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attendons son second avènement. Quiconque l’attend dans le sentiment de la foi, se réjouira au moment de sa venue ; mais pour ceux qui ne croient pas en lui, ils seront accablés de confusion, lorsqu’apparaîtra ce qu’ils ne voient pas aujourd’hui ; et leur confusion ne durera pas qu’un jour, elle ne passera pas, comme passe d’habitude la confusion de ceux qu’on surprend en délit, et à qui on reproche leur faute. Elle les forcera à se rendre, tout honteux, à la gauche pour entendre cet arrêt : « Allez au feu éternel, qui a été préparé pour le diable et pour ses anges[1] ». Demeurons donc dans ses paroles, afin qu’il ne nous confonde pas au jour de son avènement. Car il dit dans l’Evangile à ceux qui avaient cru en lui : « Si vous demeurez dans ma parole, vous serez vraiment mes disciples ». Et comme s’ils disaient : Quel profit en retirerons-nous ? il ajouta : « Et vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous affranchira[2] ». Aujourd’hui, notre salut n’est qu’en espérance, il n’est pas encore réalisé ; car nous ne sommes point encore entrés en possession de ce qu’il nous a promis : nous l’attendons dans l’avenir. Mais celui qui nous a donné sa parole est fidèle à ses promesses, il ne te trompera pas : seulement, il ne faut pas perdre courage, attends donc avec confiance l’exécution de ses engagements. En effet, la vérité ne sait pas être trompeuse. Pour toi, ne sois pas menteur, parlant d’une manière et agissant de l’autre. Aie toujours la foi, et Dieu n’oubliera pas ses promesses. Si tu perds la foi, c’est toi qui te trompes, ce n’est pas celui qui t’a engagé sa parole.


3. « Si vous savez qu’il est juste, sachez que tout homme qui vit de la justice, est né de lui ». Aujourd’hui, notre justice vient de la foi. La justice parfaite ne se trouve que dans les anges, et, si on les compare à Dieu, à peine se trouve-t-elle en eux. Si, néanmoins, les âmes et les esprits que Dieu a créés peuvent être doués de quelque justice, elle se voit dans les anges saints, justes, bons, que nulle chute n’a séparés de Dieu, qu’aucun sentiment d’orgueil n’entraîne dans l’abîme, mais qui continuent toujours à contempler le Verbe éternel, et trouvent leur bonheur uniquement en celui qui les a créés. En eux se rencontre la justice parfaite : en nous elle puise son principe dans la foi par l’opération de l’Esprit. Lorsqu’on lisait le psaume, vous avez entendu ces paroles : « Commencez à louer Dieu par la confession[3] ». « Commencez », dit le Psalmiste : la source de notre justice, c’est l’aveu de nos fautes. Tu as commencé à ne pas défendre ton péché : tu as, par là même, commencé à devenir juste ; ta justice arrivera à sa perfection, quand tu ne ressentiras plus aucun attrait à commettre l’iniquité, quand la mort sera absorbée pour faire place à la victoire[4], quand la concupiscence ne viendra plus te délecter, quand il n’y aura plus en toi de lutte contre la chair et le sang, quand tu remporteras la couronne de la gloire et que tu triompheras de l’ennemi : alors, tu seras en possession de la justice parfaite. Maintenant, nous luttons encore ; puisque nous luttons, nous sommes dans l’arène ; nous portons des coups, on nous en porte : reste à savoir qui sera vainqueur. Celui-là remportera la victoire, qui, pour frapper, attend sa force, non de lui-même, mais de la toute-puissance de Dieu. Le diable seul lutte avec nous ; pour nous, si nous sommes avec Dieu, nous triomphons du diable ; mais si tu es seul pour lutter avec lui, il te vaincra. C’est un ennemi exercé ; que de palmes il a remportées ! Voyez où il nous a jetés : pour nous faire naître sujets à la mort, il a fait sortir du paradis nos premiers parents eux-mêmes. Que faire donc, puisqu’il est si habile à combattre ? Invoquer l’assistance du Tout-Puissant contre cet esprit malin. Puisse habiter en toi Celui qu’on ne peut vaincre, et tu triompheras en toute sécurité de celui qui triomphe d’habitude. Mais de qui triomphe-t-il ? De ceux en qui Dieu n’habite pas. Car, sachez-le, mes frères, dans le paradis où il avait été placé, Adam a méprisé les ordres de Dieu ; il a relevé la tête comme s’il voulait ne dépendre que de lui-même et ne pas se soumettre à la volonté de l’Eternel ; aussi a-t-il été privé de ses espérances immortelles, de sa bienheureuse destinée[5]. Un homme, déjà exercé au combat, mais condamné à la mort par sa naissance, étendu sur un fumier, en proie à la pourriture et aux vers, a triomphé du diable ; celui-ci a vaincu Adam, mais Adam l’a vaincu en la personne de Job ; car Job était du nombre de ses descendants ; vaincu au paradis, notre premier père a donc été vainqueur sur le fumier. Au paradis, il avait prêté l’oreille aux

  1. Mt. 25, 31
  2. Jn. 8, 31-32
  3. Ps. 146, 7
  4. 1 Cor. 15, 54
  5. Gen. 3, 6