Mémoires secrets d’un tailleur pour dames/24
LE PETIT CHIEN
ertha, qui était la meilleure femme
du monde, avait pris sous sa protection
une institution où on élevait
des jeunes filles sans fortune.
— Elle avait toujours eu un goût prononcé
pour les jeunes filles. Elle allait donc de
temps en temps leur faire visite en compagnie
de son beau sculpteur qui était, comme tout
Paris le savait, bien attaché à sa personne.
Un jour qu’elle avait promis de passer une partie de la journée à l’institution, elle vint accompagnée d’un ravissant petit chien ; un amour de griffon.
Toutes les jeunes filles de le prendre dans leurs bras, de le caresser.
— Qu’il est donc charmant, qu’il est drôle, disaient les innocentes : il cherche à se fourrer sous nos robes.
— Ah, mesdemoiselles, vous ne pourrez jamais savoir comme il est caressant. Il couche sur mon lit : eh bien, lorsque trois heures du matin sonnent à la pendule, il vient régulièrement se mettre dans mes draps, puis il fait le mort pour qu’on ne le chasse pas… mais c’est assez nous occuper de lui ! Allons dans le préau.
Quelques heures après le beau sculpteur vint reprendre Bertha.
Le petit chien, en le voyant, saute des bras de la jeune fille qui le tenait et vient se frotter le long de ses jambes.
— Tout beau, Phanor, dit l’artiste… n’avons-nous pas assez de la nuit pour nous caresser !
La princesse se mit à rire… mais la directrice de l’établissement ne riait pas.