Les principaux monuments funéraires/Lanneau

DE LANNEAU.




De Lanneau (Pierre-Antoine-Victor de Marcy), fondateur et ancien chef de l’institution de Sainte-Barbe, docteur de la Faculté des Lettres, officier de l’Académie de Paris, naquit à Bard, près Sémur (Côte-d’Or), le 24 décembre 1758. Alors, comme on sait, l’ordre de naissance réglait les vocations ; son rang avait désigné le jeune Victor pour l’état ecclésiastique : les droits de sa famille l’appelaient au canonicat de Langres.

M. de Lanneau commença ses études à La Flèche, et les acheva à l’École Militaire de Paris. Ses cours terminés, son penchant le dirigea vers l’instruction publique ; il embrassa avec amour cette carrière de son choix, et l’on reconnaîtra combien cette vocation était réelle et irrésistible, quand on verra que tant de bouleversemens et de séductions n’ont pu l’en distraire. Il entra dans l’ordre des Théatins, qui se vouaient à l’enseignement. Il devint principal du collège de Tulle, et il vivait heureux dans ces fonctions modestes quand la révolution vint déplacer toutes les existences. Il vint alors à Autun, et fut successivement maire de cette ville, agent du district et administrateur de la fonderie du Creusot. Il montra dans toutes ces fonctions autant de zèle et d’intelligence que de désintéressement, et fut élu député à l’Assemblée Législative par le département de Saône-et-Loire. Quand cette Assemblée fit place à la Convention, il se retira de la scène politique par égard pour les opinions de son père et les souvenirs de sa famille.

L’ancien collège de Sainte-Barbe avait subi la destinée des autres établissemens d’instruction publique ; les bâtimens qui le composaient, confisqués et vendus comme biens nationaux, étaient tombés entre les mains de différens acquéreurs qui spéculaient sur leur destruction, et qui déjà y portaient la hache. M. de Lanneau entreprit de les réparer et de les rendre à leur destination primitive. Héritier des murs et des souvenirs de Sainte-Barbe, il avait la noble envie d’en continuer l’histoire. Il est inutile de redire à la génération contemporaine quel éclat a jeté cette maison entre les mains de son régénérateur. Peuplée de cinq cents élèves, riche de tant de professeurs distingués, non seulement elle n’avait pas de rivale parmi les institutions de Paris, mais elle balançait les lycées mêmes en importance et en célébrité. Elle envoya des champions au lycée Napoléon, au lycée Impérial, au lycée Charlemagne ; les fastes des concours et des lycées attestent ses triomphes.

La gloire de cette maison importuna le chef de l’Empire ; il était surpris et piqué qu’un établissement particulier s’avisât de prospérer ainsi sans sa tutelle. Vers la fin de son gouvernement, il songeait à fonder deux nouveaux lycées. Il en vit un tout organisé dans l’institution de Sainte-Barbe, et il manifesta au préfet de la Seine l’intention de l’ériger en lycée. M. de Lanneau était sur le point de céder à la volonté du maître lorsque la chute du régime impérial survint, et ces projets n’eurent point de suite.

La restauration ramena des souvenirs et des haines. M. de Lanneau était marié, et ses brillans services ne pouvaient l’absoudre aux yeux de ses ennemis. Alors commença une série de persécutions contre cet homme honorable, triste récompense de tant de travaux et de dévouement. Inquiété dans la possession de son établissement, il fut au moins heureux d’en confier la direction à M. Mouzard, son gendre. Lorsque la mort le lui eut enlevé, il appela M. Adam à remplir les mêmes fonctions. Enfin, en 1819, le diplôme fut conféré à son fils, M. Adolphe de Lanneau, et son cœur paternel se reposa quand il vit son héritage entre les mains de son successeur naturel. Mais on lui préparait d’autres chagrins : le titre de ce collège qu’il a tiré de ses ruines, et dont il a ressuscité la gloire, lui a été disputé et ravi ; mais son établissement, toujours florissant, a constamment conservé le nom de sa patronne. Tant de tracasseries, et surtout l’intempérie du dernier automne, avait commencé d’altérer sa santé ; des douleurs rhumatismales ne l’abandonnèrent pas le reste de l’année. Au mois de février suivant, sa maladie prit un caractère plus grave, et il entra dans ce lit de douleur d’où il ne devait plus se relever.

Il est décédé le 31 mars 1830, et a été inhumé au cimetière du Père Lachaise. Son monument, qui est tout en marbre blanc, se compose d’un cénotaphe, élevé sur un stylobate. Dans une niche circulaire est placé son buste, avec cette inscription au-dessous :

petr.-ant.-vict.
DE LANNEAV.
discipvli memores.

Plus bas, on lit :

pierre-antoine-victor
DE LANNEAU,
fondateur du college de sainte-barbe,
en l’année m. dcc. lxxxxviii.
né a bard (cote-d’or), le 24 décembre 1758,
mort a paris le 31 mars 1830.

Ce monument a été construit sur le dessin de M. Haudebourt, architecte, ancien élève de Sainte-Barbe. Le buste est de M. Raggi, et la marbrerie de M. Novion.