Mes paradis/Dans les remous/Ballade pour les étoiles quand même


XCVII

BALLADE POUR LES ÉTOILES QUAND MÊME


Le dos au feu, le ventre à table !
Oui, ce vers bourgeois a raison.
Ce n’est pas un sort lamentable
De rester calme en sa maison
Et d’y savourer à foison
Les vins, les mets en ribambelles,
Soupes, ragoûts, rôts, venaison.
Mais que les étoiles sont belles !

Et si l’on n’est pas un notable
Poussant son ventre à crevaison,
Si l’on trouve plus délectable
De s’aimer, suivant la saison,
Sur la plume ou sur le gazon,

Certes, pigeons et colombelles,
Divine est votre pâmoison.
Mais que les étoiles sont belles !

Ah ! sur la mer épouvantable
C’est grand, d’aller comme Jason
Quérir la chimérique étable
Dont l’hôte a de l’or pour toison.
J’irai. J’ouvrirai la prison,
Ô bélier céleste, où tu bêles.
Vents, vagues, tout m’est trahison.
Mais que les étoiles sont belles !

ENVOI

Prince, il n’est pas de guérison
Pour nous autres, fous et rebelles,
Mangeurs d’air, buveurs d’horizon,
Mais que les étoiles sont belles !