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est pour la gloire de Dieu, afin que le Fils de Dieu soit glorifié par elle ». Par quoi ? Par cette maladie.
7. « Or, Jésus aimait Marthe, et sa sœur Marie et Lazare ». Lazare était malade, et ses sœurs étaient tristes ; mais tous étaient ses amis. Ils étaient aimés de Celui qui sauvait les malades, je dis plus, de Celui qui ressuscitait les morts et consolait les affligés. « Ayant appris qu’il était malade, il resta deux « jours dans le même lieu n. On apporta donc la nouvelle à Jésus ; mais il resta là, et il s’écoula quatre jours complets. Et ce ne fut pas sans raison ; car peut-être, et même certainement, ce nombre de jours indique quelque mystère. « Et après cela, il dit à ses disciples « Allons de nouveau en Judée ». Il s’y était presque vu lapider, et il semblait ne s’être éloigné que pour n’être pas lapidé. Il s’était éloigné comme homme ; mais, en revenant, il oublia, en quelque sorte, sa faiblesse et montra sa puissance. « Allons en Judée », dit-il.
8. Quand il eut dit cela, voyez comme ses disciples furent effrayés. « Ses disciples lui disent : Maître, tout à l’heure les Juifs cherchaient à vous lapider, et vous y allez de nouveau ? Jésus répondit : N’y a-t-il pas douze heures au jour ? » Que signifie cette réponse ? Ces disciples lui ont dit : « Tout à l’heure les Juifs voulaient vous lapider », et « de nouveau vous y allez ? » Est-ce pour qu’ils vous lapident ? Et le Seigneur leur répond : « N’y a-t-il pas douze heures au jour ? Si quelqu’un marche pendant le jour, il ne chancelle point, parce qu’il voit la lumière de ce monde ; mais s’il marche pendant la nuit, il chancelle, parce que la lumière n’est point en lui ». Le Seigneur a parlé du jour ; mais dans notre intelligence règne encore une sorte de nuit. Invoquons le jour, pour qu’il chasse la nuit et qu’il éclaire notre cœur des feux de sa lumière. Qu’a voulu dire le Seigneur ? D’après ce qu’il me semble, et autant que me permettent de juger l’élévation et la profondeur de ce discours, il a voulu leur reprocher leur doute et leur infidélité. Ils voulaient conseiller au Seigneur de ne pas mourir, lui qui n’était venu que pour mourir et les empêcher de mourir eux-mêmes. C’est ainsi que, dans un autre passage, saint Pierre qui aimait Notre-Seigneur, mais ne comprenait pas encore pleinement pourquoi il était venu, témoigna la crainte qu’il avait de le voir mourir ; par là il déplut à la vie, c’est-à-dire au Seigneur lui-même. En effet, comme. Notre-Seigneur apprenait à ses disciples ce qu’il aurait à souffrir de la part des Juifs à Jérusalem, Pierre, au milieu de tous les autres, lui dit : « A Dieu ne plaise, Seigneur ; épargnez-vous, cela ne vous arrivera pas ». Et aussitôt Notre-Seigneur lui répondit : « Retire-toi de moi, Satan, car tu goûtes non point les choses qui sont de Dieu, mais celles qui sont des hommes ». Peu auparavant il avait confessé le Fils de Dieu et nlerité des louanges ; il avait entendu Jésus lui adresser ces paroles : « Tu es heureux, Simon fils de Jona ; car ce n’est pas la chair et le sang qui te l’ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux [1] ». À celui auquel il avait dit : « Tu es heureux », il dit : « Retire – toi, Satan » : parce que, s’il était heureux, ce n’était pas en lui-même qu’il trouvait le principe de son bonheur ; quelle en était donc la cause ? « Parce que ce n’est pas la chair et le « sang qui te l’ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux ». Voilà ce qui te rend heureux ; cela ne vient pas de toi, mais de moi. Non que je sois le Père, mais parce que tout ce que le Père possède est à moi[2]. Mais si Pierre est heureux par le fait du Seigneur lui. même, qui est-ce qui fait de lui un Satan ? Le Seigneur nous l’apprend ici même. Il a indiqué la raison de la béatitude de Pierre, en disant : « Ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé ceci, mais mon Père qui est dans les cieux » ; voilà la cause de ta béatitude. Mais si j’ai dit : « Retire-toi de moi, Satan », écoutes-en la raison : « C’est que tu goûtes, non pas les choses qui sont de Dieu, mais les choses qui sont de l’homme ». Que personne donc ne se flatte ; de son propre fonds, l’homme est un satan ; c’est Dieu seul qui le rend heureux. Qu’est-ce à dire : De son propre fonds, sinon de son péché ? Ôte le péché, que te reste-t-il en propre ? Ce qui me fait juste, dira quelqu’un, vient de mon propre fonds. Mais « qu’as-tu que tu ne l’aies reçu[3] ? » Comme donc des hommes s’adressaient à Dieu, des disciples à leur Maître, des serviteurs à leur Seigneur, des malades à leur Médecin, pour lui donner un conseil, il les reprit et leur dit : « N’y a-t-il pas douze heures au jour ? Si quelqu’un marche dans

  1. Mt. 16, 16-23
  2. Jn. 16,15
  3. 1 Cor. 4, 7