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Que le Juif écoute cette parole, que le Gentil l’écoute et reste confondu. Ils ont pu le railler quand il était élevé sur la croix, qu’ils écoutent le récit de son ascension au ciel. Ils ont pu nous objecter les humiliations du Calvaire, qu’ils se rendent témoins des splendeurs de ce jour. Nous lisons ensuite : « Voici que deux hommes vêtus de blanc se tinrent debout et dirent : Hommes de la Galilée, pourquoi restez-vous ainsi regardant le ciel ? Ce Jésus qui nous a quittés pour monter au ciel, descendra de nouveau de la même manière que vous l’avez vu s’élever vers le ciel[1] ». Ainsi donc, après avoir accompli sa mission sur la terre, Jésus-Christ venait de remonter au ciel lorsque des envoyés célestes viennent confirmer aux disciples ce qu’ils ont vu et leur prouver qu’ils ne sont les jouets d’aucune illusion, afin de les rendre capables d’attester par eux-mêmes non-seulement le fait de l’ascension du Sauveur, mais encore la promesse de son retour à la fin du monde. L’Évangile renferme les mêmes enseignements que le livre des Actes : « Et après les avoir bénis, Jésus les quitta, et il s’éleva vers le ciel ; de leur côté, en adorant, ils rentrèrent à Jérusalem avec une grande joie[2] ». Parce que le Sauveur s’était humilié pour nous, pour nous aussi il déploie dans sa personne une splendeur toute divine. Notre humanité dont Jésus-Christ a daigné se revêtir fait aujourd’hui son entrée triomphante dans le ciel ; Jésus-Christ ne se contente pas d’avoir sauvé l’homme, il veut encore le glorifier. Il nous montre enfin que désormais le ciel nous est ouvert, puisque lui-même y occupe le trône qui lui appartient ; quel honneur reçoit ainsi le limon dont nous sommes formés, puisqu’il règne aujourd’hui dans le ciel ! Nous avons d’abord jeûné pendant quarante jours, mais pendant les quarante jours suivants notre corps a été dispensé de cette privation.
3. Les quarante jours de jeûne se sont terminés par la fête de Pâques ; les quarante jours depuis Pâques se ferment par la grande solennité de ce jour, dans lequel notre Sauveur nous ravit sa présence visible, mais toutefois sans cesser d’habiter avec nous. Pendant qu’il demeurait corporellement au milieu de nous, il n’était point séparé de son Père ; de même, aujourd’hui qu’il est retourné à son Père, il n’est point séparé de nous. Au lieu de nous quitter comme des étrangers, il reste et demeure avec nous ; car il a dit lui-même : « Que votre cœur ne se trouble point et ne tremble pas[3] ». Et un peu plus loin : « Je m’en vais et je viens à vous[4] ». Jésus-Christ habite donc au milieu de nous. Il console ceux qui souffrent, il soulage ceux qui sont dans la souffrance, il apporte secours à ceux qui sont en danger, il est l’appui des malheureux, il est le soutien des affligés. Redisons-le encore Jésus-Christ est avec nous ; il est présent non-seulement à nos travaux, mais encore à nos paroles et à nos pensées. Il scrute et sonde notre cœur. Il voit ce qu’enfantent nos sens, notre main, notre langue. Combien notre vie doit être réglée, pieuse et chaste, puisque nous sommes toujours sous les yeux de Dieu ! Cette doctrine, mes frères, vous est parfaitement connue. Quand des serviteurs négligents se trouvent en présence de leurs maîtres charnels, ils craignent, ils tremblent, ils frémissent ; ils ne se laissent aller à aucune faute tant qu’ils ne sont pas assurés d’échapper à la surveillance. Pour vous, chrétiens, vous ne pouvez vous soustraire aux regards du Seigneur. Quelque part que vous alliez, vous y portez votre conscience. Le serviteur dont je viens de parler, s’il était jour et nuit en présence de son maître temporel, se laisserait-il aller à la désobéissance ? Votre Dieu est toujours avec vous, puisqu’il est partout ; quelle docilité ne devraient donc pas vous inspirer la crainte et le respect de sa présence ? Dieu sera toujours là pour vous protéger dans sa miséricorde ; il sera là aussi comme témoin et vengeur de chacune de nos fautes. À ce Dieu donc aussi bon que juste et aussi terrible que miséricordieux soient honneur et gloire dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

  1. Id. II
  2. Lc. 24, 5,52
  3. Jn. 14, 1
  4. Id.28