Les gouttelettesLibrairie Beauchemin (p. 177).


COUCHER DE SOLEIL


Le ciel semble, au ponant, un océan vermeil.
Les pins bercent les nids et chantent à voix basse.
Le soleil ne luit plus ; sur l’eau la rame est lasse.
Le travail reprendra son grand hymne au réveil.

Moi je sais cependant un coucher de soleil
Dont les fauves clartés ne rosent point l’espace.
Il ne rayonne pas au ciel. Rien ne surpasse
Sa navrante tiédeur. Nul n’en sait un pareil.

Il est comme un foyer qu’aucun souffle n’embrase.
Il tire sans pitié l’âme de son extase,
Et l’ombre qui le suit fait craindre son retour.

Ce coucher que je hais jusques à la démence,
Ce coucher noir, c’est l’œil qui se ferme à l’amour
Et refuse une étoile à la nuit qui commence.