Mes paradis/Dans les remous/Ballade fraternelle


LIV

BALLADE FRATERNELLE


Donc, mes frères, tas de larrons,
Ce vieux sol, commune patrie,
À nous l’arracher nous mourons.
Toujours l’humanité meurtrie
Par l’humanité saigne et crie.
Mais, brute, homme, ô singe barbu,
Ta propriété, c’est flouerie.
L’air que tu bois, d’autres l’ont bu.

En ce monde où nous passerons
Comme une ombre sur la prairie,
Que nous soyons gueux ou barons,
Rien de personne n’est l’hoirie,
Ni l’eau que le fleuve charrie,

Ni les prés au tapis herbu,
Ni la céleste orfèvrerie.
L’air que tu bois, d’autres l’ont bu.

N’importe ! Au rire des clairons
La guerre souffle la tuerie.
En vain, rêveurs, nous espérons
De notre voix douce qui prie
Arrêter l’atroce Furie.
Jamais son cheval n’est fourbu.
Et pourquoi cette boucherie ?
L’air que tu bois, d’autres l’ont bu.

ENVOI

Prince, il faut que la paix sourie
Aux fils de la même tribu.
Elle est à tous, l’aube fleurie.
L’air que tu bois, d’autres l’ont bu.