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ignorance une seconde fois le baptême, vous vous assurez du lieu où il a d’abord reçu ce sacrement, et puis vous l’admettez au milieu de vous ; vous ne lui donnez pas la foi qu’il vous demande, mais vous lui apprenez qu’il a ce qu’il désire ; vous ne vous arrêtez point à ses paroles quand il se trompe, mais vous vous appliquez à lui faire comprendre son erreur. On agit donc mal en donnant ce qui ne doit plus être donné, en violant le sacrement déjà conféré, et l’on n’est pas excusé par l’erreur de celui qui le demande. Dites-moi donc, je vous en supplie, comment celui qui s’adresse à vous n’a pas ce qu’il a déjà reçu de moi. Si c’est à cause de l’eau étrangère, de la fontaine étrangère, comme ont coutume de dire ceux qui ne comprennent pas ce passage de l’Écriture : « Abstenez-vous de l’eau étrangère, et ne buvez pas à une fontaine étrangère[1] ; » lorsque Félicien s’est séparé de vous pour passer dans le parti de Maximien, il était donc, selon les expressions de votre concile[2], un violateur adultère de la vérité, traîné à la chaîne du sacrilège. S’il avait emporté avec lui votre fontaine, quelle était donc celle où, après sa séparation, vous baptisiez encore ceux de votre parti ? Car Félicien est aujourd’hui au rang de vos évêques avec Primien ; tous les deux condamnés l’un par l’autre.

2. Ceux qui vous ont vu de ma part m’ont écrit « que, pressé sur cette question de Primien, vous avez répondu que nouvellement ordonné, vous ne pouvez pas vous constituer le juge de votre père et que vous demeurez dans ce que vous avez reçu de vos prédécesseurs. » C’est ici que je gémis sur l’état de contrainte où vous vous êtes placé, d’autant plus que, d’après ce que j’entends ; vous êtes un jeune homme d’un bon naturel. Il n’y a qu’une mauvaise cause qui puisse forcer à une réponse semblable. Mais si vous y réfléchissez, mon cher frère, si vous jugez sainement, si vous craignez Dieu, il n’y a pas de nécessité qui puisse vous obliger à persévérer dans une cause mauvaise. Cette réponse de votre part ne résout pas la question que je vous ai posée, mais elle absout notre cause de tous vos prétextes de calomnie. Vans dites que, nouvellement ordonné, vous ne pouvez pas vous constituer le juge de votre père, mais que vous

3. Ci-dessus, lett. CVII. demeurez dans ce que vous avez reçu de vos prédécesseurs. Pourquoi ne demeurerions-nous pas plutôt dans l’Église que le témoignage de l’Écriture nous montre commençant à Jérusalem, portant des fruits et se développant au milieu de toutes les nationsErreur de référence : Balise fermante </ref> manquante pour la balise <ref>. » En effet, si le nom du Seigneur était plus doux aux hommes que les noms des hommes, le Christ qui crie à la terre : « Je vous donne ma paix[3],» serait-il jamais divisé dans ses Membres par ceux qui disent : « Moi je suis à Paul, moi je suis à Apollon, moi je suis à Céphas[4], » et qui trouvent dans les noms des hommes des motifs de division ? Le Christ serait-il jamais effacé dans son baptême, lui de qui il a été dit : « C’est celui-ci qui baptise[5] ; » lui de qui il a été écrit : « Le Christ a aimé son Église et s’est livré lui-même pour elle afin de la sanctifier, en la purifiant dans le baptême de l’eau par la parole de vie[6] ? » Serait-il effacé dans son eau régénératrice, si le nom chu Seigneur, à qui appartient le baptême, était plus doux que le nom des hommes, dont vous osez dire : Le

  1. Prov. IX, 18. Edition des Septante : Ce verset ne se trouve pas dans la Vulgate. Il était un des arguments des donatistes.
  2. Le concile donatiste de Bagaïe.
  3. Jean, XIV, 27.
  4. I Cor. III, 4.
  5. Jean, I, 33.
  6. Ephés. V, 25, 26.