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aussi nier le Christ, puisque le Christ aime l’unité ? Disons plus clairement encore comment les Donatistes nient le Christ. Pour nous, le Christ est celui dont saint Jean-Baptiste disait : « L’E« poux est celui à qui appartient l’épouse[1] ». Sainte union ! noces heureuses ! Le Christ même est l’Epoux, l’Église est l’épouse. Or, c’est l’Epoux qui nous fait connaître l’épouse. Ah ! que cet Epoux nous dise donc quelle est son épouse ; qu’il nous l’apprenne pour nous empêcher de nous égarer et de troubler la solennité sainte où il nous a conviés ; qu’il nous instruise, en nous enseignant d’abord lui-même qu’il est véritablement l’Epoux.

11. Après sa résurrection il disait à ses disciples : « Ne saviez-vous pas qu’il fallait que fût accompli tout ce qui est écrit de moi dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et dans les Psaumes ? Alors, poursuit l’Évangéliste, il leur ouvrit l’esprit, pour leur faire comprendre les Écritures ; et il leur dit : « C’est ainsi que devait souffrir le Christ et ressusciter, le troisième jour, d’entre les morts ». Voilà quel est l’Epoux confessé par Pierre ; c’est le Fils même du Dieu vivant qui était destiné à souffrir ainsi et à ressusciter le troisième jour. Or, cet événement était accompli ; les disciples en étaient témoins ; ils voyaient le Chef divin, mais où était son corps ? Le Christ est ce Chef qui a souffert et qui est ressuscité le troisième jour ; et c’est de l’Église qu’il est le Chef ; d’où il suit que l’Église est son corps. Encore une fois, les disciples voyaient le Chef, mais non pas le corps. Dites-leur, ô Chef sacré, où est votre corps, qu’ils ne voient pas. Parlez, Seigneur Jésus, parlez, ô saint Époux, parlez-nous de votre corps, de votre épouse, de votre bien-aimée, de votre colombe, de celle à qui vous avez donné pour dot votre propre sang ; dites : « Il fallait que « le Christ souffrit et ressuscitât d’entre les a morts, le troisième jour ». Voilà pour l’Epoux. Parlez maintenant de l’épouse, écrivez sur les tablettes, dans l’acte de mariage. – Voici donc pour l’Epouse : « Et qu’on prêchât » ; c’est ce qui suit ces mots : « Il fallait que le Christ souffrît, qu’il ressuscitât d’entre les morts, et qu’on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés au milieu de toutes les nations ». Ou te cacher ? « Au milieu de toutes les nations, à commencer par Jérusalem[2] ». Ce qui a été fait. Si nous lisons cette promesse, nous la voyons accomplie. Voilà à quelle lumière je marche. D’où fais-tu venir les ténèbres où tu te plonges ? Ainsi le Christ a pour épouse cette Église que l’on prêche au milieu de toutes les nations, qui se multiplie et qui s’étend jusqu’aux extrémités de la terre, à partir de Jérusalem : c’est bien de cette Église que le Christ est l’Époux. Mais toi, que prétends-tu ? Quelle est selon toi l’épouse du Christ ? La faction de Donat ? Non, non, non, non, homme, le Christ n’est pas l’Époux de cette faction ; ou plutôt, non, méchant, il n’est pas son Époux. Nous voici près du contrat, lisons-le et point de disputes. Diras-tu encore que le Christ est l’Époux de la faction de Donat ? Je lis l’acte de mariage et je constate au contraire que le Christ a pour épouse l’Église répandue par tout l’univers. Or, dire de lui ce qu’il n’est pas, c’est nier son incarnation.

12. Des hérésies que j’ai rappelées dans le peu de temps que j’ai à vous donner, reste le Pélagianisme ; car il est beaucoup d’autres hérésies encore, et j’ai dit moi-même : Qui pourrait nombrer ces sortes de contagion ? Que disent donc les Pélagiens ? Écoutez : Ils semblent d’abord admettre l’Incarnation ; mais en y regardant de près on voit qu’ils rejettent. En effet le Christ a pris une chair qui n’était pas une chair de péché, mais qui en avait la ressemblance. – Voici les termes mêmes de l’Apôtre : « Dieu a envoyé son Fils dans une chair semblable à la chair de péché[3] ». Il ne l’a pas envoyé dans une espèce de chair, dans une chair qui n’en était pas une ; mais « dans une chair semblable à la chair de péché » ; chair réelle, mais qui n’était pas une chair de péché. Or Pélage ne veut-il pas que la chair de tous les enfants sont tout à fait semblable à la chair du Christ ? Il n’en est rien, mes bien-aimés. Pourquoi mettre si fort en relief que le Christ n’avait qu’une chair semblable à la chair de péché, si toute autre chair n’était pas une chair de péché ? Qu’importe de dire que le Christ s’est incarné, quand on ne fait de lui, sous le rapport de la chair, qu’un enfant comme tous les autres ? Je te dirai donc ce que j’ai dit au Donatiste : Ce

  1. Jn. 3, 29
  2. Luc. 24, 44-47
  3. Rom. 8, 3