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dois-je croire ? au milan ou à la colombe ?
14. Réponds-moi donc, afin que tu sois confondu par cette même lampe qui a confondu autrefois les premiers ennemis du Seigneur, les Pharisiens tes pareils. Ils demandaient un jour à Jésus-Christ par quelle puissance il faisait ces choses : « Et moi », leur répondit-il, « je vous interrogerai à mon tour ; dites-moi : le baptême de Jean, d’où est-il, du ciel ou des hommes ? » Et eux qui se préparaient à lui décocher les traits de leurs ruses, se virent embarrassés par cette question ; ils réfléchirent donc : « Si nous répondons », se dirent-ils, « qu’il est du ciel, il nous répliquera : Pourquoi ne l’avez-vous pas cru ? » Car Jean avait dit du Seigneur : « Voici l’Agneau de Dieu, voici Celui qui efface le péché du monde ». Pourquoi donc me demandez-vous par quelle puissance je fais ces choses. O loups, ce que je fais, je le fais par la puissance de l’Agneau ; mais afin de connaître l’Agneau, pourquoi n’avez-vous pas cru à cette parole de Jean : « Voici l’Agneau de Dieu, voici Celui qui efface le péché du monde ?[1] » Sachant donc ce que Jean avait enseigné du Seigneur, ils se dirent : « Si nous répondons que le baptême de Jean est du ciel, il nous répliquera : Pourquoi donc ne l’avez-vous pas cru ? Si nous répondons qu’il est des hommes, nous serons lapidés par le peuple ; car il regarde Jean comme un prophète ». D’un côté, ils craignaient les hommes, de l’autre ils avaient honte de dire la vérité. Les ténèbres firent une réponse de ténèbres, mais la lumière les confondit. Que répondirent-ils en effet ? « Nous ne savons pas ». Ils le savaient bien, et néanmoins ils dirent : « Nous ne savons pas ». Et le Seigneur : « Ni moi non plus », leur répondit-il, « je ne vous dis au nom de qui je fais ces choses[2] ». Ainsi furent confondus les premiers ennemis du Christ. Par quoi ? Par la lampe. Qui était cette lampe ? C’était Jean. Prouvons-nous qu’il était une lampe ? Nous le prouvons. En effet le Seigneur a dit : « Jean était une lampe ardente et luisantes[3] ». Prouvons-nous que c’est par elle que les ennemis du Christ ont été confondus ? Oui, écoutez le Psalmiste : « J’ai préparé une lampe à mon Christ, je couvrirai de confusion ses ennemis[4] ».
15. Plongés encore dans les ténèbres de cette vie, nous marchons à la lueur de la lampe de la foi ; tenons aussi en main cette lampe qui est Jean ; avec elle confondons à notre tour les ennemis du Christ. Ou plutôt, que le Christ lui-même confonde ses ennemis par sa lampe. Adressons-leur la même question que le Seigneur adressait aux Juifs ; faisons-leur la même question et disons : Le baptême de Jean, d’où est-il ? Du ciel ou des hommes ? Que diront-ils ? Voyez, si eux aussi ne sont pas, comme autrefois les ennemis du Sauveur, confondus par la lampe ? Que diront-ils ? S’ils disent que ce baptême est des hommes, les leurs eux-mêmes les lapideront ; s’ils disent, du ciel, nous leur répondrons : Pourquoi donc n’y croyez-vous pas ? – Ils répliqueront : Peut-être nous y croyons. – Comment donc dites-vous que vous baptisez, tandis que, d’après le témoignage de Jean, « c’est celui-là qui baptise ? » Mais, selon eux, les ministres d’un si grand Juge doivent être justes, puisqu’ils donnent le baptême. Moi aussi je dis, et tous nous disons que les ministres d’un si grand Juge doivent être justes. Que les ministres soient donc justes, s’ils le veulent ; mais si ceux qui sont assis dans la chaire de Moïse s’y refusent, mon maître me tranquillise ; car l’Esprit a dit, en parlant de lui : « C’est celui-là qui baptise ». Et comment me tranquillise-t-il ? « Les Scribes », a-t-il dit, « et les Pharisiens sont assis sur la chaire de Moïse ; ce qu’ils disent, faites-le, mais ne faites pas ce qu’ils font, car ils disent et ne font pas [5] ». Si le ministre est juste, je le mets avec Paul, je le range avec Pierre ; avec eux je range les ministres ; mais les saints ministres ne cherchent pas leur gloire, ils sont ministres et ils ne veulent point passer pour des juges ; ils verraient avec indignation les hommes mettre en eux leur espérance. Un tel ministre, je le range avec Paul. En effet, que dit Paul : « Pour moi, j’ai planté, Apollo a arrosé, mais Dieu a fait croître. Ni celui qui plante n’est quelque chose, ni celui qui arrose, mais Dieu qui fait croître[6] ». Quant au ministre orgueilleux, il a sa place à côté du diable ; mais le don du Christ n’est point pour cela profané. Il coule par le canal de ce ministre, il coule limpide et pur, il arrive à la terre fertile : supposé

  1. Jn. 2, 29
  2. Mt. 21, 23-27
  3. Jn. 5, 35
  4. Ps. 81, 17-18
  5. Mt. 23, 2-3
  6. 1 Cor. 3, 6-7