George E. Desbarats, éditeur (p. 71-72).


LE CŒUR ET LA VOLONTÉ.


À Mademoiselle D. D.

Conseils à une jeune personne sur le choix d’un mari.

Un mari parfait est une chimère,
Ne le cherchez pas, ce serait en vain.
Vous vous réservez mainte peine amère
En rêvant un Ange, être surhumain.
La perfection n’est pas de ce monde,
Tous ont des défauts ; (triste vérité !)
Tout tourne ici-bas, car la terre est ronde,
Tout tourne : le cœur et la « volonté. »

Il est cependant un moyen facile
Qui devrait toujours guider notre choix ;
Je vous le soumets, et, sans être habile,
Je le tiens pour bon, fermement j’y crois
Le cœur est léger, inconstant, volage,
Par tous les zéphyrs il est emporté,
Mais le plus gros vent, le plus fort orage
N’entraînent jamais une « volonté. »


La « volonté » ferme assure en ménage
L’ordre, le repos, la paix, le bonheur,
Le succès partout ; c’est le meilleur gage
Qu’on puisse donner en offrant son cœur.
Ne me parlez pas de ce caractère
Qu’un méchant ami bien vite a gâté ;
C’est peut-être un cœur dévoué, sincère,…
Il lui manque, hélas ! une « volonté. »

La « volonté » c’est le rocher solide
Qui brave l’effort des vents en courroux ;
Qui rit des cancans du monde perfide
Et du destin même affronte les coups.
Il est fort joli d’avoir le cœur tendre,
L’œil vif… en un mot d’être bien tourné
Mais d’un bon époux on a droit d’attendre
Avec un bon cœur une « volonté. »