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âme. Cependant, si quelqu’un s’imagine que l’âme d’une bête est dans son sang, nous n’avons pas à nous embarrasser de cette question. Seulement il faut bien se garder de croire que l’âme humaine, qui soutient la vie de la chair et possède le don de la raison, ne soit que du sang cette erreur doit être combattue par tous les moyens. Cherchons encore des manières de parler, où le contenant signifie le contenu, afin de faire voir que, si l’âme est retenue dans le corps par le sang, car elle se retire quand il est répandu, c’est avec beaucoup de raison que l’âme est signifie par le sang, et que le sang prend le nom de l’âme. C’est ainsi qu’on nomme Église le lieu où l’Église se rassemble. Or, l’Église, ce sont les hommes dont il est parlé dans ce passage : « Afin de se donner à lui-même une Église pleine de gloire [1]. » Le même Apôtre cependant nous atteste que ce nom désigne encore la maison de prière : « N’avez-vous pas, dit-il, des maisons pour manger et pour boire ? ou méprisez-vous l’Église de Dieu[2] ? » L’usage n’a-t-il pas encore prévalu de dire qu’on se rend à l’Église ou qu’on s’y réfugie, pour signifier le lieu et les murs mêmes qui contiennent l’assemblée des fidèles ? Il est encore écrit« Celui qui prive le mercenaire de sa récompense, répand le sang[3]. » Aux termes de l’Écriture la récompense c’est le sang, parce que c’est elle qui alimente la vie, autrement dit, le sang.
4. Le Seigneur dit : « Si vous ne mangez ma chair, et si vous ne buvez mon sang, vous n’aurez point là vie en vous[4] ; » pourquoi donc la défense faite au peuple d’user du sang des sacrifices offerts pour les péchés, si tous ces sacrifices étaient la figure du sacrifice unique, source véritable du pardon des péchés ? Certainement nul n’est empêché de prendre en aliment le sang de ce sacrifice ; tous ceux qui, au contraire, veulent avoir la vie sont conviés à le boire. Il faut donc rechercher pour quel motif il est rigoureusement défendu à l’homme, sous la Loi, de manger du sang, tandis qu’il lui est prescrit de le répandre en l’honneur de Dieu. Quant aux raisons pour lesquelles le sang est mis pour l’âme, il me semble que nous venons de les développer suffisamment.

LVIII. (Ib. 18, 7-8.) Sur la défense de contracter mariage à divers degrés de parenté. — 1° avec, la mère et la belle mère. – « Tu ne découvriras pas la honte de ton père, et tu ne découvriras pas la honte de ta mère : car c’est leur honte. » Dieu défend au fils le commerce charnel avec sa mère : car c’est le déshonneur du père et de la mère. Il défend ensuite le même crime avec la belle-mère, quand il dit : « Tu ne découvriras pas la honte de la femme de ton père : car c’est la honte de ton père. » Il fait voir par là que le péché commis avec la mère déshonore l’un et l’autre, c’est-à-dire, le père et la mère ; tandis que le péché commis avec la belle-mère ne déshonore que le père.
LIX. (Ib. 18, 9.) Suite : 2° Avec les sœurs unilatérales. – « Tu ne découvriras point la honte de ta sœur de père ou de mère, qui est née dans la maison, ou dehors ; tu ne découvriras point leur honte. » Celle qui est née dans la maison, s’entend de la sœur du côté paternel ; celle qui est née dehors, vient du côté de la mère, dans le cas où celle-ci l’aurait eue d’un premier mariage et l’aurait fait entrer avec elle dans la maison, quand elle prit pour époux le père de celui qui, suivant la défense de l’Écriture, ne doit pas découvrir la honte de sa sœur. Il semblerait que Dieu n’a pas défendu ici, qu’il a en quelque sorte passé sous silence, le commerce charnel avec une sœur née du même père et de la même mère ; car il dit : « Tu ne découvriras point la honte de ta sœur de père ou de mère », et non « de père et de mère. » Mais qui ne voit que cette union tombe à bien plus forte raison sous le coup de la défense divine ? Car s’il n’est pas permis de découvrir la honte d’une sœur unilatérale, combien plus, d’une sœur de père et de mère ? Mais d’où vient qu’après avoir intercalé dans son récit la défense d’avoir commerce même avec la petite-fille, née du fils ou de la fille, l’Écriture, ajoute ce qui suit : « Tu ne découvriras point la honte de la fille de la femme de ton père[5] ? » Si elle s’en était tenue là, nous comprendrions encore que le commerce honteux soit défendu avec la fille de la belle-mère, qui, étant née de l’union de la belle-mère avec un premier mari, n’est sœur de celui que regarde la défense ni du côté paternel, ni du côté maternel ; mais en ajoutant : « Elle est ta sœur de père, tu ne révéleras pas sa honte » elle fait voir que la prohibition concerne la sœur qui est née du père et de la belle-mère et dont il a été parlé plus haut. L’Écriture a-t-elle voulu réitérer cette défense en termes plus formels, parce qu’elle l’avait précédemment formulée en

  1. Eph. 5, 27
  2. 1Co. 11, 22
  3. Sir. 34, 27
  4. Jn. 6, 54
  5. Lev. 18, 11