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quiconque, en effet, « se glorifie, doit se glorifier dans le Seigneur[1]. Qu’avez-vous que vous ne l’ayez reçu[2] ? » Ce n’est donc pas seulement la magnificence qui justifie l’impie, mais la magnificence et la confession sont l’œuvre du Seigneur Pourquoi dire, en effet, que Dieu fait miséricorde à qui lui plaît, et qu’il laisse endurcir qui lui plaît ? Y a-t-il néanmoins injustice en Dieu ? Loin de là. « Sa justice demeure de siècle en siècle ». Mais toi, ô homme de ce siècle, qui es-tu pour répondre à Dieu[3] ?
4. « Le Seigneur a consacré la mémoire de ses merveilles », en humiliant l’un, en exaltant l’autre. « Il a consacré la mémoire de ses merveilles[4] », en se réservant pour le temps opportun des prodiges extraordinaires, dont la faiblesse humaine, éprise des nouveautés, pût conserver le souvenir, bien que ses miracles de chaque jour soient plus grands. Il crée dans toute la terre une infinité d’arbres, et nul n’y prend garde ; qu’il en dessèche un seul de sa parole, voilà le cœur des hommes dans l’admiration[5] ; mais : « Il a consacré la mémoire de ses merveilles », et ces miracles, que l’habitude n’aura point en quelque sorte avilis à nos yeux, se graveront principalement dans les âmes attentives.
5. Mais à quoi ont servi les miracles, sinon à faire craindre le Seigneur ? Et à quoi servirait la crainte, « si le Seigneur, dans sa miséricorde et dans sa bonté, ne donnait la nourriture à ceux qui le craignent[6] ? » Nourriture incorruptible, pain descendu du ciel[7], qu’il nous a donné sans que nous l’eussions mérité. Car le Christ est mort pour les impies[8]8 ; et nul autre que le Seigneur ne pouvait donner une semblable nourriture avec une miséricordieuse bonté. Si donc il nous a fait un tel don pour cette vie ; si le pécheur, pour être justifié, a reçu le Verbe fait chair, que ne recevra-t-il point quand il sera glorifié dans le ciel ? « Car il se souviendra dans tous les siècles de son alliance », et n’ayant donné qu’un gage, il n’a point tout donné.
6. « Il fera voir à son peuple la puissance de ses œuvres[9] ». Qu’ils ne s’affligent point, ces saints d’Israël, qui ont tout quitté pour le suivre ; qu’ils ne s’affligent point, en disant : « Qui donc pourra être sauvé ? puisqu’il sera plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume des cieux[10] ». Il leur montrera la puissance de ses œuvres ; car ce « qui est difficile aux hommes, devient facile à Dieu. Il leur donnera l’héritage des nations[11] ». L’Évangile a passé aux nations, et l’on a enjoint aux riches de ce siècle de n’être point orgueilleux, de ne mettre point leur espérance dans les richesses incertaines, mais dans le Dieu vivant[12], à qui devient facile ce qui est difficile aux hommes. C’est ainsi que plusieurs ont été appelés, ainsi qu’on s’est emparé de l’héritage des nations, ainsi que plusieurs, qui n’avaient pas renoncé aux biens de cette vie pour suivre Jésus-Christ, ont bien osé mépriser la vie même pour confesser son nom, et s’étant humiliés comme des chameaux sous le fardeau des afflictions, sont entrés par la voie étroite des piquantes douleurs, comme par le trou de l’aiguille. Ainsi agit celui à qui tout est possible.
7. « L’œuvre de ses mains, c’est la vérité et le jugement ». Que ceux que l’on juge en ce monde gardent bien cette vérité. On juge ici-bas les martyrs, on les conduit à ces tribunaux où non seulement ils jugeront leurs juges, mais ces anges mêmes[13] avec lesquels ils étaient en lutte, quand les hommes paraissaient les juger. Ne soyons séparés du Christ ni par la tribulation, ni par l’angoisse, ni par la faim, ni par la nudité, ni par le glaive[14], « car tous ses oracles sont fidèles ». Il ne trompe point, mais tient ce qu’il a promis. Et toutefois, ce n’est point ici-bas qu’il faut attendre ce qu’il a promis, ici-bas qu’il faut l’espérer ; mais eu ses oracles sont affermis à jamais, ils sont dictés dans la justice et dans « la vérité[15] ». Le vrai, le juste, c’est le travail ici-bas, le repos en l’autre vie. « Parce qu’il a envoyé à son peuple un Rédempteur[16] ». Et d’où ce peuple est-il racheté, sinon de la captivité de son exil ? Ne recherchons donc le repos que dans la céleste patrie.
8. Dieu a donné aux Israélites charnels, cette Jérusalem terrestre « qui est esclave avec ses enfants[17] » ; mais tel est le vieux Testament, concernant le vieil homme. Or,

  1. 1 Cor. 1,31
  2. Id. 4,7
  3. Rom. 9,14.18-20
  4. Psa. 110,4
  5. Mat. 21,19-20
  6. Psa. 110,5
  7. Jn. 6,27
  8. Rom. 5,6
  9. Ps. 110,6
  10. Mt. 19,24-26
  11. Ps. 110,7
  12. 1 Tim. 6,17
  13. 1 Cor. 6,3
  14. Rom. 8,35
  15. Ps. 110,8
  16. Id. 9
  17. Gal. 4,25