Les Quatre livres/Entretiens de Confucius/04

(attribué à)
Traduction par Séraphin Couvreur.
Imprimerie de la mission catholique (p. 101-106).
ENTRETIENS DE CONFUCIUS


CHAPITRE IV. LI JENN.


1. Le Maître dit : « Un bon voisinage est celui où règne la probité. Pourrait on appeler sage un homme qui, ayant à choisir un lieu pour sa demeure, ne voudrait pas avoir des voisins honnêtes ? »

2. Le Maître dit : « Un homme qui n’est pas vertueux ne peut demeurer longtemps dans l’indigence ou dans l’opulence (sans devenir plus mauvais). Un homme vertueux trouve son bonheur dans la vertu ; un homme sage n’ambitionne que le trésor de la vertu. »

3. Le Maître dit : « Seul l’homme vertueux sait aimer et haïr les hommes comme il convient. »

4. Le Maître dit : « Celui qui s’applique sérieusement à cultiver la vertu s’abstient de mal faire. »

5. Le Maître dit : « Les richesses et les honneurs sont très ambitionnés des hommes ; si vous ne pouvez les obtenir par des voies honnêtes, ne les acceptez pas. La pauvreté et l’abjection sont en horreur aux hommes ; si elles vous viennent, même sans aucune faute de votre part, ne les fuyez pas. Si l’homme sage abandonne la voie de la vertu, comment soutiendra-t-il son titre de sage ? L’homme sage ne l’abandonne jamais, pas même le temps d’un repas. Il y demeure toujours, même au milieu des affaires les plus pressantes, même au milieu des plus grands troubles. »

6. Le Maître dit : « Je n’ai pas encore vu, un homme qui aimât vraiment la vertu et haït sincèrement le vice. Celui qui aime vraiment la vertu la préfère à toute autre chose ; celui qui hait sincèrement le vice cultive la vertu, et fuit toute atteinte du mal. Est il un homme qui travaille de toutes ses forces à pratiquer la vertu un jour entier ? Je n’ai jamais vu aucun homme qui n’eût pas assez de forces pour être vertueux. Peut être en existe-t-il ; mais je n’en ai jamais vu. » Tout homme, s’il fait des efforts sérieux, peut atteindre la perfection.

7. Le Maître dit : « Chaque classe d’hommes tombe dans un excès qui lui est particulier. On peut connaître la vertu d’un homme en observant ses défauts. » L’homme vertueux excède toujours en libéralité, et l’homme vulgaire, en parcimonie ; l’homme vertueux, en bienfaisance, et l’homme vulgaire, en dureté de cœur. En voyant les défauts d’un homme, on peut connaître s’il est vertueux ou non.

8. Le Maître dit : « Celui qui le matin a compris les enseignements de la sagesse, le soir peut mourir content. »

9. Le Maître dit : « Un homme qui se livre à l’étude de la sagesse, s’il rougit d’un vêtement grossier et d’une nourriture ordinaire, ne mérite pas de recevoir mes enseignements. »

10. Le Maître dit : « Dans le gouvernement de l’empire, le sage ne veut ni ne rejette rien avec opiniâtreté. La justice est sa règle. »

11. Le Maître dit : « L’homme sage aspire à la perfection, et l’homme vulgaire, au bien être ; l’homme sage s’attache à observer les lois, et l’homme vulgaire, à s’attirer des faveurs. »

12. Le Maître dit : « Celui qui dans ses entreprises cherche uniquement son intérêt propre excite beaucoup de mécontentements. (parce qu’il nuit aux intérêts de plusieurs). »

13. Le Maître dit : « Celui qui, dans le gouvernement de l’État, montre cette déférence qui fait le fondement de l’urbanité, quelle difficulté rencontrera-t-il ? Celui qui dans le gouvernement n’a pas la déférence requise par l’urbanité, quelle urbanité peut il avoir ? » (il peut encore moins gouverner l’État).

14. Le Maître dit : « Ne soyez pas en peine de ce que vous n’ayez pas de charge ; mettez vous en peine de vous rendre digne d’être élevé à une charge. Ne soyez pas en peine de ce que personne ne vous connaît ; travaillez à vous rendre digne d’être connu. »

15. Le Maître dit : « Chenn (Tseng tzeu), ma doctrine se réduit à une seule chose qui embrasse tout. » Tseng tzeu répondit : « Certainement. » Lorsque le Maître se fut retiré, ses disciples demandèrent ce qu’il avait voulu dire. Tseng tzeu répondit : « Toute la sagesse de notre maître consiste à se perfectionner soi-même et à aimer les autres comme soi-même. »

16. Le Maître dit : « Le disciple de la sagesse est très intelligent en ce qui concerne le devoir, et l’homme vulgaire, en ce qui concerne l’intérêt propre. »

17. Le Maître dit : « Quand vous voyez un homme sage, pensez à l’égaler en vertu. Quand vous voyez un homme dépourvu de vertu, examinez vous vous même, (de peur de lui ressembler). »

18. Le Maître dit : « Si vos parents tombent dans une faute, avertissez les avec grande douceur. Si vous les voyez déterminés à ne pas suivre vos avis, redoublez vos témoignages de respect, et réitérez vos remontrances. Quand même ils vous maltraiteraient, n’en ayez aucun ressentiment. »

19. Le Maître dit : « Durant la vie de vos parents, n’allez pas voyager au loin. Si vous voyagez, que ce soit dans une direction déterminée. (afin qu’ils sachent où vous êtes). »

20. Le Maître dit : « Vous devez vous rappeler souvent l’âge de vos parents, vous réjouir de leur longévité, et craindre qu’ils ne viennent à mourir. »

21. Le Maître dit : « Les anciens n’osaient pas émettre de maximes ; ils craignaient que leurs actions ne répondissent pas à leurs paroles. »

22. Le Maître dit : « On s’égare rarement en s’imposant à soi-même des règles sévères. »

23. Le Maître dit : « Le sage s’applique à être lent dans ses discours et diligent dans ses actions. »

24. Le Maître dit : « La vertu ne va jamais seule ; un homme vertueux attire toujours des imitateurs. »

25. Tzeu iou dit : « Celui qui par des avis réitérés se rend importun à son prince tombe dans la disgrâce ; celui qui par des remontrances réitérées se rend importun à son ami perd son amitié. »