Monsieur le Marquis de Pontanges/Ch. 30
XXX.
VENGEANCE.
Le lendemain, tout le monde était réuni à table pour déjeuner ; on n’attendait plus que Lionel.
— Voyez si M. de Marny est chez lui, dit madame Ermangard ; peut-être n’a-t-il pas entendu sonner la cloche du déjeuner.
Un domestique revint en disant que M. de Marny était parti à cinq heures.
— Voici une lettre qu’il a laissée pour madame la marquise.
— Sans doute il vous explique ce brusque départ, dit madame Ermangard.
Madame de Pontanges ouvrit la lettre d’une main tremblante ; elle contenait ces mots :
« Vous ne m’aimez pas… Adieu ! »
Laurence resta longtemps immobile, les yeux fixés sur cette ligne.
— Quelle longue lettre ! dit tout bas le sous-préfet.
Enfin, revenante elle, madame de Pontanges plia le billet et le passa dans sa ceinture.
— Ma nièce, quelle raison donne-t-il ? demanda madame Ermangard.
— Une lettre de son père qui l’oblige d’être à Paris ce matin. M. de Marny me charge de vous exprimer tous ses regrets, monsieur le sous-préfet ; il ne peut se consoler de manquer la partie de chasse de demain.
Elle inventa ce mensonge avec une présence d’esprit merveilleuse ; elle parlait vite, mais avec beaucoup d’assurance : elle était si indignée !… « Je ne l’aime pas ! dit-il ; eh bien, qu’il le croie ; ce sera ma vengeance ! »