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« Dans le chemin de sa force ». Cette force vient-elle d’elle-même ? Que serait-elle en elle-même, quelle voix aurait-elle en elle-même et d’elle-même, autre que la voix du péché, que la voix de l’iniquité ? Examinez cette voix, qu’y trouverez-vous ? Tout au plus cette réponse : « J’ai dit, Seigneur, ayez pitié de moi, guérissez mon âme parce que j’ai péché contre vous[1] ». Si Dieu l’a justifiée, « elle lui a répondu », non par ses propres mérites, mais par des œuvres qui viennent de lui. Où ? « Dans la voie de sa force ». C’est là le Christ, lui qui a dit : « Je suis la voie, la vérité, la vie[2] ». Mais avant la résurrection, le peuple ne le connaissait point ; ce fut principalement lors de sa mort sur la croix, que son infirmité cacha ce qu’il était[3], jusqu’à ce qu’il parût dans sa force par sa résurrection. Donc l’Église n’a point répondu au Fils de Dieu dans le chemin de son infirmité, mais bien quand il a fait éclater sa force clans sa résurrection. L’Église ne lui a point répondu quand il était dans la vie de son infirmité, mais bien quand il était « dans la voie de sa force » : car ce fut après sa résurrection qu’il appela son Église de tous les confins de la terre, non plus dans l’infirmité de la croix, mais dans toute la force du ciel. La gloire du chrétien, en effet, n’est pas de croire à la mort du Christ, mais bien plutôt à la résurrection du Christ. Car le païen croit qu’il est mort ; et s’il te fait un reproche, c’est de croire à un mort. Où donc est ta gloire ? C’est de croire à la résurrection du Christ, et d’espérer que tu ressusciteras par le Christ : telle est la gloire de ta foi. « Si tu crois en ton cœur que Jésus est le Seigneur, et si ta bouche confesse que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, tu seras sauvé[4] ». L’Apôtre ne dit point : Si tu confesses que Dieu l’a livré à la mort ; mais : « Si tu confesses que Dieu l’a ressuscité des morts, tu seras sauve ; car, c’est par le cœur que l’on croit pour devenir juste, et l’on confesse de bouche pour obtenir le salut[5] ». Pourquoi donc croire à sa mort ? Parce que nous ne pouvons croire à sa résurrection sans croire à sa mort. Qui peut ressusciter, si d’abord il ne meurt ? Qui se réveille sans avoir dormi ? « Mais celui qui a dormi, ne s’éveillera-t-il donc point[6] ? » Telle est la foi des chrétiens. Telle est la foi qui a uni l’Église, et dans laquelle « cette Épouse abandonnée a plus d’enfants que celle qui a un mari[7] ; et lui répond », en lui chantant des louanges selon ses préceptes ; « dans la voie de sa force », et non dans la voie de son infirmité.
8. Déjà nous avons entendu cette réponse : « C’est en rassemblant les peuples et les royaumes dans l’unité, afin qu’ils servent le Seigneur[8] ». Telle est donc sa réponse, l’unité, et quiconque n’est pas dans l’unité, ne lui répond point. Car le Christ est un, l’Église est unité. L’unité seule répond à Celui qui est un. Mais il en est qui disent : Voilà ce qui est fait : l’Église des quatre coins du monde a répondu au Christ, en lui donnant plus de fils que celle qui avait un Époux ; « elle lui a répondu dans la voie de sa force » ; elle a cru que le Christ est ressuscité ; toutes les nations ont cru en lui. Mais cette Église, qui fut l’Église de toutes les nations, ne l’est déjà plus ; elle a péri. Telle est le langage de ceux qui n’en sont pas. O insolence ! Elle n’est pas l’Église, parce que tu n’en es pas ? Prends garde de n’être plus par cela même ; car elle subsistera, bien que tu n’en sois point. Celte voix abominable, détestable, pleine de présomption et de fausseté, qui n’a pour base aucune vérité, qui n’est éclairée par aucune sagesse, ni pondérée par aucune prudence, qui est vaine, qui est téméraire, qui est précipitée, qui est pernicieuse, a été prévue par l’Esprit de Dieu, et il semble la combattre en prédisant l’unité contre ses adeptes : « En rassemblant dans l’unité les peuples et les rois, afin qu’ils servent le Seigneur ». Et quand l’Apôtre ajoute, qu’elle lui a répondue, c’est sa louange, c’est la Jérusalem notre mère, qui sera enfin rappelée de son exil, elle qui est féconde, et qui a plus d’enfants que celle qui avait un Époux ; elle dont les adversaires devaient dire : Elle a été, mais elle n’est plus. « Faites-moi connaître l’exiguïté de mes jours[9] ». Quels sont ces murmures que j’ignore, et que profèrent contre moi ceux qui s’en éloignent ? Comment des hommes perdus soutiennent-ils que je suis perdue ? Ils publient hardiment que je ne suis plus, et que j’ai été : « Faites-moi connaître le nombre restreint de mes jours ». Je ne vous demande point des jours éternels : ceux-là sont sans fin, et je les obtiendrai ; je ne vous les demande point ; je m’enquiers des jours du temps,

  1. Ps. 11,5
  2. Jn. 14,6
  3. 2 Cor. 13,4
  4. Rom. 10,9
  5. Id. 10
  6. Ps. 11,9
  7. Gal. 4,27
  8. Ps. 101,23
  9. Id. 24