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Vérité issue du Père infiniment vrai ; et l’Esprit-Saint est la Bonté émanant du Père et du Fils l’un et l’autre infiniment bons ; mais la divinité des trois personnes est la même identiquement et leur unité inaltérable.
19. Or, pour nous préparer à l’éternelle vie que nous recevrons à la tin de nos jours, la première grâce que nous confère la Bonté de Dieu, en nous initiant à la foi, est la rémission des péchés. Tant qu’ils demeurent en nous effectivement, nous sommes en quelque sorte ennemis de Dieu et séparés de lui, ce qui vient de notre fond dépravé : « Vos péchés, dit l’Écriture infaillible, vous éloignent de Dieu[1]. » Aussi Dieu ne nous communique ses biens qu’en nous délivrant de nos maux ; nous nous enrichissons d’autant plus de ceux-là que ceux-ci diminuent, et nous n’aurons les uns dans toute leur perfection que si nous sommes entièrement affranchis des autres. Or, c’est par l’Esprit-Saint que le Seigneur Jésus remet les péchés, comme c’est par l’Esprit-Saint qu’il chasse les démons. Ce qui peut le faire entendre, c’est qu’ayant dit à ses disciples, après sa résurrection : « Recevez le Saint-Esprit », il ajouta sur-le-champ : « Les péchés seront remis à qui vous les remettrez, et retenus à qui vous les retiendrez[2]. » Ce qui le prouve encore c’est que cette régénération spirituelle où s’effacent tous les péchés, s’opère aussi par le Saint-Esprit, car le Seigneur dit expressément : « Si l’on ne renaît de l’eau et de l’Esprit, on ne saurait entrer dans le royaume de Dieu.[3]. » Remarquez néanmoins que naître de l’Esprit n’est pas se nourrir de l’Esprit ; comme naître de la chair, ce qui a lieu quand on quitte le sein maternel, est autre chose que de se nourrir de la chair, ce qui se voit quand la mère allaite son enfant, quand celui-ci s’attache à boire avec plaisir à la source même où il a puisé la vie, afin d’y alimenter le principe d’existence qu’il en a reçu. Le premier bienfait que nous recevions de la Bonté divine par le Saint-Esprit, est donc, il le faut croire, la rémission de nos péchés. Aussi c’est par là que commencèrent les prédications de Jean-Baptiste, envoyé pour préparer les voies au Seigneur. Voici en effet ce qui est écrit : « Or, en ces jours-là vint Jean-Baptiste, prêchant dans le désert de Judée et disant : Faites pénitence, car le royaume des cieux approche[4]. » Par là commença aussi le Seigneur« À dater de ce moment, est-il écrit, Jésus commença à prêcher et à dire : Faites pénitence, car le royaume des cieux approche[5]. » Jean disait encore, entre autres choses, à ceux qui venaient lui demander le Baptême : « Moi, à la vérité, je vous baptise dans l’eau pour la pénitence ; mais Celui qui doit venir après moi, est plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de porter sa chaussure : lui-même vous baptisera par l’Esprit-Saint et par le feu[6]. » Le Seigneur disait aussi : « Jean a baptisé dans l’eau, mais vous, vous serez baptisés par l’Esprit-Saint sous peu de jours, d’ici à la Pentecôte[7]. » Quant à l’expression de Jean : Et par le feu, on peut sans doute y voir les persécutions que devaient endurer les fidèles pour le nom du Christ ; il importe toutefois de remarquer que le même Esprit-Saint est représenté aussi sous le symbole du feu. Aussi est-il dit au moment de sa descente : « Alors leur apparurent comme des langues de feu ; et ce feu se reposa sur chacun d’eux[8]. » Le Seigneur disait de son côté : « Je suis venu mettre le feu à la terre[9]. » Et l’Apôtre dans le même sens : « Embrasés par l’Esprit[10]. » C’est lui en effet qui allume la charité ; car elle est répandue dans nos cœurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné, et ce qui lui est contraire, c’est, comme dit le Seigneur, que « la charité d’un grand nombre se refroidira[11]. » La charité parfaite est le don parfait de l’Esprit-Saint. Mais il doit être précédé par celui de la rémission des péchés : bienfait immense qui nous arrache à la puissance des ténèbres[12], et met dehors, au moyen de notre foi, le prince de ce monde[13], qui agit sur les fils de la défiance en les associant et en les enchaînant au péché[14], Or c’est par l’Esprit-Saint, qui unit le peuple de Dieu, que se chasse l’esprit impur divisé contre lui-même.
20. Contre ce don gratuit, contre cette grâce de Dieu parle le cœur impénitent. L’impénitence est ainsi le blasphème contré l’Esprit, qui ne sera effacé ni dans ce siècle, ni dans le siècle 1 venir. En effet, on parle d’une façon bien perverse et bien impie, de la bouche ou du cœur, contre cet Esprit en qui l’on est baptisé pour la rémission de tous les péchés et qui a été donné à l’Église pour qu’elle puisse effacer tous les crimes ;

  1. Isa. 59, 2
  2. Jn. 20, 22-23
  3. Id. 3, 6
  4. Mat. 3, 1, 2
  5. Mat. 4, 17
  6. Id. 3, 11
  7. Act. 1, 5
  8. Id. 2, 3
  9. Luc. 11, 49
  10. Rom. 12, 11
  11. Mat. 24, 12
  12. Col. 1, 13
  13. Jn. 12, 31
  14. Eph. 2, 2