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pour les dieux des nations, pour les démons ; aimable pour les dieux qu’il a faits, pour ses enfants. De là vient que nous voyons la majesté de Dieu proclamée par les uns et par les autres, et les démons ont confessé le Christ, et les fidèles ont aussi confessé le Christ. « Vous êtes le Christ, Fils du Dieu vivant[1] », s’écria saint Pierre. « Nous savons qui vous êtes, le Fils de Dieu[2] », lui dirent les démons. Je trouve donc la même confession, sans trouver la même charité ; ou plutôt la charité est d’une part, de l’autre, la crainte. Ils sont donc enfants de Dieu ceux qui le trouvent aimable ; ceux qui le trouvent terrible, ne sont point ses enfants ; il a fait dieux ceux qui le trouvent aimable, et il a convaincu de n’être pas dieux ceux qui le trouvent terrible. Les uns deviennent des dieux, les autres en ont l’apparence ; la vérité donne aux uns la divinité, l’erreur l’attribue aux autres.
3. Donc « le Dieu des dieux a parlé » ; et parlé en différentes manières. C’est lui qui a parlé au moyen des anges, qui a parlé dans les Prophètes[3], qui a parlé de sa propre bouche, qui a parlé dans ses Apôtres, qui parle dans ses fidèles, qui se sert de notre bassesse pour vous dire ce que nous disons de vrai. Voyez donc ce qu’a fait au moyen de ce langage si répété, si diversifié, qui nous vient par tant d’organes, par tant d’instruments, ce Dieu qui les touche, qui les accorde, qui les inspire. « Car il a parlé et il a appelé la terre ». Quelle terre ? l’Afrique peut-être ? Car on entend dire que l’Église du Christ, c’est le parti de Donat. Dieu n’a pas seulement appelé l’Afrique, mais il n’a pas séparé l’Afrique du reste du monde. Car celui qui « a appelé la terre de l’Orient au couchant », qui n’a laissé aucune partie du monde sans l’appeler, a trouvé l’Afrique dans les peuples qu’il daignait appeler à lui. Que l’Afrique se réjouisse d’être appelée, sans se glorifier d’être séparée. Nous le disons avec raison, le Dieu des dieux a fait entendre sa voix en Afrique, mais sans l’y borner ; car « il a appelé la terre de l’Orient à l’Occident ». Il ne reste aux hérétiques ni ténèbres pour cacher leurs embûches, ni ombres pour voiler leur dogme erroné ; car, « nul ne peut se dérober au feu de ce soleil[4] ». Celui qui a appelé la terre, a appelé toute la terre ; celui qui a appelé la terre, l’a appelée telle qu’il l’a créée. Pourquoi m’apporter de faux christs et de faux prophètes ? Que me veulent ces hommes qui cherchent à m’enlacer dans leurs discours captieux, en disant : « Le Christ « est ici, ou il est là[5] ? » Je ne comprends rien quand on me montre des parties ; le Dieu des dieux me montre l’univers entier ; lui qui « a appelé la terre de l’Orient jusqu’à l’Occident », l’a rachetée sans exception ; il a condamné ceux qui divisent par la calomnie.
4. Mais après avoir vu que c’est la terre qui est appelée depuis l’Orient jusqu’à l’Occident ; depuis quel temps celui qui l’a appelée a-t-il commencé à l’appeler ? Écoutez cette parole : « C’est de Sion que lui vient l’éclat de sa beauté[6] » Ce passage du psaume est d’accord avec l’Évangile, qui dit : « Allez dans toutes les nations, en commençant par Jérusalem ». Remarquez : « Dans toutes les nations ; il a appelé la terre depuis l’Orient jusqu’à l’Occident ». Écoutez encore : « En commençant par Jérusalem ; c’est de Sion que lui vient l’éclat de sa beauté ». Donc, « il a appelé la terre depuis l’Orient jusqu’à l’Occident », est analogue à ces paroles du Seigneur : « Il fallait que le Christ souffrît, qu’il ressuscitât d’entre les morts le troisième jour, et qu’en son nom la pénitence et la rémission des péchés fussent prêchées parmi les peuples[7] ». Car tous les peuples sont disséminés de l’Orient à l’Occident. Quant à cette parole : « C’est de Sion que lui vient l’éclat de la beauté », ou que l’Évangile a commencé à jeter son éclat, puisque c’est là que l’on a d’abord annoncé celui qui est le plus beau parmi les enfants des hommes[8], elle est analogue à ces mots du Seigneur : « En commençant par Jérusalem ». Les nouvelles Écritures s’accordent avec les Écritures anciennes, comme les anciennes avec les nouvelles ; les deux séraphins se disent mutuellement : « Saint, Saint, Saint est le Seigneur, le Dieu des armées[9] ». Les deux Testaments sont d’accord, et tous deux n’ont qu’une même voix ; écoutons la voix de ces deux Testaments, si unis entre eux, et rejetons les calomnies des déshérités. Voilà donc ce qu’a fait le Dieu des dieux : « Il a appelé la terre de l’Orient à l’Occident », et sa beauté lui est venue de Sion. C’est là qu’étaient les

  1. Mt. 16,16
  2. Mc. 1,24
  3. Héb. 1,1
  4. Ps. 18,7
  5. Mt. 24,23
  6. Ps. 49,2
  7. Lc. 24,46-47
  8. Ps. 44,3
  9. Isa. 6,3