Lettres à la princesse/Lettre093

Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 122-124).

XCIII


Ce mercredi 7 décembre.
Princesse,

Voici le jour et presque l’heure où je vais chaque semaine prendre cette douce récréation que vous m’avez réservée avec une si indulgente amitié : il me manque quelque chose et je vous le dis. Il me semble que vous êtes très-loin et qu’il y a très-longtemps de cela : Les communications sont comme rompues ; elles ne reprendront qu’avec un sentiment plus vif, de ma part, et avec un bonheur de les retrouver. Je vis, en attendant, dans de graves sujets. Nous avons eu un Magny[1] réduit à cinq ou six têtes : cela n’en valait pas moins ; Eudore, les Goncourt, les Gautier en étaient. Vous ne vous faites pas d’idée, Princesse, comme le lien que votre grâce si attentive a daigné établir entre tous existe et comme on le cherche involontairement, — comme il fait défaut, — les semaines où il est suspendu.

Vous avez reçu, je le sais, de Duveyrier la brochure[2] avec une lettre dont il m’a dit la teneur. Les intentions de ce côté sont parfaitement loyales et pures de toute arrière-pensée ; ces esprits sont sérieusement et tout entiers à la chose qu’ils proposent. C’est ce que vous aurez pu sentir à travers même les parties que vous n’auriez pas agréées.

Je désire que les journées que vous passez loin de nous, Princesse, vous semblent courtes, agréables et amusées autant qu’à ceux qui les passent auprès de vous, — autant qu’elles le sont peu à ceux à qui vous manquez.

Agréez, Princesse, l’assurance de mon respectueux dévouement et attachement.


  1. Le fameux dîner de quinzaine, auquel nous avons consacré une note dans les Souvenirs et Indiscrétions (page 149).
  2. L’Avenir et les Bonaparte.