Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IV.djvu/491

Cette page n’a pas encore été corrigée

dans la suite, devait servir à allumer tous les feux du tabernacle. Après leur mort, Moïse s’exprime donc en ces termes : « Voici ce que le Seigneur a dit : Je serai sanctifié dans ceux qui m’approchent, et je serai glorifié dans tout le peuple. » Par ceux qui approchent du Seigneur, il a voulu désigner ceux qui remplissaient dans le tabernacle les fonctions du sacerdoce ; or, Dieu était sanctifié en leur personne, même par l’exercice de sa vengeance, ainsi qu’il arrive pour ces fils d’Aaron. Dieu infligea-t-il cette punition, pour nous apprendre combien les autres auront moins encore de droit à son indulgence, s’il n’épargna pas ceux-ci ; suivant le sens de ces mots : « Si le juste même se sauve avec peine, que deviendront le pécheur et l’impie [1] ? » Ou plutôt, n’est-ce pas dans le sens des textes suivants : « On exige davantage de celui à qui on donne davantage[2]. » – « Le serviteur qui ne connaît par la volonté de son maître, et qui fait des choses dignes de châtiment, sera peu battu ; mais le serviteur qui connaît la volonté de « son maître, et qui fait des choses dignes de « châtiment, sera battu rudement[3]. » Et encore : « Les petits obtiendront miséricorde et les puissants seront puissamment tourmentés[4]? » Mais à quel moment Dieu tint-il le langage que lui attribue Moïse ? On ne le voit pas dans les récits antérieurs de l’Écriture. Ceci offre donc un trait de ressemblance avec ce passage de l’Exode, où Moïse dit au Seigneur : « Vous l’avez dit : Je te connais entre tous[5]. » Il arriva effectivement que Dieu parla ainsi, mais à une époque postérieure ; toutefois, comme Moïse était incapable de mentir en disant cela, on comprend que Dieu lui avait déjà parlé antérieurement dans les mêmes termes, quoique l’Écriture ne l’ait pas rapporté, comme ici. Il est donc évident que tous les discours de Dieu à ceux par l’intermédiaire desquels nous est venue la sainte Écriture, n’ont pas été fixés par écrit.
XXXII. (Ib. 10, 6, 7.) Sur la défense faite aux prêtres de pleurer la mort de Nadabet d’Abiu. – Que signifie cette défense faite, par Moïse, à Aaron et aux fils qui lui restent, de pleurer la mort des deux coupables : « Vous n’ôterez point la tiare de dessus votre tête », paroles qui montrent évidemment que les tiares étaient l’ornement de la tête ? N’est-ce point parce que, dans le deuil, on mettait de côté ce que la coutume faisait considérer comme une parure ? De même en effet que parmi nous, on se couvre dans la tristesse, parce que nous avons l’habitude d’être plutôt découverts ; de même parmi les Juifs, la tristesse faisait un devoir de se découvrir, parce que la tête couverte était un signe de joie. Moïse leur défend de les pleurer, parce que le Seigneur a été sanctifié dans leur châtiment, en d’autres termes, parce que la crainte de lui, déplaire a été sanctionnée. Ce n’est pas que la mort des fils d’Aaron ne dût point être l’objet d’un deuil ; car il permet aux autres de le faire ; mais c’est que les prêtres ne devaient pas y prendre part, tout le temps que durait leur sanctification avant la fin des sept jours, pendant lesquels il leur était défendu de sortir du tabernacle. Néanmoins, il serait permis de croire qu’il leur était défendu de pleurer aucun mort à cause de leur consécration par l’huile sainte. Voici, en effet, la lettre du texte : « Vos frères de toute la maison d’Israël pleureront l’embrasement par lequel le Seigneur les a consumés, et vous ne sortirez pas hors de l’entrée du tabernacle, de peur que vous ne mouriez, car l’huile de l’onction, qui vient du Seigneur, est répandue sur vous[6]. »
XXXIII. (Ib. 10, 9-11.) Les prêtres n’useront pas de vin pendant qu’ils exercent leur ministère. – « Le Seigneur dit aussi à Aaron : Vous ne boirez point, toi et tes enfants, de vin ni de boisson fermentée, lorsque vous entrerez dans le tabernacle du témoignage, ou lorsque vous approcherez de l’autel, et vous ne mourrez point. » Quand leur était-il donc permis de boire, puisque leur ministère les mettait chaque jour dans la nécessité d’entrer dans le tabernacle et d’approcher de l’autel ? Si l’on objecte que les sacrifices ne s’offraient point ordinairement tous les jours, quelle objection pourra-t-on soulever au sujet de l’entrée dans le tabernacle ? Car elle devait se faire tous les jours pour le soin du chandelier et le renouvellement des pains de proposition. Répondra-t-on que le tabernacle duc témoignage désigne ici la partie du tabernacle occupée par l’arche du témoignage ? Mais, dirons-nous à notre tour, le grand-prêtre n’était-il pas obligé d’y entrer, aussi, pour y porter l’encens perpétuel ? Car il n’y entrait, à la vérité, qu’une fois l’année avec le sang de la purification, mais il y entrait tous les jours pour l’entretien de l’encens. Faut-

  1. 1Pi. 4, 18
  2. Luc. 12, 48
  3. Id. 47
  4. Sag. 6, 7
  5. Exo. 33, 12
  6. Lev. 10, 6-7