Mélanges historiques/06/17

XVII

LES TROUPES ALLEMANDES. — DESCRIPTION DES FORGES. — FÊTES AUX FORGES ET EN VILLE. — LATERRIÈRE DIRECTEUR. — DUMAS PREND L’ADMINISTRATION. — 1777-78.

La principauté de Hesse-Hambourg, sur le Rhin, fournit une bonne part des troupes engagées par l’Angleterre, en 1775, et placées sous les ordres du général baron de Riedesel qui était de ce pays-là.

En octobre 1776 Riedesel prenait des mesures pour assurer ses quartiers d’hiver aux Trois-Rivières, à la Pointe-du-Lac, au Cap-de-la-Madeleine et au sud du fleuve. Deux escadrons de dragons et trois compagnies du régiment de Riedesel demeurèrent dans la ville. Le régiment du prince Frédéric, commandé par le lieutenant-colonel Prétorius, passa l’hiver à Yamachiche et à la Rivière-du-Loup. Le bon comportement de ces troupes leur valut des éloges et des compliments de toutes parts.

Le 20 janvier 1777, jour de la naissance de la reine d’Angleterre, le général Riedesel donna un dîner de quarante couverts, à midi, et le soir il y eut bal suivi d’un souper. Les officiers des postes environnants assistaient à cette fête. La ville était en l’air ; on disait partout que semblable régalade ne s’était jamais vue dans la localité. Laterrière en fait mention : « Le général Ridzel voulut me connaître et m’invita à un bal qu’il donna et où j’allai. Dîner, et après, le soir venu, danses et bal. Ce bal était formé des dames et messieurs de la ville, des officiers de l’état-major, et de M. et Madame de Ridzel à la tête, sur la plus haute étiquette »[1].

Le gouverneur Carleton était aux Trois-Rivières le 8 mars 1777. Le général Burgoyne, arrivant d’Angleterre, dîna, le 15 mai, avec Riedesel, qui se mit en marche le 5 juin à la suite de son contingent et, vers le 12 du même mois, de nouvelles troupes d’Allemagne et d’Angleterre survinrent à leur tour, se dirigeant, comme les premières, vers Albany. Madame de Riedesel, arrivée aux Trois-Rivières après le 5 juin, alla rencontrer son mari sur la rivière Richelieu, puis retourna aux Trois-Rivières. Elle repartit au commencement d’août 1777, arriva au fort Edward le 14 et y trouva son mari. Elle amenait ses trois jeunes enfants. Le 17 octobre, Burgoyne s’étant rendu avec son armée, la famille Riedesel fut envoyée en Virginie et y resta jusqu’à l’automne de 1780, sinon plus tard, car elle ne rentra à Québec qu’au mois de septembre 1781. Madame de Riedesel a laissé des écrits fort appréciés[2].

Voyons encore ce que dit Laterrière : « Les Forges sont à trois lieues (par le Saint-Maurice) des Trois-Rivières. C’est un fief de quatre lieues carrées, situé le long de la rivière Noire et appelé Saint-Maurice. Le pays est plat ; le terrain, un sol jaune et sablonneux, est plein de savanes et de brûlés, où se trouve la mine par veines, que l’on appelle mine en grains ou en galets, de couleur bleue. Quoique le minerai contienne du soufre et des matières terreuses, il rend en général trente-trois pour cent de pur et excellent fer. On ne chauffe les fourneaux et les affineries qu’avec du charbon de bois qu’il faut choisir ; pour les fourneaux, on ne fait usage que du charbon de bois dur et franc ; pour les affineries, que de charbon de bois mou, comme la pruche, le tremble, etc. Une telle exploitation nécessitait l’emploi de quatre cents à huit cents personnes, tant dans les ateliers que dans les bois, les carrières, les mines, et pour les charrois : six hommes attachés aux fourneaux, deux argueurs de charbon, un fondeur, huit mouleurs et autant de servants, six hommes à chaque chaufferie, deux argueurs, quatre charrons, quatre menuisiers, seize journaliers, huit bateliers, quatre chercheurs de mine, quarante charretiers, et les autres employés aux ventes, charbon, dressage, ou comme mineurs, charbonniers, faiseurs de chemins, garde-feux, huit au moulin à scier, etc. Pour le soutien de tout ce monde, on possédait un magasin de marchandises et de provisions[3].

« Le directeur avait la vue sur tout, l’inspecteur pareillement. Celui-ci était obligé de passer, de demi-heure en demi-heure, à tous les chantiers, pour voir si tout y était dans l’ordre, et ordonner ce qui était nécessaire. Les remarques qu’il faisait étaient « journalisées » au jour et à la minute, et le teneur de livres les enregistrait dans chacun des comptes qui étaient réglés tous les mois.

« Le fourneau produisait un profit de 50 louis par jour ; chaque chaufferie cinquante louis par semaine ; la moulerie cinquante louis par coulage — en somme de dix à quinze mille louis par campagne de sept mois. Les frais en emportaient les deux tiers. C’était donc le tiers net que les intéressés avaient annuellement à partager. Ce fut l’appât d’un tel gain qui m’attira à reprendre de nouveau une part dans cette exploitation, au préjudice de mon île, jusqu’en 1779, que ne pouvant pas aller conduire les travaux moi-même, tout y périclita et mes espérances furent perdues. »

Ici, nous remarquons de nouveau la confusion des dates et des faits qui se produit souvent dans le récit de Laterrière. Il quitta les Forges en août 1778 et s’établit à Bécancour durant le mois d’octobre suivant. Son texte donne à entendre qu’il s’occupait des Forges même après s’être fixé sur l’île de Bécancour jusqu’en 1779, mais ceci va être expliqué en son temps.

« L’endroit (les Forges) est certainement des plus agréables, continue Laterrière. On y voyait environ cent trente maisons bien nettes, bien logeables aux ouvriers, de bons et beaux jardins et prairies, et une belle et spacieuse maison. »

En 1850, j’ai vu les Forges ainsi. Un endroit des plus sauvages du Saint-Maurice embelli par cette petite ville industrielle, aux demeures brillantes de propreté, posant leurs façades dans toutes les directions, isolées les unes des autres par des jardins potagers, des parterres, des lits de fleurs, des chemins et sentiers battus, bien aplanis, des édifices de tous genres, comme hangars, bureaux, écuries, hauts-fourneaux et la belle, imposante maison de pierre, spacieuse, placée au bord du précipice au fond duquel coule le Saint-Maurice qui forme un « rapide » superbe un peu plus bas. Traversant le village pour descendre en cascades à la rivière, on admire le gros ruisseau d’eau claire qui sert à laver la mine en passant. Ses ondes rapides m’ont souvent invité à boire et j’y ai trouvé ce goût de fer qui donne au sang des gens des Forges la vigueur, la santé, ce feu et ce dégourdi que ne possèdent pas généralement les populations de travailleurs. La démarche, la gaîeté, la prestance des femmes et des hommes de ce petit groupe de familles, l’élasticité de leurs mouvements, tout cela vient du ruisseau des Forges, de l’air de la forêt, de l’élévation des terrains.

Revenons au texte de Laterrière : « J’étais si content de moi-même, voyant que tout me riait, que je donnai plusieurs bals et dîners au général Ridzel, en garnison alors aux Trois-Rivières, avec son état-major et les respectables citoyens de cet endroit et du voisinage, ainsi qu’à un officier français appelé le comte Saint-Aulaire, en garnison à Bécancour et au service britannique, homme d’une rare éducation sociale et du plus aimable caractère.

« Les bals, les danses dans la cour de l’établissement, nous amusaient beaucoup. Les gens étaient bons et ma qualité de médecin me faisait du bien sous le triple rapport physique, moral et politique. J’y étais donc très heureux, par toutes sortes de causes. Si ce bonheur eût duré, j’avais trouvé là le lieu des délices !

« Les étrangers y venaient de tous les pays par curiosité. Les habitants de la ville des Trois-Rivières et des différentes paroisses du voisinage en faisaient autant — c’était joie et fête pour eux. Il était de règle qu’aucun des ouvriers ne retirât personne chez lui sans venir au bureau en avertir et demander la permission ; si bien qu’il n’arrivait jamais rien d’indécent ni d’accident sans que nous en eussions connaissance. Nous étions informés même de leurs bals, de leurs danses, de leurs festins. Cette petite peuplade vivait ainsi heureuse aux Forges.

« C’est dans ce dédale de devoirs et d’intérêts divers, d’agréments et de fatigues, que je passai cinq ans : deux comme inspecteur et, après la guerre américaine, trois comme directeur, jusqu’à la vente des Forges à M. Gugy. »

Encore des erreurs. Laterrière était arrivé aux Forges le 1er  mars 1775 comme inspecteur. Il devint directeur en juin 1776 et abandonna le tout le 6 août 1778 ; cela ne donne pas cinq ans mais quarante et un mois. Si même, comme il le prétend, il s’occupa encore des Forges durant les mois d’août, septembre et octobre 1778, nous ne dépassons pas quarante-quatre mois, au lieu de soixante mois ou cinq ans. Notons aussi qu’il place sa période de directeur « après la guerre américaine », ce qui ne veut pas dire après 1784, mais simplement après le départ des Américains des Trois-Rivières en juin 1776.

Laterrière dit que, en 1778, à la forge basse, il y avait deux marteleurs anglais qui étaient frères et dont la veuve Montour faisait le ménage.

« À part les inquiétudes de la guerre américaine, je sentais croître mes espérances. Quoique notre associé Pélissier eut emporté tout son or et son argent et un compte des avances faites à l’armée du Congrès, se montant à deux mille louis ; qu’il n’eût laissé qu’environ six mille barriques de minerai, fort peu de fers dans les différents magasins, presque point de ressources pour en faire, ni d’autres moyens, parce qu’il croyait tout perdu — je mis toutes mes facultés dehors et mes amis à l’épreuve pour la campagne qui allait suivre. Je doublai les préparatifs partout et remplis les magasins de provisions et marchandises pour m’encourager à employer le plus de monde possible, car pas de bras pas d’espérances. D’ailleurs, comme je voulais prouver à la compagnie que je méritais sa confiance, je mis en œuvre tous mes talents, et j’eus le bonheur de faire une brillante et profitable campagne, que l’on cite encore tous les ans sous le nom de Première campagne de Laterrière. Dans le cours de l’hiver suivant, je payai mes dettes. Le coffre-fort contenait des moyens suffisants pour pousser vigoureusement les travaux…

« Ainsi dans les danses et la joie s’acheva l’hiver, sans que j’eusse oublié les grands préparatifs d’une campagne dont j’ai déjà dit qu’il en fut parlé. Le feu fut mis en avril au fourneau, et tout l’atelier se trouva occupé, tant dans les bois qu’à l’établissement et aux environs. Dès lors, je ne pensai plus à autre chose. Au printemps de 1778 nous nous occupâmes à faire marcher les travaux de l’atelier avec une activité inaccoutumée pour la dernière campagne de la société. Le succès fut complet. Il était bien triste d’être obligé de vendre l’établissement lorsque les choses allaient si bien, mais telles sont les destinées des hommes. Ma position ne me permettait pas d’acheter les Forges moi-même. »

Le mot « vente des Forges » n’exprime pas du tout la chose dont parle Laterrière. Il y eut un arrangement pour continuer le bail entre les mains des mêmes associés qu’auparavant.

Vers le printemps de 1778, remarque Laterrière, par la voie d’Angleterre, « Pélissier envoya une procuration pour vendre les Forges et en remettre le produit de ce qui lui appartenait à M. Peras, son ami, à Québec. » Il ne s’agissait nullement de vendre, mais seulement de régler les comptes. Laterrière persiste à dire que les Forges furent vendues alors que tout resta sous l’effet du bail de 1767 qui avait encore à courir jusqu’en 1783 et avec les mêmes associés. Ce qui ajoute au malentendu, c’est que notre homme dit : « En conséquence et suivant ses ordres, tout fut vendu à M. Gugy et le produit de la vente remis honnêtement à M. Peras. » La vérité est que le bail de 1767 fut continué intégralement et lorsqu’il expira, en 1783, Pélissier n’avait plus d’ordre à donner. Alors, le gouvernement, reprenant possession, loua (pas de vente) à Gugy. Disons de plus que si l’on remit à Peras une certaine somme d’argent pour Pélissier, ce ne pouvait être qu’une part dans les bénéfices des associés et non pas le produit de la vente des Forges.

Suivons Laterrière plus loin : « Malgré la vente des Forges et quoique son bon ami Peras lui eut envoyé à Lyon ses fonds restés en Canada et ses deux enfants (du premier mariage), Pélissier ne manqua pas de revenir à la paix au Canada, sous la protection du général Haldimand et de me demander une révision de compte. »

Entendons-nous. Tout ceci est embrouillé. Il est évident que Pélissier avait demandé, vers le printemps de 1778, de régler ses affaires avec les Forges ; que Laterrière rendit ses comptes à Peras pour ce qui concernait Pélissier, mais que Pélissier, au reçu de l’argent, ne se trouva pas satisfait en ce qui concernait l’état de sa société et qu’il demanda la permission d’aller au Canada prendre connaissance de toute l’affaire. Or, ce n’était pas « à la paix », qui ne fut faite que longtemps plus tard, mais l’été de 1778 où le Canada était de nouveau en paix par suite de la retraite des Américains.

Compliquant toujours la situation, Laterrière ajoute que Pélissier lui « envoya, à l’île de Bécancour, un messager pour le sommer de régler leurs comptes » et, sur ce, Laterrière partit pour Québec. Les faits sont autrement. Les comptes avaient été réglés à Québec, le 6 août 1778, en ce qui regarde les Forges et en octobre Laterrière achète l’île de Bécancour où il va de suite demeurer. Si Pélissier lui a envoyé sur l’île un messager demandant à régler leurs comptes, je sais que ce n’était pas des comptes d’argent…

Le 6 août 1778, on lit dans la Gazette de Québec un avis en date de Québec, le 27 juillet précédent, par lequel Jean-Pierre Laterrière déclare qu’il a cessé d’appartenir à la gestion des forges Saint-Maurice dont il était « géreur et administrateur ». Ses comptes étant réglés avec le sieur Christophe Pélissier, ce dernier reste en possession de tout, y compris la charge de faire face aux obligations contractées au temps de la société.

Voilà qui est clair. Cet avis public dit que Laterrière n’est plus rien dans les Forges. Quant à Pélissier, il reste, comme avant le mois de juin 1776, à la tête de la compagnie des Forges.

J’ai raison de croire que Pélissier repartit vers l’automne de 1778. Il n’est jamais revenu. De concert, sans doute, avec les autres associés, il confia à Alexandre Dumas la direction des Forges et c’est ce dont parle Laterrière en ces termes : « Lorsque ces affaires furent terminées (et M. Dumas prit immédiatement possession) mes remises faites et mes comptes rendus à chaque intéressé, j’achetai cet île de Bécancour dont j’ai parlé. »

C’est son ami Saint-Martin qui négocia la vente de l’île à Laterrière au prix de mille piastres. Je comprends que l’île appartenait à Saint-Martin et à sa sœur, comme formant partie du fief Bécancour. Nous avons vu ce Saint-Martin aux Forges[4].

Si Dumas, voulant se mettre au courant de la gestion des Forges, a utilisé les services de Laterrière durant les mois d’août-octobre, rien d’étonnant à cela. Laterrière écrit que, au mois d’octobre, il rendit ses comptes à Dumas et aussitôt acheta l’île de Bécancour. Il ajoute : « Vers la fin d’octobre tout fut conclu et exécuté en faveur de M. Alexandre Dumas pour jusqu’à la fin du bail avec le roi. » Ce bail c’est celui de 1767 qui devait expirer en 1783.

Ainsi, arrivant sur l’île en octobre, Laterrière terminait ses affaires avec Dumas pour la période des dix ou douze dernières semaines comme il avait alors réglé ses comptes avec Pélissier le 27 juillet précédent. Si, en octobre, Pélissier lui a encore demandé un règlement de comptes, je persiste à dire que, au moment de retourner en France pour toujours, il voulait se faire rendre autre chose que de l’argent.

Dumas s’était montré grand ami de Laterrière depuis l’arrivée de celui-ci en Canada et ce qui suit s’explique parfaitement surtout si l’on songe que Laterrière avait fort bien dirigé les Forges de 1776 à 1778 :

« M. Dumas, ne pouvant tirer aucun parti avantageux de sa nouvelle ferme (sa nouvelle position, car la ferme datait de 1767) parce qu’il connaissait fort peu cet état, ne me laissa plus de paix qu’il ne m’eût cédé la moitié des Forges. Je n’hésitai pas à accepter ses offres, sous la condition que j’irais au printemps de 1779 prendre la conduite de tous les travaux. L’acte passé, il ne s’agissait plus que de trouver les deux mille louis nécessaires pour ma part. La vente des produits de ma culture, foin, paille, blé, avoine, et de mes animaux m’en procura une bonne partie. Je vendis mon île et, par là, je formai la somme. Je fis cet achat (des parts de la société des Forges) en janvier et je devais, à l’ouverture de la navigation, en mai, me rendre aux Forges pour en prendre possession aux conditions de notre acte, mais mon emprisonnement en décida autrement. »

Visiblement, Laterrière serait devenu associé de la compagnie des Forges en achetant les parts de quelqu’un des membres. Ce n’est pas Dumas qui lui vendait comme il le dit, la moitié des Forges. Une observation à faire : comment l’île de Bécancour, occupée en octobre, rendait-elle en janvier une récolte de foin, paille, blé, avoine et autres produits, pour former à la vente une aussi forte somme que celle ici mentionnée ? Il faudrait croire que Laterrière avait pris possession de l’île dès le printemps de 1778 mais n’était allé y demeurer qu’en octobre. Dans tout ceci nous ne pouvons faire que des conjectures.

Parlons de l’emprisonnement, d’après Laterrière d’abord, puis nous éclaircirons son histoire : « J’ignorais les manœuvres secrètes de Pélissier auprès de son ami le général Haldimand pour me faire arrêter. La principale partie du clergé était de ce complot, avec tous ceux dont l’enragé politique favorisait les idées — me taxant, quoiqu’à faux, d’avoir trahi les intérêts du roi en faveur des Bostonnais, et on ne parlait de moi au château Saint-Louis que comme d’un traître qui avait fait faire des boulets et des pétards pour briser, disait-on, les portes de la ville de Québec, l’hiver du blocus par les Américains. »

Je ne saurais voir la main de Pélissier dans cette nouvelle affaire. Les faits parlent d’eux-mêmes. Laterrière était du nombre des Français qui s’étaient montrés sympathiques à la cause des Américains et en 1779 ces étrangers redevenaient incommodes. La guerre durait encore. Haldimand décida de coffrer ces gens inquiétants. Il en avait le plein droit. Laterrière avait recueilli chez lui un soldat déserteur. Un autre homme se joignit au premier. Tous deux, se voyant en danger d’être découverts, voulurent gagner le Maine, mais on les arrêta et bientôt après Laterrière fut envoyé aux prisons de Québec, d’où il ne sortit qu’en 1782[5].

Laterrière vécut après cela comme médecin et il se distingua dans cette profession qui le mit en voie d’acheter la seigneurie des Éboulements où il termina ses jours et où demeure encore sa descendance. Son fils Pierre, chirurgien renommé, publia, à Londres, en 1830, A Political and Historical Account of Lower Canada, un bon ouvrage qui eut son influence. Il mourut en 1834. Marc-Pascal, l’autre fils, aussi chirurgien, fut député de 1824 à 1832 et de 1845 à 1854 ; membre du Conseil législatif du 5 janvier 1832 au 27 mars 1838 ; du conseil spécial du 2 avril 1838 au 1er  juin suivant ; du Conseil législatif du 11 novembre 1856 au 25 octobre 1864 et décéda aux Éboulements le 30 mars 1872. De son mariage avec Eulalie Dénéchaud sont nés Laure qui épousa Frédéric Braun, Canadien ; Virginie mariée à sir C.-A.-P. Pelletier ; Edmond marié à Corinne Juchereau-Duchesnay — et de ces derniers nous avons M. le notaire de Laterrière marié à Maria Charlebois qui élèvent un fils et une fille aux Éboulements.


  1. Laterrière doit ici faire erreur. Madame de Riedesel n’a pas rencontré son mari aux Trois-Rivières à cette date. Le 20 janvier elle devait être encore à Londres.
  2. Sur les batailles de la révolution américaine jusqu’à la défaite de Burgoyne.
  3. Les ventes sont les endroits dans la forêt où l’on fabrique le charbon.
  4. En 1790, il demeurait à la Rivière-du-Loup.
  5. Si Laterrière s’est aliéné la haine de Pélissier c’est pour une question qui ne regardait pas les Forges, mais Pélissier ne l’a pas trop inquiété par la suite. De Rouville détestait aussi Laterrièqe parce que celui-ci avait mis hors des Forges son fils Voligny qui était contremaître.