) Le Sauveur « est « né », mais il « sera » Sauveur, car il n’a pas fait ses miracles à sa naissance. – « Conforme « à l’Évangile de la gloire du Dieu bienheureux ». Par « gloire » il entend l’adoration de Dieu, et nous dit que si le temps présent est rempli de sa gloire, le temps à venir le sera bien davantage ; « quand ses ennemis seront mis sous ses pieds » (1Cor. 15,25), lorsqu’il n’y aura plus d’opposition à sa gloire et que les justes verront ce bonheur « que l’œil n’a point vu, que l’oreille n’a point entendu, et qui n’a point pénétré dans le cœur de l’homme ». (Id. 2,9) « Je veux », dit l’Évangile, « que, là où je suis, ils soient