Les tendres épigrammes de Cydno la Lesbienne/11

(pseudonyme)
Traduction par Ibykos de Rhodes (pseudonyme).
Bibliothèque des curieux (p. 49-51).


XI

L’HERMAPHRODITE


Est-ce Adonis qui dort là, tout en haut de la colline, sous le vieux cèdre, parmi les hyacinthes noires, les anémones écarlates et les blanches étoiles de Bethléem ?

Quel joli garçon ! Il a l’air d’une fille. Ses bras nus et vagabonds au gré du rêve montrent des aisselles bien épilées.

Un caprice m’étend, sur le coude, à côté du charmant intrus. Mon autre main se joue en des recherches.

Ô surprise ! C’est Hermaphrodite lui-même !

Je n’hésite plus. J’insinue ma langue dans sa bouche entr’ouverte et je lui fais, d’un doigt frétillant, ce que je viens de rendre à Chloé.

On se réveille gentiment, à l’instant du plaisir, et on me rend mon plaisir, mais on s’étonne de ma préférence : les camarades, eux, s’amusent toujours avec la partie virile.

Hermaphrodite s’est rendormi. J’ai effeuillé une rose dans ses cheveux flottants.

Mais voici Platon, le plus bel adolescent de Mytilène, qui monte le sentier.

Je suis curieuse de voir ce qui va se passer. Vite, je me cache derrière un buisson de laurier-rose.

Platon comprend l’attrait de la grâce féminine : j’assiste, heureuse, à un viol magnifique.

Hermaphrodite ne peut crier : une main lui ferme la bouche. Mais il pleure, et ses larmes dilatent encore la volupté du blond satyre.

L’aventure est drôle. Mais je plains celle qui partagera ma couche cette nuit. Car l’exemple est contagieux : la croupe de la pauvrette subira l’olisbos infernal du père Aristophane.