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pour elle nous sommes instruits par se : œuvres et ses discours admirables ; pour elle nous avons reçu le gage de son Esprit ; pouf elle nous croyons et espérons en lui ; poux elle, enfin, nous sommes enflammés de son amour, autant qu’il nous en fait la grâce. C’est elle qui nous console dans toutes nos afflictions, qui nous délivre de toutes nos peines, c’est pour elle que nous supportons courageusement toutes les tribulations, afin qu’en elle nous régnions heureusement sans tribulation aucune. C’est avec raison que Notre-Seigneur a terminé par elle ces paroles qui, pour ses disciples encore peu éclairés, étaient des paraboles, et qu’ils devaient comprendre seulement après la venue du Saint-Esprit, qu’il leur avait précédemment promis, en ces termes : « Je vous aie dit ces choses lorsque j’étais encore au milieu de vous ; mais le Saint-Esprit consolateur, que le Père enverra en mon nom, vous enseignera toutes choses, et il vous rappellera tout ce que je vous dis [1] ». Cette heure était assurément celle où il leur avait promis de ne plus parler en paraboles, mais de parler ouvertement du Père. Ces mêmes paroles de Jésus-Christ devaient cesser d’être des paraboles pour ceux qui les comprendraient, grâce à la révélation du Saint-Esprit. Cependant, quand le Saint-Esprit parlerait dans leur cœur, le Fils unique ne devait pas se taire, car il vient de dire qu’à cette heure il leur parlerait ouvertement du Père, et comme ils devaient comprendre désormais, ce ne serait plus pour eux des paraboles. Mais en cela même, c’est-à-dire dans la manière dont le Fils de Dieu et le Saint-Esprit, et même la Trinité tout entière qui opère indivisiblement, parlent au cœur des hommes spirituels, se trouve une parole pour ceux qui comprennent, et une parabole pour ceux qui ne comprennent pas.
2. Quand donc il leur eut déclaré pourquoi il leur avait dit toutes ces choses, quand il leur eut dit que c’était pour leur faire trouver la paix en lui, au moment où le monde les persécuterait ; quand il les eut exhortés à avoir confiance, puisqu’il avait vaincu le monde, il se trouva avoir achevé ce qu’il avait à leur dire, il s’adressa dès lors à son Père, et commença à prier. L’Évangéliste, en effet, poursuit en ces termes : « Jésus prononça ces paroles, et ayant levé les yeux au ciel, il dit : Père, l’heure est venue, glorifiez votre Fils ». Notre-Seigneur, Fils unique du Père et coéternel à lui, pouvait, dans sa forme d’esclave et par elle, prier en silence, s’il l’avait jugé nécessaire ; mais il a voulu être auprès de son Père notre intercesseur, de manière toutefois à ne pas oublier qu’il était aussi notre maître. Par conséquent, la prière qu’il a faite pour nous, il l’a faite pour nous instruire. Car un si grand maître devait édifier ses disciples, non seulement en leur adressant ses leçons, mais encore en priant son Père en leur faveur. Et si ces paroles étaient à l’avantage de ceux qui devaient les entendre prononcer, elles devaient être aussi avantageuses à nous qui devions les lire dans son Évangile. Ainsi donc, quand il dit : « Père, l’heure est venue, glorifiez votre Fils », il montre que le temps tout entier, et tout ce qu’il faisait ou laissait faire, était à la disposition de Celui qui n’est pas soumis au temps. En effet, tout ce qui doit arriver à n’importe quelle époque, a sa cause efficiente dans la sagesse de Dieu, en qui ne se trouve aucun temps. Gardons-nous donc de croire que cette heure soit venue, amenée par la fatalité ; elle est venue uniquement par l’ordre de Dieu. La connexion des astres n’a pas non plus nécessité la passion de Jésus-Christ ; loin de nous la pensée que les astres puissent forcer à mourir le Créateur des astres. Le temps n’a donc pas contraint Jésus-Christ à mourir ; mais Jésus-Christ a choisi son temps pour mourir ; car il a fixé avec le Père dont il est né en dehors du temps, le temps où il est né de la Vierge. C’est d’accord avec cette vraie et saine doctrine que l’apôtre Paul a dit : « Mais quand est venue la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils [2] ». Dieu dit aussi par le Prophète : « Au temps favorable je t’ai exaucé, et au jour du salut je t’ai aidé [3] ». L’Apôtre dit encore : « Voici maintenant le temps favorable, voici maintenant le jour du salut [4] ». Que Jésus dise donc : « Père, l’heure est venue » ; car, avec le Père, il a disposé toutes les heures ; c’est comme s’il disait : « Père, elle est venue », l’heure que nous avons fixée ensemble pour me glorifier à cause des hommes et devant les hommes, « glorifiez votre Fils, afin que votre Fils vous glorifie à son tour ».

  1. Jn. 11, 25, 26
  2. Gal. 4, 4
  3. Isa. 49, 8
  4. 2 Cor. 6, 2