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de la mort : ou veut-il dire qu’elles s’ouvriront sûrement pour la résurrection ? « À ta vue les gardiens de l’enfer ont-ils tremblé ? » comme à la vue de Celui en qui le prince de ce monde n’a rien trouvé qui méritât la mort. Ils n’avaient point demandé sa mort, ils le rendirent promptement à la vie. Par les gardiens de l’enfer il faut entendre quelques puissances inférieures chargées de veiller sur la mort.
18. « As-tu mesuré tout ce que les cieux entourent ? »commeCelui qui a répandu partout son Église. « Dis-moi donc ce que sont toutes ces choses. » Qui peut le savoir, si Lui ne l’a pas enseigné ?
19. « En quelles régions habite la lumière ? » C’est encore Lui qui l’enseigne, car sa parole répand la lumière, et donne l’intelligence aux petits enfants [1]. « Quelle est la demeure des ténèbres ? » Nous le savons aussi de Celui gui a dit : « Approchez-vous de lui et vous serez éclairés[2]. » C’est nous apprendre qu’on devient ténèbres quand on s’éloigne de lui en refusant d’être comme les petits enfants. Car le commencement de l’orgueil de l’homme, c’est de se séparer de Dieu[3]. Aussi ceux qui ne l’ont point glorifié, et ne lui ont pas rendu grâces, se sont perdus dans la vanité de leurs pensées, et leur cœur insensé s’est obscurci[4] ; ils sont devenus l’habitation des ténèbres. Peut-être faut-il entendre encore par demeure des ténèbres le lieu où tombent les pécheurs obstinés : ceux-ci seraient alors les ténèbres et ils habiteraient un séjour réellement inconnu de tous les hommes. Pareillement le séjour de la lumière serait cette terre des vivants ; la félicité donnée en partage à ceux qui persévèrent dans la foi, l’espérance et la charité ; qui étaient autrefois ténèbres et qui sont maintenant lumière dans le Seigneur[5].
20. « Me conduiras-tu à leurs limites ? » jusqu’au terme où arrivent ces pécheurs. Qu’y a-t-il où ne pénètre pas la sagesse de Dieu, qui atteint avec force d’une extrémité à l’autre et dispose tout avec douceur[6] ? Aussi nul homme ne peut lui être comparé. « Si tu as connu les traces de leur passage ; »
21. « Savais-tu que tu devais naître ? Connaissais-tu le nombre de tes années ? » Tu as pu connaître la route suivie par les impies qui sont ténèbres, ou demeure des ténèbres, parce que ceux qui se sont attachés à Dieu ont d’abord suivi ces sentiers de l’impiété avant de recevoir la grâce divine, source de leur justification : mais as-tu pu savoir quel motif il y avait de t’appeler à la vie périssable de ce monde, alors que nos premiers parents entraient déjà dans ces sentiers par l’impiété de leur désobéissance, et que, de leurs mains et de leurs lèvres coupables, ils appelaient la mort qui nous a tous fait mourir en Adam ? Ce n’est donc point à partir de notre naissance, qu’il faut compter le nombre si restreint de nos années, mais à partir du jour où parut au monde le premier qui devait mourir. Ainsi par exemple, lorsque Abraham vint au monde, en lui naquirent tous les Hébreux. Le nombre de nos années est donc grand, si on part du jour où la mort commença dans les sentiers de l’impiété. Or, qui se souvient d’avoir été à ce moment ? qui se rappelle d’avoir existé réellement dans le sang de ses aïeux ? Car nul ne se rappelle l’époque même de sa propre naissance ; et cependant il est certain qu’alors il avait l’être, la vie et le sentiment. Mais toutes ces choses sont connues de la Sagesse éternelle, qui a tout créé, non-seulement ce qui vit dans le ciel ; mais encore ce qui est sujet à la mort. Or le Christ est la Force de Dieu et la Sagesse de Dieu [7] ; il connaît donc tous ces mystères. Il est né pour mourir, non parce qu’il y était condamné, mais, libre parmi les captifs de la mort, il en eut pitié et brisa leurs chaînes.
22. « As-tu pénétré dans les trésors de la neige ? » As-tu possédé la science de Celui qui connaissait les causes secrètes et cachées, mais nécessaires, des scandales dont le monde était menacé ? Il les appelle des trésors, parce qu’ils doivent éprouver le tueur des saints, exercer leur patience. « Malheur au monde, est-il dit, à cause des scandales ! Il est nécessaire qu’il y ait des scandales, mais malheur à l’homme par qui ils arrivent[8] ! » « Enflés d’orgueil, ils vont comme la neige se congeler dans les hauteurs, d’où ils retombent bientôt, et l’abondance de leurs iniquités refroidit la charité d’un grand nombre. Vous qui attendez le Seigneur avec un courage inébranlable[9], et dans la ferveur de l’esprit[10], persévérez jusqu’à la fin et vous serez sauvés[11]. « Où as-tu vu ceux de la grêle ? » La grêle, ce sont les pécheurs qui, non contents de languir loin de la ferveur, la poursuivent sans relâche et cherchent à l’anéantir.

  1. Psa. 118, 130
  2. Id. 33, 6
  3. Sir. 10, 14
  4. Rom. 1, 21
  5. Eph. 5, 5
  6. Sag. 8, 1
  7. 1Co. 1, 24
  8. Mat. 18, 7
  9. Psa. 26, 14
  10. Rom. 12, 21
  11. Mat. 24, 13