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le monde et il est allé à son Père, quand, après avoir accompli tout le mystère de son Incarnation, il a placé, à la droite de son Père, la nature humaine qu’il nous avait empruntée pour s’en revêtir ; c’est ce que rapporte l’évangéliste Marc : « Le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut élevé dans le ciel, et il est assis à la droite de Dieu[1] ». De même qu’il ne s’est point séparé du Père, quand il est venu dans le monde, de même, il n’a point abandonné ses élus en retournant vers son Père ; car il dit lui-même dans un autre endroit : « Voici que je suis avec vous, tous les jours, jusqu’à la consommation des siècles[2] ». Tout en restant avec le Père, en tant que Dieu, il est venu en ce monde en tant qu’homme : et tout en remontant, en tant qu’homme, vers le Père, il est demeuré avec ses élus en tant que Dieu. Ainsi s’exprime-t-il encore ailleurs : « Personne n’est monté au ciel, sinon Celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’Homme, qui est au ciel[3] ».

12. « Ses disciples lui dirent : Voilà que vous parlez ouvertement et que vous ne vous servez plus de parabole[4] ». Par ces paroles, les disciples montrent qu’en entretenant avec eux cette conversation le Sauveur avait abordé un sujet qui leur était singulièrement agréable : sans doute, tout ce qu’il leur avait dit, ils ne l’avaient point parfaitement compris ; pourtant, ils croyaient bien avoir saisi sa pensée, puisqu’ils lui répondirent : « Voilà que vous parlez ouvertement, et que vous ne vous servez point de parabole ». La raison en était que, souvent, il prévenait leurs désirs : ils voulaient l’interroger sur certains points, mais avant qu’ils eussent eu le temps de le faire, il leur répondait suivant leurs vœux : c’était là, pour eux, un indice de sa divinité ; ils le comprenaient si bien, qu’ils continuèrent en ces termes : « Nous voyons maintenant que vous savez toutes choses et qu’il n’est pas besoin que personne vous interroge ; aussi croyons-nous que vous êtes sorti de Dieu[5] ». C’est, en effet, le propre de Dieu de lire, dans le cœur humain, les pensées qui s’y trouvent l’Écriture nous l’atteste, car elle dit : « Il n’y a que vous seul pour connaître le cœur des hommes[6] ». Et encore : « Seigneur, vos yeux voient dans le cœur humain[7] ». Et, dans un autre psaume : « Vous découvrez de loin mes pensées[8] ».

DIX-HUITIÈME SERMON. SUR CES PAROLES DE L’APÔTRE (Ephés. 3, 18) : « AFIN QUE VOUS PUISSIEZ COMPRENDRE QUELLE EST LA HAUTEUR, LA LARGEUR, LA LONGUEUR ET LA PROFONDEUR ». LARGEUR ET LONGUEUR.

ANALYSE. – Deux explications également mystiques de ce texte de l’Apôtre.

1. « Celui qui a compris, dit l’Apôtre, quelle est la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur, et connu le suréminent amour de Jésus-Christ pour nous[9] », celui-là a vu le Christ ; il a vu aussi le Père. Voici comme j’ai l’habitude de comprendre ces paroles de l’apôtre Paul. Dans la largeur, il faut voir les bonnes œuvres de la charité ; dans la longueur, la persévérance finale : dans la hauteur,

  1. Mrc. 16, 19
  2. Mat. 28, 10
  3. Jn. 3, 13
  4. Id. 16, 29
  5. Jn. 16, 30
  6. 1Ro. 8, 39
  7. Jer. 20, 12
  8. Psa. 138, 2
  9. Eph. 3, 18-19