DISCOURS
I. Vous savez avec quelle joie nous prenons part à l’allégresse de votre charité. Nous tressaillons en Dieu notre Seigneur, dont l’Apôtre a dit : « Il est notre paix, car c’est lui qui a fait toutes choses dans l’unité[1] ». Aussi rendons-nous de vives actions de grâces à ce même Jésus-Christ notre Seigneur et notre Sauveur. Nous ne possédions point encore la volonté de notre frère Emérite, et déjà nous connaissions son amour pour l’unité. C’est Dieu lui-même qui nous a accordé cette faveur, et admirez comment il nous a permis d’entendre des lèvres mêmes de notre frère les principes sur lesquels il fondait ses dispositions. À peine était-il entré dans cette église, se tenant debout à l’endroit même où nous avons commencé notre conférence, sous l’inspiration de Dieu qui instruit le cœur et gouverne la langue, il nous adressa cette parole : « Je ne puis ne pas vouloir ce que vous voulez, mais je puis vouloir ce que je veux ». Vous voyez ce qu’il promettait en disant qu’il ne pouvait pas ne point vouloir ce que nous voulions. S’il ne peut pas ne point vouloir ce que nous voulons, il sait donc ce que nous voulons. Car ce que nous voulons, c’est ce que vous voulez vous-mêmes, et tous, nous voulons ce que Dieu veut. Or, ce que Dieu veut ne peut être un mystère pour personne. En effet, dans le Testament de Celui qui nous a constitués ses cohéritiers, nous lisons : « Je vous donne ma paix, je vous laisse ma paix[2] ». Ou plus tôt, ou plus tard il ne peut donc pas ne point vouloir ce que nous voulons. Mais voici qui nous annonce quelques retards : « Je puis vouloir ce que je veux ». Rapprochons toutes ces paroles : « Je ne puis pas ne point vouloir ce que vous voulez, mais je puis vouloir ce que je veux ». Il peut vouloir ce qu’il veut, mais il ne peut pas ne point vouloir ce que nous voulons. Voyons d’abord quel pouvoir il s’attribue. En ce moment il veut ce qu’il veut ; mais ce qu’il veut, Dieu ne le veut pas. En effet, que veut-il maintenant ? être séparé de l’Église catholique, être en communion avec les Donatistes, être dans le schisme, être du nombre de ceux qui disent : « Moi j’appartiens à Paul, moi j’appartiens à Apollo, moi j’appartiens à Céphas ». Mais ce n’est pas là ce que Dieu veut, puisque ces divisions arrachent à l’Apôtre ce cri déchirant : « Jésus-Christ est-il donc divisé[3] ? » Si donc il peut vouloir ce qu’il veut, ce n’est que pour un temps, ce n’est que pour un moment, ce n’est pas pour des motifs de sagesse, mais simplement de respect humain. Toujours est-il que c’est là ce qu’il veut et il peut vouloir ce qu’il veut. Mais puisqu’il ne peut pas ne point vouloir ce
- ↑ Eph, 2,14
- ↑ Jn. 14,27
- ↑ 1Co. 1,12-13