Les Pornographes sacrés/Mœchialogie, cours de luxure

Charles Unsinger (p. 77-142).
MŒCHIALOGIE
COURS DE LUXURE
TRAITÉ
DES PÉCHÉS CONTRE LES SIXIÈME ET NEUVIÈME COMMANDEMENTS
DU DÉCALOGUE
et
DE TOUTES LES QUESTIONS MATRIMONIALES
QUI S’Y RATTACHENT DIRECTEMENT OU INDIRECTEMENT
par
Trappiste
(Ce livre est exclusivement destiné au clergé)


MŒCHIALOGIE[1]
COURS DE LUXURE


RÉFLEXIONS PRÉLIMINAIRES
Sur le péché de luxure en général

On entend par luxure tout péché contraire à la chasteté : à la chasteté est opposée la luxure, qui est un appétit ou un usage désordonné des plaisirs vénériens ou, tout simplement, un appétit désordonné de la délectation vénérienne.

Tout péché de luxure ou de délectation charnelle est mortel de sa nature : il n’admet pas de légèreté de matière, du moins quand il est directement opposé à la chasteté… La raison elle-même sanctionne cette immuable vérité ; la délectation vénérienne n’a été accordée que pour la seule propagation du genre humain ; donc toute interversion de cette délectation est, de sa nature, un grave désordre et par conséquent un péché mortel.

Nous avons dit que le péché de luxure n’admet pas de légèreté en la matière. On sent assez que, sous ce rapport, il ne peut être question ici des péchés de luxure consommés. Nous ne parlons donc que de la délectation charnelle, libidineuse, qui suivant le langage des théologiens se fait sentir dans les parties vénériennes, et vient du mouvement des esprits qui servent à la génération. « C’est une opinion probable qu’il n’y a que péché véniel dans un baiser donné en vue de la délectation charnelle et sensible qui l’accompagne exclus le danger d’un consentement ultérieur et de la pollution. »

La délectation organique est celle qui, disent les docteurs, a lieu sans aucun mouvement déréglé, qui, sans aucune commotion du sens génital, vient de la seule proportion de l’objet avec le sens ou de la conformité de l’objet vu ou touché avec l’organe de la vue ou du tact.

D’où il suit, comme dit Billuart[2], que celui-là ne pèche que véniellement, qui regarde une belle femme, ou touche sa main ou son visage en vue précisément de la délectation purement organique ou sensuelle. La délectation organique peut encore avoir lieu dans un baiser donné à un bel enfant…

… De la délectation sensuelle à la vénérienne, surtout dans le sens du tact ou de la vue, il n’y a qu’un pas, dit Billuart.

D’autres théologiens, entre autres saint Liguori, prétendent, avec quelque modification pourtant, qu’il n’y a pas légèreté de matière dans la délectation sensible ou naturelle, si, par exemple, on se délecte au contact d’une main de femme, comme à celui d’une chose douce, d’une rose, d’une étoffe de soie, ou autres choses semblables… La raison en est que les attouchements d’une jeune fille ou d’un jeune homme, en tant qu’ils délectent les sens, tendent naturellement à la pollution… parce que, à cause de la corruption de la nature, il est moralement impossible d’éprouver cette délectation naturelle, sans que la délectation charnelle et vénérienne soit ressentie, surtout par les personnes aptes à la copulation, et surtout si ces actes sont accompagnés de quelque affection et complaisance…




PREMIÈRE PARTIE
DE LA LUXURE CONSOMMÉE ET NON CONSOMMÉE

La luxure est consommée lorsqu’elle va jusqu’à l’effusion du sperme ; non consommée, quand elle reste en deçà.



CHAPITRE PREMIER
De la luxure consommée

Les péchés de luxure consommée se divisent en péchés contre la nature et en péchés suivant la nature, ce qui fera la matière de deux articles.

 
ARTICLE PREMIER
Du péché de luxure contre nature

Ce péché est appelé contre nature, parce qu’il consiste dans l’effusion du sperme en dehors de tout coït propre à la génération, ou autrement, parce qu’il est opposé à la loi à laquelle la nature a destiné le sperme humain. Il est de trois espèces :

La pollution ;
La sodomie ;
La bestialité.

De là, encore trois paragraphes.

§ I
De la pollution en général

Ce que les théologiens entendent par pollution, c’est la masturbation, l’onanisme solitaire, l’incontinence secrète, les mollities, etc., c’est-à-dire l’effusion du sperme en dehors du vase — (de la partie sexuelle de la femme).

La semence humaine, ou sperme, est une humeur visqueuse, épaisse, d’une odeur sui generis assez connue.

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On divise la masturbation, l’onanisme solitaire ou la pollution :

1o En masturbation simple et qualifiée, comme disent les théologiens, ou plutôt composée puisqu’elle renferme une double malice ;

2o En masturbation volontaire ou involontaire ;

3o En masturbation volontaire directe ou en soi, et en volontaire indirecte ou volontaire dans sa cause.

La masturbation simple est celle qui n’a pas une autre malice qui s’y adjoint, comme lorsque quelqu’un, sans être attaché par aucun lien personnel, souille son corps en se complaisant dans sa propre délectation.

La masturbation est dite qualifiée, quand elle renferme une double malice de la part de l’objet pensé ou désiré, ou de la part du masturbé ou de celle du masturbant : 1o De la part de l’objet pensé, la masturbation revêt la malice de l’adultère, de l’inceste, du stupre, du sacrilège, etc., selon que le masturbant pense à une femme mariée, à une parente, à une vierge, ou à une personne consacrée à Dieu, etc… 2o De la part du masturbé ou du masturbant, si par exemple il est marié ou consacré à Dieu par vœu ou par la réception des ordres sacrés : car il faut expliquer les conditions de la personne masturbée ou masturbante, comme ajoutant au péché des malices spécifiquement différentes. Il faut aussi de toute nécessité déclarer en confession les circonstances susdites, parce qu’elles changent l’espèce du péché et ajoutant à sa malice…

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Section première
L’onanisme solitaire. — La masturbation volontaire en soi ou directement voulue

C’est un péché mortel, de sa nature et contre la nature. L’action d’Onan qui répandait son sperme à terre est déclarée détestable dans la Sainte-Écriture.

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Il est une espèce de souillure manuelle qu’on pourrait appeler incomplète, nerveuse, sèche, en tout point semblable, pour la forme extérieure, si l’on peut parler ainsi, à la masturbation proprement dite, mais avec cette différence qu’elle ne va pas jusqu’à l’éjaculation.

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Section deuxième
De la pollution volontaire dans sa cause ou indirectement voulue

Cette sorte de pollution reconnaît deux causes ; l’une prochaine et l’autre éloignée.

La cause prochaine est celle qui, par sa nature, porte directement à la masturbation, comme par exemple, de regarder ses propres organes génitaux ou ceux des autres, de proférer des paroles obscènes, de se complaire dans des pensées honteuses, etc…

La cause éloignée n’est pas de nature à produire directement la masturbation, elle ne l’occasionne que par accident et contre l’intention des personnes. Ces sortes de causes sont ordinairement un excès dans le boire et le manger, l’équitation, l’étude de matières érotiques, l’audition des confessions, etc.

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Il est cependant permis d’étudier les matières vénériennes en vue de l’enseignement ou de la distraction, d’entendre les confessions des femmes, de converser avec elles utilement, honnêtement et sagement, de les visiter avec gravité et décence, et pour des motifs d’une urgente convenance, ou même de les embrasser dans le monde selon les mœurs du pays, d’aller à cheval pour son utilité, de se coucher d’une certaine manière quand on ne peut pas dormir autrement, d’user modérément de la boisson ou d’aliments chauds, ou prescrits pour la santé, ou d’un usage habituel, de servir les malades, de les mettre dans le bain, d’exercer la profession de chirurgien ou de sage-femme, etc…, quand même on pourrait prévoir que la pollution doit s’en suivre, pourvu qu’on ne se la propose pas, et qu’on ait le ferme propos de n’y pas consentir, avec l’espérance fondée de persévérer dans cette résolution ; ce qui se reconnaît dans l’espèce par les expériences déjà faites, soit au défaut de la crainte du péché, soit à la fragilité personnelle et à la propension au mal, ou à d’autres circonstances semblables.


Section troisième
De la pollution nocturne

La pollution nocturne est celle qui survient pendant le sommeil de la nuit Si le sommeil est imparfait, elle peut être semi-volontaire et par conséquent péché véniel ; si le sommeil est parfait, la pollution est tout à fait involontaire et par conséquent exempte de toute faute.

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Voici comment Billuart s’exprime à ce sujet :

« La pollution nocturne est ou n’est pas péché, selon la condition de la cause dans laquelle elle a dû ou pu être prévue. Si la cause n’est pas coupable, la pollution ne sera pas non plus coupable : si la cause est véniellement coupable, elle sera vénielle : si la cause est mortelle, elle sera mortelle. » (Dissertatio IV, art. 13.)

Maintenant, quelle est la règle à suivre ou la conduite à tenir, lorsqu’une pollution préparée, imminente ou commencée pendant le sommeil, on s’éveille avant que l’éjaculation se soit produite ?…

Personne n’est tenu (pourvu cependant qu’il n’y ait pas danger de consentement au plaisir, et qu’on ne le provoque pas volontairement) d’empêcher une pollution spontanée, ou déjà commencée, dans le sommeil ; mais on peut pour cause de santé laisser la nature se soulager ; car ce n’est pas procurer, mais souffrir l’écoulement d’un liquide qui, d’ailleurs corrompu, nuirait à la santé.

Quand la pollution commence dans le sommeil, dit saint Liguori, et que rémission a lieu dans le demi-sommeil, dans ce cas, si on éprouve quelque délectation, non pleinement voulue, on ne pèche que véniellement comme le remarquent les pères de l’Église. Mais quand l’émission commence dans le sommeil, et est consommée en pleine veille, dans ce cas (pourvu qu’il n’y ait pas consentement dans la délectation, ou danger prochain de consentement d’après l’expérience du passé), on n’est pas tenu de l’empêcher ; soit parce qu’il est très difficile d’arrêter l’écoulement du sperme une fois sorti des reins, comme disent généralement de nombreux théologiens ; soit parce que personne n’est tenu d’empêcher l’éjaculation en s’exposant au danger d’une maladie provenant de la corruption du fluide.

Voici l’opinion du R. P. Sanchez :

Quand la pollution est un flux naturel et a commencé pendant le sommeil, il sera permis de ne pas l’empêcher, à cause du danger de mort, parce que ce n’est pas procurer, mais souffrir l’éjaculation du sperme, que le patient n’empêche pas, de peur que cette humeur corrompue ne nuise à sa santé.

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Voici, maintenant, l’opinion d’un théologien fort sage et fort prudent :

La pollution commencée dans le sommeil ne peut être continuée dans l’état de veille, d’après beaucoup de théologiens, contre un assez grand nombre d’autres qui disant qu’à cause des inconvénients pouvant provenir de son interruption, on peut en permettre simplement la continuation en élevant son cœur à Dieu. C’est l’avis de Gerson, de Billuart, etc…, parce que, disent-ils, outre les inconvénients et les indispositions qui en résulteraient pour le corps, la pollution commencée pendant le sommeil n’est plus soumise à la volonté. Mais cette raison n’emporte pas l’assentiment. Je ne serais de l’avis de ces théologiens que dans le cas, rare, où il y aurait danger d’en ressentir une grave indisposition, et sans danger de consentement en une matière si délicate ; peut-être d’ailleurs ne suffirait-il pas de n’y pas consentir, si en même temps on ne cherchait à l’empêcher par quelque effort, par exemple, en retenant l’éjaculation, en cherchant dans son lit un endroit frais, en sortant du lit ; de même si la pollution arrive dans l’état de veille.

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Nous terminons cette question par l’extrait suivant de Billuart :

Il est certain : 1o Qu’il y a péché mortel à jouir de la pollution nocturne, ou de la désirer pour le plaisir, parce qu’alors l’objet est mortellement mauvais, puisque la délectation vénérienne ne doit tendre de sa nature qu’à la seule génération dans l’acte conjugal.

Il est certain : 2o Que le désir efficace de la pollution, c’est-à-dire celui qui la cause, ou en vertu duquel on emploie les moyens propres à l’occasionner, est également péché mortel, parce qu’alors elle devient volontaire et ne reste pas purement naturelle.

Il est certain : 3o Qu’il est permis de jouir de l’effet bon de la pollution, comme de la santé ou de la cessation de la tentation qu’elle cause, ainsi que de désirer cet effet, parce que cet objet est bon. Pour la même raison, il est permis de se réjouir de ce que la pollution a eu lieu sans péché et purement naturellement.


Section quatrième
De la pollution diurne

La pollution (ou masturbation) diurne est celle qui a lieu pendant le jour, ou plus généralement et plus exactement dans l’état de veille.

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La distillation est une excrétion uréthrale ; une espèce de blennorrhée connue par les anciens sous le nom impropre de gonorrhea benigna (chaudepisse bénigne). La matière de la distillation est tout à fait différente du vrai sperme, et ne renferme aucun animalcule microscopique. Cette matière visqueuse est la matière que peuvent rendre les impubères et les eunuques, soit par la masturbation, soit par la stimulation mentale, au moins pour ces derniers.

Il existe une différence immense entre la distillation et la pollution.

Voici ce que, sur cette question, dit saint Liguori :

« Si cette distillation a lieu avec une notable agitation des esprits, sans doute elle est un péché mortel, parce qu’une telle agitation est un commencement de pollution. Il en est de même si la distillation s’opère en grande quantité, parce qu’une distillation aussi considérable ne peut avoir lieu sans une notable rébellion de la chair ; d’où il suit que de même qu’on pèche gravement en procurant une notable agitation, on pèche gravement aussi en procurant une grande distillation. Par conséquent, nous sommes tenus, sous une grave obligation, d’éviter non seulement directement, mais encore indirectement, ces sortes de distillation, en évitant toutes les causes qui influent prochainement sur elles… Mais si la distillation s’opère en petite quantité, sans délectation et sans agitation, alors on peut la permettre sans péché, comme dit le R. P. Cajetan, etc… et les autres communément ; parce qu’on ne doit pas plus se soucier de ce flux que de l’émission de quelque autre sécrétion dont la nature a l’habitude de se soulager. »


Section cinquième
Des mouvements déréglés

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Page 52 : — Souvent il ne convient pas de s’y opposer par un effort positif ; car alors l’imagination s’enflamme par cet effort même, et par sympathie excite encore davantage les esprits génitaux ; il est donc plus sûr d’invoquer tranquillement Dieu, la bonne Vierge, l’ange gardien, de prier son patron et les autres saints, de fuir les objets dangereux, de détourner tranquillement sa pensée des images obscènes, de la tourner ailleurs, et de s’appliquer sérieusement à d’autres occupations surtout extérieures.

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Page 53 : « Quæritur an manere… — On demande si rester indifférent à l’égard des mouvements de la concupiscence involontaires, sans les approuver ni les désapprouver, est un péché et quelle espèce de péché ?

Réponse. — 1o Tous les théologiens sont d’avis qu’une telle indifférence est au moins un péché véniel, parce que l’esprit est tenu au moins de s’opposer aux mouvements désordonnés de la concupiscence.

2o Sanchez, saint Liguori, 1. V, no 6, et beaucoup d’autres disent que ce péché, en dehors du péril prochain de la pollution, n’est que véniel ; car, disent-ils, les mouvements désordonnés doivent être réprimés, parce qu’il est à craindre qu’ils ne mènent à la pollution, ou qu’ils n’entraînent le consentement de la volonté à la délectation vénérienne ; donc si ce danger n’existe pas ou s’il est éloigné, il n’y a qu’une obligation légère de l’éviter. Mais ils soutiennent qu’il y a obligation sous peine de péché mortel de résister positivement au moins par un acte de déplaisance, s’il y a danger prochain de tomber dans une pollution, ou de consentir à la délectation vénérienne.

D’autres, plus communément, enseignent que l’indifférence avec pleine advertance touchant les mouvements désordonnés, même légers, est un péché mortel, tant à cause de leur propre désordre qu’à cause du danger d’y consentir. C’est l’avis des R. P. Valentina, Lessius, etc…


Section sixième
De la conduite à tenir envers les masturbateurs ou les onanistes

Ce chapitre de la Mœchialogie du P. Debreyne n’est, à peu de chose près, que la reproduction du § V, chap. III du Manuel des confesseurs, par Mgr Bouvier. Ayant, à sa place, cité ce paragraphe, nous y renvoyons nos lecteurs.


Section septième
De la masturbation considérée dans le sexe féminin

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La plupart des théologiens, des moralistes, des casuistes mentionnent à peine la masturbation chez la femme comme désordre possible. Une foule de traités ex professo sur le sixième commandement n’en disent pas un mot. Est-il étonnant de voir, après cela, tant de jeunes prêtres très ignorants sur cette matière ?

Nous distinguons dans les femmes trois espèces ou plutôt trois formes de masturbation :

 

1o La masturbation du clitoris ;

2o La masturbation vaginale ;

3o La masturbation utérine.

 

1o La première forme ou le clitorisme, comme on dit, est le mode ordinaire. Cette masturbation se fait surtout à l’aide du petit organe qui s’appelle le clitoris, et qui, selon les médecins, est le siège ou le principal organe de la jouissance vénérienne ou de la volupté charnelle. Il est situé à la partie supérieure et au milieu de la vulve, c’est-à-dire du pudendum. Ce petit organe, par suite d’un éréthisme fréquent et presque continuel venant de l’écoulement ou d’une disposition native, peut croître en de telles proportions, qu’il simule quelquefois le membre viril. C’est de là qu’aux temps d’ignorance, est née la fausse croyance aux hermaphrodites. C’est ainsi que des femmes perdues et de mœurs corrompues s’efforcent d’usurper quelquefois ou plutôt d’imiter le rôle exclusivement réservé à l’homme.

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On doit rattacher à la première forme de masturbation (page 67) : celle qui d’ordinaire se fait, non par un attouchement manuel, mais par un mouvement volontaire quelconque du corps, soit par son extension complète, ou seulement par celle des jambes, ou la compression des cuisses l’une sur l’autre, etc…

2o La seconde espèce ou la masturbation vaginale, moins fréquente que la précédente, indique généralement une plus grande corruption de l’imagination, parce que ce genre de masturbation se fait par l’introduction ou des doigts ou de quelques instruments adaptés, que les suggestions diaboliques ne cessent de fournir à la passion libidineuse (autrement dits : godemichés).

3o La troisième et dernière espèce ou l’utérine, beaucoup plus rare que les autres, mais très grave, très nuisible à la santé, surtout désordonnée et par conséquent la plus coupable et peccamineuse, en raison du degré de malice des circonstances plus ou moins aggravantes. Voici comment elle procède : un chatouillement ou irritation prolongée est produit au col de l’utérus (c’est-à-dire à la partie inférieure de la matrice qui se trouve à l’extrémité supérieure du vagin) à l’aide des doigts ou de certains autres instruments.

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Terminons ce chapitre par quelques mots sur la conduite du confesseur à l’égard des personnes excessivement timides ou qu’une fausse honte empêche de s’expliquer suffisamment sur cette matière.

Le confesseur doit d’abord montrer un air doux, facile et bienveillant. Il engagera les jeunes personnes à dire avec simplicité tout ce qu’elles savent sur le point en question. Il se composera convenablement afin de ne pas paraître ému ou étonné de rien, et ne pas avoir l’air d’écouter avec trop d’intérêt ou de curiosité. Le confesseur pourrait même dire qu’il a entendu là-dessus plus qu’on ne pourra lui en apprendre… Pour découvrir la mauvaise habitude, il ne faut jamais paraître en douter. N’interrogez donc pas sur le point principal ou le fond de la chose, mais sur l’accessoire ou quelqu’une de ses circonstances. Au lieu de questionner les jeunes filles sur tel péché qu’on craint qu’elles ne cachent, on doit leur faire dire combien de fois elles l’ont commis : hésitent-elles à répondre ? on leur demandera un nombre considérable, invraisemblable, au-dessus du véritable, afin de les enhardir à en avouer de suite un nombre moindre… Mais, un autre point que nous croyons important, et l’expérience l’a déjà prouvé, c’est que le confesseur ait soin de donner à certaines personnes du sexe, mariées ou non, mais grossières et plus ou moins privées d’éducation, une courte explication sur l’origine des connaissances pratiques qu’il possède sur les matières du sixième commandement. Il sera bon, par exemple, de dire qu’il a appris toutes ces choses dans les livres des médecins ou des médecins eux-mêmes, afin d’écarter de leur esprit toute idée de surprise ou de soupçon sur la manière dont lui est venue la connaissance de ces détails qu’elles s’imaginent devoir être tout à fait étrangers aux prêtres.


Section huitième
De la masturbation diurne et nocturne dans le sexe féminin

Il est permis à celui qui éprouve une grande démangeaison dans les parties honteuses, dit saint Liguori, de la faire cesser par l’attouchement, quand même il s’ensuivrait une pollution. Et, citant une foule d’auteurs à l’appui de sa thèse, il continue : « Peut-être direz-vous qu’il peut arriver que ce prurit provienne de l’ardeur même de la passion libidineuse, d’où il suivrait que l’apaisement du prurit par la friction serait une espèce de délectation vénérienne. On répond qu’il est plus raisonnable de croire qu’un tel prurit, quand il est très désagréable, vient plutôt de l’âcreté du sang que de l’ardeur de la luxure. Au moins dans le doute reste la liberté de se débarrasser de cette incommodité par un attouchement licite en soi, puisqu’on peut licitement faire cesser au moyen de l’attouchement une démangeaison corporelle ; s’il arrive une pollution, elle arrive sans danger de consentement, par accident et involontairement, et par conséquent sans péché. Pour que l’on fût tenu de s’abstenir de cet attouchement, il faudrait avoir la certitude que le prurit est un effet de la luxure. Du reste, le R. P. Lacroix avertit sagement ceux qui aiment la chasteté de s’abstenir, autant du moins qu’il est moralement possible, de ces sortes d’attouchement. » (Liv. III, no 483.)

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« Il est permis à celui qui éprouve une démangeaison très incommode, dans les parties honteuses, de la faire cesser par l’attouchement, quand même la pollution s’ensuivrait. » (Mgr Gousset, archevêque de Reims.)


§ II
De la sodomie

Ce crime horrible est défini par saint Thomas : l’accouplement du mâle avec le mâle, de la femelle avec la femelle.

D’où il faut conclure que le mâle s’accouplant avec la femelle, dans un vase ou récipient non légitime, ne commet nullement une sodomie, parce que le sexe est légitime ; au contraire, une femelle qui s’accouple avec une femelle dans le vase naturel commet une sodomie, parce que le sexe est illégitime. D’où il faut conclure avec saint Thomas que toute la malice de la sodomie vient de l’accouplement du même sexe, et non de l’accouplement illégitime de deux sexes différents, du sexe illégitime et non du vase illégitime d’un sexe légitime. Ce dernier crime, selon ce saint docteur, n’est pas une sodomie, mais seulement un mode illégitime d’accouplement.

Mais comme chez la plupart des théologiens l’usage a prévalu de regarder comme une sodomie imparfaite cet accouplement illégitime (dans l’anus) entre deux sexes différents, nous nous conformerons à l’usage.

Donc l’accouplement de l’homme avec la femme dans le vase qui n’est pas légitime est une sodomie imparfaite, distincte de la sodomie parfaite, qui est l’accouplement du mâle avec le mâle, de la femelle avec la femelle. (Ainsi, ce que les débauchés appellent 69 est beaucoup moins coupable entre homme et femme qu’entre deux individus du même sexe.)

Il n’importe pas dans quel vase ou dans quelle partie du corps mâles ou femelles s’accouplent entre eux, puisque la malice de la sodomie consiste dans la recherche d’un sexe illégitime, et qu’elle est complète ou parfaite en son genre, quel que soit le vase ou la partie du corps d’un même sexe auquel s’applique le corps par voie d’accouplement ; mais s’il n’y avait que l’application de la main, du pied, etc., aux organes d’une autre personne, cela ne serait point réputé sodomie, parce que ce ne serait pas un véritable accouplement, ni physique ou matériel, ni moral ou effectif.

Pour la sodomie imparfaite il suffit que le mâle et la femelle s’accouplent autrement qu’avec les instruments naturels ou les organes légitimes, avec interversion des parties (en faisant par derrière ce qu’on doit faire par devant), et dans la recherche d’une fin mauvaise de l’accouplement.

Il faut déclarer en confession de quelle nature a été la sodomie, si elle a été accomplie avec une personne mariée, consacrée à Dieu ou consanguine ; parce que, alors, s’y ajoute la malice de l’adultère, du sacrilège ou de l’inceste.

D’après le même saint Liguori : « Il n’est pas nécessaire en confession d’expliquer si la pollution a eu lieu dans l’intérieur ou à l’extérieur du vase ; il suffit de confesser : j’ai péché avec un enfant, pour que le confesseur juge qu’il y a eu sodomie avec pollution. On doit cependant expliquer s’il n’y a pas eu pollution. Il serait plus clair de dire : j’ai couché avec un enfant, en ajoutant la circonstance de pollution ou de non-pollution. Si l’effusion du sperme dans le vase était possible, il y aurait alors sodomie parfaite, consommée et complète ; si elle a lieu hors du vase, elle n’est qu’imparfaite et non complète, selon quelques-uns.

Quant à ce qui touche aux enfants, puisque nous en parlons, aujourd’hui ce crime horrible exerce très souvent sa fureur sur eux ; d’où on l’appelle généralement pédérastie.


§ III
De la bestialité

La bestialité, selon saint Thomas, est l’accouplement avec un individu d’une autre espèce, ou avec une bête. Ce péché est ce qu’il y a de plus horrible et il est plus grave que la sodomie, parce que dans la bestialité on n’a égard ni au vase légitime, ni au sexe, ni à l’espèce requise. Aussi Joseph a-t-il accusé ses frères du dernier des crimes, en disant, comme l’interprète la glose, qu’ils s’accouplaient avec leurs brebis. Cet abominable crime est ainsi désigné dans le Lévitique : Celui qui se sera accouplé avec une jument ou une brebis sera puni de mort ; tuez aussi la brebis, etc… Autrefois ceux qui ne rougissaient pas de commettre ce crime abominable étaient brûlés avec la bête.

D’après beaucoup de théologiens, Bonacina, Billuart, etc., il n’est pas nécessaire de déclarer l’espèce ou la variété de bêtes, parce que cette circonstance ne change pas l’espèce du péché et ne l’aggrave pas beaucoup. La malice de ce péché vient de l’espèce désordonnée et illégitime.

« La raison, dit saint Liguori, en est que toute la malice de ce crime consiste dans le coït avec une autre espèce, d’où il suit que la différence de sexe est tout à fait accidentelle et n’entraîne aucune différence dans le genre du péché. Les attouchements impudiques avec une bête, quoiqu’ils ne soient pas proprement des péchés de bestialité, ont cependant une certaine turpitude spéciale, comme dit le R. P. Elbel, au moins vénielle » (lib. III, n. 474).

Sur ce sujet, selon l’occasion, il faut interroger les paysans et surtout les bergers et gardeurs de troupeaux.


ARTICLE SECOND
Des péchés de luxure ou d’impureté suivant la nature

Ces péchés sont :

 

La simple fornication ;

Le rapt :

L’adultère ;

L’inceste ;

Le sacrilège.

 

Ce qui fera la matière de six paragraphes.


§ I
De la fornication simple

La fornication, au sens large, est un accouplement quelconque en dehors du mariage ; ou, dans un sens plus strict : la fornication simple est l’accouplement d’un homme libre avec une femme libre déjà déflorée, avec le consentement mutuel : 1o d’un homme libre avec une femme libre, c’est-à-dire, selon Billuart, de personnes libres non seulement du lien du mariage, mais encore de parenté mutuelle ou d’affinité aux degrés prohibés, du vœu de continence, de l’ordre sacré ou de la violence ; 2o déjà déflorée, pour distinguer la simple fornication du stupre ; 3o avec le consentement mutuel, pour la distinguer du rapt.

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La fornication d’un tuteur avec sa pupille le rend beaucoup plus coupable puisqu’il remplit les fonctions de père, et qu’à ce titre il est tenu de s’occuper de ses intérêts, non seulement temporels, mais encore spirituels ; il y a donc là une circonstance aggravante, qu’il faut déclarer en confession.

L’accouplement avec une femme mariée n’est pas une fornication simple, puisqu’il n’a pas lieu avec une femme complètement libre, et qu’il implique le péché d’injustice à l’égard du mari dont il viole le droit ; de là une circonstance qui doit toujours être déclarée en confession.

« La fornication d’un chrétien avec une infidèle est, d’après l’opinion universelle, plus grave qu’avec une catholique, tant à cause du mépris de notre religion qui en est la suite, qu’à cause du danger de la mauvaise éducation des enfants et de l’abandon de la vraie foi, qui résultent facilement d’un trop grand amour pour une infidèle. Selon quelques-uns, cette circonstance change l’espèce (Bailly). » L’accouplement avec un eunuque implique une malice spéciale, parce que, en l’absence d’un véritable sperme fécondant, la véritable fin est manquée, la nature est frustrée ; il n’y a plus dès lors simple fornication, mais péché contre nature.

Selon Billuart, « celui qui par déplaisir et haine du péché interrompt un accouplement fornicateur, même avec effusion de sperme en dehors du vase, fait bien et y est tenu, parce qu’il n’y a pas d’instant où l’on ne soit tenu de faire cesser un péché actuel. La perte du sperme qui s’ensuit a lieu alors par accident et contre la volonté, et il y a une cause légitime de la permettre. Celui qui persévérant dans l’amour du péché interrompt un accouplement commencé, avec effusion hors du vase par crainte d’infamie ou par quelque autre motif humain, commet un double péché, celui de fornication commencée et celui de pollution. » (Dissertation VI, art. II.)

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La prostitution est l’accouplement avec une femme prête à se livrer au premier venu, publique et généralement vénale.

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« L’homme, selon Sylvius et autres, dit Billuart, ne paraît pas tenu de déclarer en confession s’il a forniqué avec une prostituée ou une autre femme, pourvu qu’il déclare le nombre ; parce que, disent-ils, cette circonstance n’est pas notablement aggravante, peut-être parce que l’acte en lui-même est génératif, et que c’est seulement par accident, par suite de la condition de la personne que la génération est empêchée, comme dans le cas où on forniquerait avec une vieille, ou une femme stérile. Quelques-uns cependant prétendent que le fornicateur est tenu de déclarer la circonstance de la prostitution, parce que, disent-ils, dans une telle fornication, on n’empêche pas seulement le bien des enfants à naître, mais on empêche encore qu’il en naisse. Cette dernière opinion est la plus sûre. »

Il ne sera peut-être pas hors de propos de parler ici d’un certain moyen employé par quelques-uns, quand ils approchent des prostituées et peut-être aussi des autres femmes, pour se garantir de la maladie syphilitique. Cette invention ignorée de quelques confesseurs, en protégeant de la contagion morbide, est nécessairement en même temps un obstacle à la conception ou à la génération, quand même l’accouplement semble être extérieurement normal et s’accomplit sans que l’un ou l’autre se retire. — Cet obstacle est souvent employé de la part de la femme, qui n’a en vue que d’empêcher la conception, puisque ce moyen ne la garantit aucunement de la contagion.

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On peut demander aux fornicateurs, au moins à ceux qui paraissent ou passent pour tout à fait corrompus, s’ils ne se sont pas servi d’un moyen secret pour empêcher la conception ; et surtout si l’homme n’a pas cherché à éviter la contagion et par quel moyen. Il faut que l’on sache qu’il ne s’agit pas ici de l’onanisme proprement dit, où, comme il arrive si souvent et si misérablement dans l’acte conjugal, l’homme se retire avant l’effusion du sperme.

Quant aux autres empêchements connus des femmes, comme d’uriner après le coït, et autres efforts pour rejeter le sperme, on doit les regarder généralement comme vains et inutiles ; cependant elles sont gravement coupables, puisqu’elles se proposent une fin mauvaise, celle d’empêcher la conception.

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Il faut demander aux fornicateurs : si avant l’accouplement, ils l’ont désiré avec délectation ; s’ils ont entraîné leur complice au crime ; s’ils lui ont promis mariage ; s’ils n’ont pas promis par serment, et fait la même promesse à plusieurs ; s’ils ont péché par habitude avec scandale ; combien de fois ils ont renouvelé le crime ; si, l’acte consommé, ils se sont livrés à d’autres turpitudes ; s’ils n’ont rien fait pour empêcher la conception.

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Si le pénitent, dit Collet, ne parle que du fait de l’accouplement, il faut l’interroger sur son état et celui de sa complice, s’il est marié, si sa complice est mariée, s’ils sont consanguins ou parents par affinité, etc…

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§ II
Du stupre et du viol

Le stupre est l’accouplement illicite avec une vierge. Quelques-uns veulent qu’il faut que cet accouplement soit violent, de telle sorte que si la vierge consent, il n’y a plus de stupre ; d’après eux ce n’est pas une espèce particulière de luxure, et il ne se distingue pas de la simple fornication. C’est l’avis de Sanchez, Lessius, Malderus et plusieurs autres ; d’après eux, le stupre est toujours la défloration violente d’une vierge.

Sous le nom de vierge on n’entend pas ici une personne qui n’ait jamais péché contre la chasteté, mais celle qui n’a pas encore eu d’accouplement avec une autre. Il ne s’agit donc pas ici de la virginité comme vertu, mais simplement comme état d’intégrité.

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Le clergé gallican, année 1708, a condamné cette proposition : Suzanne exposée à l’infamie et à la mort aurait pu se conduire négativement et laisser s’accomplir le viol, pourvu qu’elle n’y eût point consenti par un acte intérieur, et l’eût détesté et exécré, comme téméraire, scandaleuse, offensant les oreilles pieuses, erronée et contraire à la loi de Dieu. Donc il n’est jamais permis à une femme, même dans la crainte de la mort, de rester passive et de permettre le viol ; parce que dans ce cas la passivité et l’immobilité sont une certaine coopération, et doivent toujours être considérées dans la pratique comme un acte volontaire.

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Le stupre même volontaire est un péché de luxure spécial. Et puisque le Concile de Trente a défini (sess. 14, can. 7) qu’il est nécessaire de droit divin de déclarer en confession les circonstances qui changent l’espèce du péché, il faut résoudre cette question de pratique continuelle, si ceux qui sont coupables de stupre volontaire, soit de fait, soit en désir ou en délectation, sont tenus de déclarer la circonstance de la virginité. Les théologiens l’affirment le plus communément, et regardent cette nécessité comme une conséquence de ce principe une fois admis.

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Billuart et d’après lui, dit Bouvier, Wiggers, Boulart et Daelmen prétendent que la circonstance de la virginité dans un stupre volontaire ajoute une malice spéciale à la simple fornication, mais seulement une malice vénielle, qu’il n’est pas nécessaire de déclarer en confession.


§ III
Du rapt

Le rapt, selon quelques théologiens, est la violence faite à une personne ou à ses parents, en vue de la satisfaction d’une passion libidineuse, ou, comme l’indique le mot, l’enlèvement violent d’une personne d’un lieu dans un autre, pour satisfaire sa passion ou contracter mariage avec elle.

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Tout rapt n’a pas la même gravité. Voici, selon Collet, la gradation de gravité dans les rapts de femmes : le péché le plus grave est le rapt d’une religieuse, puis celui d’une femme qui a fait un simple vœu de chasteté. Vient ensuite le rapt d’une consanguine ou parente par affinité ; enfin celui d’une femme mariée, d’une vierge, d’une veuve et d’une prostituée. Sylvius ajoute que le péché sera beaucoup plus grave si un mâle enlève un mâle, une femelle en vue d’un abominable libertinage, etc.

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La fornication avec une femme endormie ou ivre, ou avec une jeune fille n’ayant pas l’usage de sa raison, ou n’ayant aucune connaissance de ce crime, peut se ramener au rapt, quoiqu’il n’y ait pas rapt proprement dit, mais plutôt tromperie.

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Il faut rechercher maintenant comment doit se conduire une femme soumise à la violence, pour ne pas pécher devant Dieu. Billuart répond en ces termes : 1o elle ne doit pas consentir intérieurement à la délectation, mais la repousser positivement ; 2o extérieurement elle doit résister positivement au séducteur par tous les efforts et mouvements du corps : coups de poing, soufflets, cris, s’il y a quelque espoir de secours ; en un mot, par tout ce qu’elle peut faire moralement et raisonnablement, autrement si elle ne fait pas tout ce qu’elle peut et doit pour l’empêcher, elle est censée consentir.

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Billuart demande encore si elle doit crier au péril de sa vie ou de sa réputation. Il répond : si elle espère qu’avec le secours de Dieu elle pourra ne pas consentir intérieurement au plaisir vénérien, ce qui, je l’avoue, est très difficile, je pense qu’elle n’y est pas tenue, pourvu toutefois qu’elle résiste extérieurement de tout son possible à celui qui lui fait violence.


IV
De l’adultère

L’adultère est l’entrée dans un lit étranger, ou la violence du lit d’autrui. Il peut être commis de trois manières : 1o entre un homme marié et une femme libre ; 2o entre un homme libre et une femme mariée ; 3o entre un homme marié et une femme mariée.

L’adultère est une espèce de luxure distincte des autres et un péché mortel très grave.

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L’adultère double, c’est-à-dire l’accouplement illicite d’un homme marié avec une femme mariée, est plus grave que l’adultère simple, puisque le premier viole deux droits, tandis que le second n’en viole qu’un ; l’adultère d’une femme mariée avec un homme libre est plus grave que celui d’un homme marié avec une femme libre, pour des raisons à tous évidentes et connues. Il faut donc nécessairement déclarer en confession les diverses circonstances de l’adultère.

L’adultère accompli du consentement du mari reste cependant un véritable adultère, malgré le fameux axiome : Il n’y a point d’injustice à l’égard de celui qui sait et veut… Avant le pape Innocent XI, on disait : « Le coït avec une femme mariée, du consentement de son mari, n’est pas un adultère ; et alors il suffit de dire en confession qu’on a forniqué. »

Mais ce pape a déclaré que le consentement du mari ne légitimait pas la chose.

… Le confesseur doit interroger les adultères sur les points suivants : 1o Sont-ils mariés tous les deux ? 2o Ont-ils lapidé les biens du mari innocent ? 3o Ont-ils l’habitude de l’adultère ? 4o La femme adultère a-t-elle conçu ou a-t-elle pu concevoir ? 5o Est-il né des enfants ? 6o Les enfants sont-ils nourris des biens du mari comme s’ils étaient légitimes ? 7o Les enfants de l’adultère ont-ils partagé avec les enfants légitimes l’héritage qui ne leur était pas dû ? 8o Doivent-ils le partager ? 9o Enfin est-il certain ou douteux à qui appartiennent les enfants ? Etc…


§ V
De l’inceste

L’inceste est l’accouplement illicite avec une consanguine ou parente par affinité aux degrés prohibés, tels que sont tous les degrés de consanguinité et d’affinité par suite d’un mariage ou convenu ou consommé jusqu’au quatrième degré inclusivement, ou d’affinité par suite d’une union illégitime jusqu’au second degré inclusivement. (Concile de Trente.)

Selon Billuart, sous ce mot d’accouplement considéré comme acte principal (concubilus), il faut comprendre les baisers, les attouchements, les regards, et autres actes tendant à l’accouplement, et par conséquent appartenant à l’inceste, comme ils appartiennent à l’adultère avec une femme mariée, à la fornication avec une femme libre.

« Quoique tous les incestes soient de la même espèce, écrit Billuart, les uns cependant sont plus graves que les autres ; ainsi l’inceste est plus grave avec une consanguine qu’avec une parente par affinité ; plus grave au premier qu’au second degré, soit de consanguinité, soit d’affinité. De même, il est plus grave et très grave en ligne droite, soit de consanguinité, soit d’affinité, qu’en ligne collatérale ; plus grave, par exemple, avec la mère qu’avec la sœur ; aussi, d’après l’opinion la plus commune touchant la déclaration des circonstances notablement aggravantes, il ne suffit pas de dire en confession : j’ai commis un inceste ; mais on doit dire si c’est avec une consanguine ou une parente par affinité au premier ou au second degré de la ligne droite ou collatérale, parce que ces circonstances sont notablement aggravantes. Quant aux degrés plus éloignés de la ligne collatérale, je pense avec les RR. PP. Ledesma, de la Cruz, Sporer et plusieurs autres, qu’il n’est pas besoin d’interroger le pénitent, parce que cette circonstance ne paraît pas notablement aggravante. »

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Quelques théologiens prétendent que le péché d’un confesseur avec sa pénitente doit être ramené à l’inceste ; d’autres, en plus grand nombre, le nient.

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Les actes impudiques entre personnes du même sexe, unies par les liens de consanguinité ou d’affinité, emportent la malice de l’inceste, et cette circonstance doit être déclarée en confession.

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§ VI
Du sacrilège

Le sacrilège charnel, ou en tant que péché de luxure, est la violation d’une chose sacrée par un acte vénérien ou charnel. Le sacrilège charnel n’est pas seulement un péché contre la chasteté, mais encore contre l’honneur de Dieu, à cause de la pollution d’une chose sacrée.

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… Le sacrilège charnel est commis par la copulation ou l’effusion volontaire quelconque du sperme humain dans le lieu saint. Par le mot de lieu saint on entend, d’après les théologiens, tout lieu bénit par l’évêque et destiné aux offices divins, depuis le toit intérieur jusqu’au pavé ; on y comprend aussi les cimetières. Ne sont pas réputés lieu sacré : la sacristie, l’atrium, la tour ou clocher, ni les oratoires privés, à moins qu’ils n’aient été élevés par l’autorité de l’évêque, comme dans les hôpitaux, collèges et séminaires, parce qu’alors on les considère comme de vraies églises. N’est pas non plus réputé lieu sacré un oratoire privé non consacré ou bénit, quand même l’évêque aurait permis d’y célébrer la messe, parce que, malgré cela, il peut, selon la volonté du maître, être rendu à des usages profanes ; ni les bâtiments d’un monastère, les cloîtres, les officines et cellules des moines, etc.

Il est difficile cependant de concevoir que les actes vénériens accomplis dans des oratoires privés où est célébré le saint sacrifice de la messe n’en revêtent pas une malice spéciale. La raison et la foi indiquent assez à tout chrétien qu’une telle circonstance doit toujours être déclarée en confession. C’est l’avis du R. P. Concina et de Mgr  Bouvier.

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Quant à la malice des péchés de luxure commis dans le lieu saint, regards, entretiens obscènes, baisers, attouchements, même sans qu’il y ait danger prochain de pollution, nous pensons qu’à cause du respect dû au lieu saint et par conséquent à Dieu, il faut déclarer en confession la circonstance du lieu saint. C’est le parti le plus sûr.

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Quant aux objets sacrés, distincts des personnes et des lieux saints, et consacrés au culte divin, comme : vases sacrés, linges, etc…, il est certain que, abuser de ces objets pour la luxure, que prendre l’huile sainte ou la sainte Eucharistie dans un dessein de luxure superstitieuse, c’est un horrible sacrilège.

Quelques théologiens ont dit qu’un prêtre portant sur lui la divine Eucharistie ne commet pas de sacrilège en péchant intérieurement ou extérieurement contre la chasteté, pourvu que ce ne soit pas en mépris du sacrement. Mais d’autres très communément disent qu’il est coupable de sacrilège, parce qu’on doit traiter saintement les choses saintes ; or, le prêtre, dans ce cas, ne traite pas saintement, mais d’une façon infâme le saint des saints.

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CHAPITRE II
De la luxure non consommée

La luxure non consommée est celle qui ne va pas jusqu’à la pollution ou l’évacuation du sperme. Elle comprend tous les actes peccamineux intérieurs et extérieurs sur soi-même ou sur d’autres contre la chasteté, sous le nom d’impudicité qui exclut du royaume de Dieu.

Dans ce chapitre seront exposés les sujets suivants : De la délectation morose, pensées, désirs, joie, attouchements, baisers, embrassements, regards, peintures et sculptures obscènes ou indécentes, parures des femmes, paroles, chants, lectures, livres obscènes, danses, spectacles, jeux scéniques et autres choses semblables.


ARTICLE PREMIER
Des pensées, des désirs de la joie ou de la complaisance et de la délectation morose en matière de luxure
 
§ I
DES PENSÉES

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En matière de luxure ou d’impureté, on doit ordinairement regarder comme coupables de fautes graves les personnes qui, sans raison ou nécessité, donnent accès en elles à des pensées ou à des actions déshonnêtes.

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§ II
Des désirs, de la joie ou de la complaisance

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Le désir emprunte son espèce à l’acte extérieur auquel il tend. Ainsi, si l’on désire l’accouplement avec une femme libre, ce désir prend la malice de la fornication ; avec une femme mariée, celle de l’adultère ; avec une femme consacrée à Dieu, celle du sacrilège. Si le désir tend à des espèces de luxure imparfaite, il prend leur malice spéciale, comme celle du tact, du regard, etc… Toutes ces circonstances doivent être déclarées en confession.

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§ III
De la délectation morose

La délectation morose est la libre complaisance dans une chose mauvaise, offerte comme présente par l’imagination, sans désir de la faire ; par exemple, si quelqu’un s’imagine forniquer, et que, sans avoir l’intention d’accomplir l’acte, il se complaise dans la représentation de cet acte.

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La délectation morose emprunte nécessairement son espèce à l’objet prochain auquel elle a rapport, et aux conditions de cet objet ; autrement, on ne pécherait pas davantage en se représentant l’acte du coït que celui d’un simple baiser ; ce qui est absurde.

« Donc, ajoute Collet, la délectation emprunte son espèce à ses objets ; et de même que le coït diffère spécifiquement du baiser, de même la complaisance dans l’un diffère de la complaisance dans l’autre. Ainsi, les pénitents, de même qu’ils sont tenus de déclarer s’ils sont allés jusqu’au désir, ou s’ils se sont arrêtés dans la pure délectation ; de même ils sont tenus de déclarer si cette délectation a eu pour objet l’attouchement ou le coït, le coït simple, ou accompagné de circonstances qui l’aggravent. Aussi, quand une mauvaise confession doit être recommencée, le directeur doit s’appliquer à ce que ce qui a été imprudemment omis dans la première confession soit soigneusement expliqué dans la seconde. C’est l’opinion la plus commune des théologiens, et dont on ne saurait s’écarter sans danger dans une matière si importante et où il s’agit de la validité du sacrement. » À l’appui de cette opinion, on peut encore citer ces paroles de saint Thomas : La délectation dans une action et cette action même se rapportent au même genre de péché.

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Est-il permis aux fiancés et veufs de se délecter à l’idée du coït futur ou passé ? Le R. P. Busembaum répond que cela est permis, pourvu que la délectation vienne de l’appétit rationnel et non de l’appétit charnel. Mais il a raison d’ajouter qu’en pratique, dit saint Liguori, il est difficile de l’admettre, parce que la plupart du temps la délectation charnelle est jointe à la rationnelle.

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Si les fiancés, dit Billuart, se délectent charnellement du coït futur, qui leur est représenté par l’imagination, ils pèchent mortellement. Ils peuvent seulement se réjouir dans la pensée qu’ils pourront un jour exercer légitimement l’acte conjugal, soit en vue de recouvrer la santé, ou d’avoir une condition temporelle meilleure, ou de jouir du plaisir permis dans les limites du mariage ; de même aussi le veuf et la veuve peuvent se réjouir de l’avoir exercé, abstraction faite de toute commotion volontaire.

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ARTICLE DEUXIÈME
Des attouchements, des baisers et des embrassements
§ I
Des attouchements

Tout attouchement déshonnête, ou exercé avec une intention libidineuse sur soi ou sur autrui, est un péché mortel, tant pour celui qui touche que pour celui qui souffre l’attouchement volontairement et libidineusement, surtout si l’attouchement a lieu dans les parties vénériennes et voisines, même par-dessus les vêtements même par jeu, légèreté, curiosité, ou sans cause juste et raisonnable, surtout entre personnes adultes, parce que de tels attouchements sont toujours libidineux, ou au moins emportent un grand danger de luxure et de pollution.

L’attouchement du sein des femmes, surtout plus grandes et pubères, doit être considéré comme péché mortel, s’il a lieu directement et avec délectation morose.

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D’après Billuart, une femme qui, même sans passion libidineuse, se laisse toucher dans les parties honteuses ou voisines, même aux seins, pèche mortellement ; parce que non seulement toucher ainsi, mais être touché, influe beaucoup sur le sens vénérien. Si une femme est touchée dans les parties déshonnêtes, elle doit, par tous les moyens moralement possibles, repousser, détourner, même violemment, la main qui la touche.

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Toucher ses propres parties, dit Busembaum avec beaucoup d’autres, par légèreté ou curiosité, n’est pas en soi péché mortel, pourvu qu’il n’y ait pas délectation ou danger de délectation, et que l’attouchement ait lieu en passant et qu’il ne soit pas réitéré, car alors il y aurait danger. On ne peut donc excuser du péché mortel ceux qui toucheraient leurs propres parties sous l’influence d’une commotion vénérienne et sans cause légitime.

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Il faut remarquer cependant que les attouchements faits pour apaiser tout d’un coup les accès d’hystérie ou de passion hystérique, maladie dont sont affectées les femmes et surtout les jeunes filles, sont illicites et très peccamineux.

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L’attouchement des parties honnêtes, même entre personnes du même sexe, s’ils sont faits par affection libidineuse et avec consentement à cette affection, sont des péchés mortels, parce qu’ils tendent par leur nature à l’impudicité, qui exclut du royaume des cieux, selon S. Paul, Galat. et Ephes.

Cependant les attouchements qui se font par légèreté, jeu, curiosité et autre cause semblable, sur les parties honnêtes d’une autre personne, même d’un sexe différent, sans grave danger de libertinage, ne dépassent pas le péché véniel. C’est l’avis de Sanchez.

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D’après Billuart, les attouchements des parties génitales des bêtes de grande espèce sont des péchés mortels, même par jeu, légèreté ou curiosité, et même sans affection libidineuse, parce que de tels attouchements émeuvent notablement l’appétit vénérien.

Quant aux animaux plus petits, ajoute Billuart, comme les chiens, les chats, etc., toucher leurs parties génitales par légèreté, jeu, curiosité, ne semble pas exciter gravement la nature et, par conséquent, n’est pas mortel.

Quoi qu’il en soit, de toutes ces espèces d’attouchements, il faut s’abstenir avec soin ; c’est le plus sûr.

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§ II
Des baisers et des embrassements

Les baisers et les embrassements dans les parties honnêtes et honnêtement donnés, quand ils sont donnés et reçus selon les habitudes du pays, pour cause de devoirs d’urbanité, d’amitié, de bienveillance ou de réconciliation, avant le départ, au retour, quand même il en surviendrait quelque délectation vénérienne, pourvu qu’elle soit aussitôt réprimée, ne sont pas des péchés.

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On ne peut excuser du péché mortel le baiser de bouche à bouche, s’il se prolonge avec délectation, et surtout s’il est accompagné de l’introduction de la langue, comme dit Billuart ; s’il se prolonge avec une vive délectation, ou qu’il se répète plusieurs fois en mordillant et suçant les lèvres, ou s’il est colombinum, en mettant sa langue dans la bouche de l’autre, fait de cette sorte, même par jeu ou légèreté, ou même pour prouver l’amitié, ce baiser semble influer gravement sur la commotion charnelle, et, par conséquent, ne peut être excusé de péché mortel. C’est aussi l’avis de saint Liguori. De même, si les baisers sont faits à des parties insolites, comme la poitrine, etc., on doit les regarder comme libidineux, ou au moins comme entraînant un grand danger de libertinage et, par conséquent, comme péchés mortels.

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Quant aux longs embrassements avec compression des corps, ils sont le plus souvent très libidineux, et souvent accompagnés de violents mouvements désordonnés, de la pensée et du désir du coït, et peut-être de la pollution.

Il faut donc interroger le pénitent qui déclare simplement en confession des embrassements. Un auteur de Saint-Flour assez récent dit très bien : « Remarquez que souvent les jeunes gens ne savent pas (dans les baisers et les embrassements) quel esprit les pousse ; que tout cela est plein de dangers, et qu’il est difficile de les excuser de péché mortel quand ils ont lieu entre personnes déjà capables de libertinage. Aussi, pour ces raisons, et quand même on n’ait point encore éprouvé les jouissances vénériennes, il sera sage de différer l’absolution pour ceux qui en ont l’habitude, surtout lorsque l’on ignore la fragilité de l’autre. »

Toutes les fois, selon Collet, que les baisers sont accompagnés de délectation vénérienne, il faut déclarer la circonstance de la personne, même innocente, à qui a été donné le baiser ; si elle est liée par un vœu, ou consanguine, ou alliée ou mariée, parce que, dit-il, l’acte honteux implique la malice du coït auquel il tend de sa nature. Il est certain cependant que très souvent on ne songe pas au coït.


ARTICLE TROISIÈME
Des regards

… Les regards libidineux avec délectation vénérienne, sur notre sexe ou l’autre, sont toujours mortels : tout homme qui verra une femme pour la désirer a déjà commis l’adultère dans son cœur. (Matth. 5, 28.) Sont toujours libidineux et, par conséquent, mortels, les regards moroses des parties déshonnêtes entre personnes de différent sexe, à moins qu’il n’y ait nécessité.

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Les regards des parties déshonnêtes du même sexe ou de son propre corps, s’ils ne sont pas prolongés et accompagnés de délectation morose, mais s’ils ont lieu seulement par simple curiosité et légèreté, ne doivent pas être considérés comme mortels, parce qu’ils n’excitent pas beaucoup, par eux-mêmes, à la luxure.

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Les confesseurs doivent surtout engager les jeunes gens à ne pas se baigner ensemble, sans couvrir leurs parties secrètes de caleçons de bain, à cause des nombreuses impuretés qui ont coutume de se commettre en pleine nudité, et à cause des regards des personnes présentes ou des passants et surtout des personnes d’un autre sexe.

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Regarder par simple curiosité ou légèreté les parties génitales et le coït des bêtes n’est pas péché mortel, parce que généralement ces regards n’entraînent pas un grave danger.

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Regarder des peintures obscènes, dit saint Liguori, seulement par curiosité, n’est pas péché mortel, s’il n’y a ni délectation honteuse, ni danger de l’éprouver. Mais, en pratique, on peut difficilement excuser du péché mortel celui qui regarde complaisamment les parties vénériennes d’une femme en peinture, parce qu’il lui sera difficile d’échapper à la délectation honteuse, ou au moins à un danger probable de réprouver… à moins de regarder très peu de temps et à une grande distance.

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ARTICLE QUATRIÈME
De l’ajustement et des parures des femmes

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… La parure du corps peut avoir quatre fins : 1o protéger le corps contre les injures de l’air ; 2o couvrir les parties honteuses de la nature ; 3o observer la décence de l’état selon les habitudes du pays ; 4o entretenir ou augmenter la beauté. La première est de nécessité corporelle. La seconde, de nécessité spirituelle. La troisième, de convenance et conforme à la raison, parce que la saine raison veut que tout homme se présente honorablement dans la vie publique et honore son état, en observant les convenances dictées par les mœurs de son’pays. Reste une difficulté à l’égard de la quatrième, c’est-à-dire à l’égard de la parure des femmes, dont il faut parler spécialement, tant à cause de la grande propension des femmes à ce genre de péché ou au grave désordre qui en résulte, qu’à cause de leur grande et naturelle vanité et futilité dans l’usage des ornements vains et superflus.

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Avoir la tête découverte et les cheveux nattés, selon la coutume reçue, n’est point un péché ou n’est qu’un péché véniel, pour les mêmes raisons ; il en serait autrement de ceux qui introduiraient une mode, ou agiraient ainsi avec une mauvaise intention.

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Quant aux femmes qui prennent des habits d’homme, ou réciproquement des hommes qui s’habillent en femme, ils pèchent mortellement s’ils agissent ainsi avec l’intention ou le grave danger de libertinage, ou avec un notable scandale.

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Les femmes qui découvrent immodestement leur poitrine de manière à montrer le milieu de leurs seins nu, ne peuvent être excusées en aucune façon, dit Billuart, parce qu’une pareille nudité n’est pas peu provocatrice, et tient plus à la luxure qu’à la beauté. Il faut dire à peu près la même chose, ajoute le même auteur, de celles qui recouvrent leurs seins d’un tissu transparent qui permet de les voir à travers.

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Que faut-il penser des femmes qui usent de quelque moyen artificiel ou corset, pour accentuer davantage les protubérances de leur corps, les augmenter ou les simuler de quelque façon ? Quelques confesseurs exigent que de tels corsages soient recouverts d’un ample mancillari, comme dit Martial (mouchoir de cou, fichu, châle). Ce remède nous semble plutôt favoriser le mal que le détruire. Et, en outre de cette façon, les femmes n’atteignent nullement leur but. Il semble préférable de faire usage de ce mancillaire, en rejetant tous les intermédiaires artificiels, comme ne convenant en aucune façon à des femmes chrétiennes. De cette façon ce qui fait défaut ne serait pas remarqué, la chasteté ne sera pas blessée et le salut des âmes ne courra aucun danger.


ARTICLE CINQUIÈME
Des paroles et des discours déshonnêtes des chansons et des livres obscènes
§ I
Des paroles, des discours et des chansons déshonnêtes ou obscènes

Tenir des propos déshonnêtes par légèreté ou par jeu n’est pas mortel en soi, dit saint Liguori, à moins que ceux qui les entendent ne soient assez faibles d’esprit pour s’en scandaliser, ou que les propos ne soient par trop lascifs.

Aussi des auteurs cités par saint Liguori remarquent que les dictons honteux proférés par les moissonneurs, vendangeurs, ne sont pas mortels, parce qu’ils sont dits et entendus d’une manière lubrique, mais sans qu’ils émeuvent.


§ II
Des livres obscènes

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Je ne voudrais pas affirmer que ceux-là pèchent mortellement, qui par simple curiosité lisent des livres obscènes, si à cause de leur âge avancé, de leur complexion froide ou de l’habitude qu’ils ont de s’occuper de matières vénériennes, ils n’encourent pas un grave danger.

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Ceux qui composent ces livres, même non gravement obscènes, souvent pèchent mortellement, parce qu’ils sont pour beaucoup, sans raison suffisante, une occasion de ruine ; le péché de ceux qui les vendent paraît moins grand ; puisque, comme nous l’avons dit, beaucoup peuvent les lire sans péché ou au moins sans péché mortel, par conséquent ils ne pèchent pas du tout ou ils ne pèchent que véniellement en les achetant ; donc le libraire qui les garde dans sa boutique et les vend à ceux qui les lui demandent ne doit pas être inquiété.


ARTICLE SIXIÈME
Des danses et des bals

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La danse est licite de sa nature, pourvu qu’elle ait lieu entre séculiers, entre personnes honnêtes et d’une façon honnête, c’est-à-dire sans gestes déshonnêtes. Quand les saints Pères les blâment vivement, ils parlent des danses honteuses ou de leur abus.

Quelquefois, dit Origène, le diable lutte avec l’homme par la vue des femmes, quelquefois par l’attouchement ; dans les danses, il lutte avec l’homme par tous ces moyens à la fois. Car c’est là qu’elles paraissent avec tous leurs ornements, qu’elles se font entendre avec leurs chants, leurs éclats de rire, leurs propos, qu’on les touche de la main, et que le diable combat fortement et remporte la victoire.

Dans ces bals, c’est le diable qui danse, dit saint Chrysostome.

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ARTICLE SEPTIÈME
Des spectacles et des représentations scéniques

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Au théâtre, c’est le rire, la turpitude, la pompe diabolique, la perte de temps, l’excitation de la concupiscence, la méditation de l’adultère, le gymnase de la prostitution (S. Chrysostome, H. 42, in Act.).

— Dans les spectacles, dit Salvien, il y a comme une apostasie de la foi et une prévarication mortelle contre ses symboles et les sacrements célestes. Quel est, en effet, le premier engagement du baptême salutaire des chrétiens, sinon de renoncer au démon, à ses pompes, à ses spectacles et à ses œuvres ?

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Je ne pourrais, en aucune façon, excuser de péché mortel un jeune homme qui, sans nécessité, voudrait par simple curiosité assister à des comédies de ce genre (notablement obscènes) à moins qu’il ne fût très timoré, et qu’il n’ait plusieurs fois fait l’expérience de n’avoir jamais péché mortellement en y assistant.

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« Assister à des spectacles notablement obscènes pour le plaisir qui en résulte est évidemment un péché mortel ; mais si c’est seulement pour la curiosité et la simple récréation, sans danger de consentement à la délectation vénérienne, quelques-uns pensent qu’il n’y a que péché véniel ; mais cette décision est un peu relâchée et on doit le considérer comme péché mortel, tant à cause du péril et du scandale qu’à cause de la coopération à une action mortellement mauvaise. »

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« Je n’absoudrais pas : 1o les acteurs et actrices à l’article de la mort, à moins qu’ils ne renoncent à leur profession ; 2o les poètes qui composent des pièces pleines d’amours illicites, pour être représentées au théâtre ; 3o ceux qui concourent prochainement aux représentations théâtrales, comme les servantes qui habillent les actrices, ou ceux qui font profession de vendre, de louer ou de fabriquer des habits uniquement destinés à cet usage ; 4o ceux qui, en assistant aux représentations théâtrales, donnent un grave scandale, comme seraient des personnes bien connues pour leurs vertus chrétiennes, à moins qu’il n’y ait grave nécessité ; 5o ceux qui à cause d’une circonstance personnelle encourent un grave danger de luxure ; 6o ceux enfin qui sans cause raisonnable assistent ordinairement à ces spectacles, quand même ils ne courraient pas un grave danger, ou ne donneraient pas le scandale, parce qu’une telle habitude ne peut se concilier avec une vie chrétienne. »

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ARTICLE HUITIÈME
Quelques mots sur la manière d’interroger les pénitents sur le sixième commandement

… Comme le confesseur est un médecin et un juge, il faut qu’il connaisse les péchés de son pénitent pour appliquer les remèdes convenables à ses maux… Par conséquent, si les pénitents ne découvrent pas leurs péchés, le confesseur doit les interroger, surtout quand ils lui paraissent ignorants ou grossiers, ou quand il les voit timides, honteux, embarrassés, et tout cela arrive fort souvent en cette difficile et honteuse matière. Il faut donc alors venir à leur secours et les aider… Il est arrivé que des personnes ont croupi pendant toute leur vie dans des péchés d’impureté parce que les confesseurs avaient négligé de leur faire des questions sur le sixième commandement…

Le confesseur, quand il interroge un pénitent, lui demandera s’il n’a point eu de pensées déshonnêtes, des mouvements ou des plaisirs charnels… Si le pénitent dit avoir eu des pensées déshonnêtes ou avoir ressenti des plaisirs charnels, le confesseur lui demandera si ces pensées ou ces plaisirs ne l’ont point porté à faire quelque action déshonnête ; s’il avoue en avoir fait quelqu’une, le confesseur, sans en spécifier aucune, lui demandera quelle était cette action et de quelle manière et avec qui il l’a faite.

Le confesseur doit s’enquérir de la condition du pénitent et de celle de la personne avec laquelle il a péché, si l’un ou l’autre est engagé dans le mariage ou lié par des vœux de chasteté, ou par quelque ordre sacré… Le confesseur ne doit pas oublier de demander au pénitent si la personne avec laquelle il a péché demeure avec lui…

… On peut, par exemple, parler ainsi au pénitent : N’auriez-vous pas eu, par hasard, quelques pensées déshonnêtes ou contre la chasteté ? Oui… Ces pensées vous ont-elles occupé longtemps ? Vous y êtes-vous arrêté volontairement et avec complaisance ? Sur quel objet se portaient-elles ? N’avez-vous pas eu, alors, quelques mauvais désirs, de faire, par exemple, ce à quoi vous pensiez, soit à votre égard, soit à l’égard d’une autre personne ? Était-ce une personne de l’autre sexe, mariée ou non, parente, alliée ou non, etc ? Avez-vous vu cette personne, lui avez-vous parlé ? Vos pensées ont-elles été suivies de regards, d’attouchements déshonnêtes ? Tout cela a-t-il été suivi de quelque effet sensible ? Quel était cet effet ? Était-il fâcheux ? En avez-vous eu de la peine ?

Pour savoir si des jeunes gens, plus ou moins pubères, se sont touchés jusqu’à la pollution, sans les exposer, dans leur heureuse ignorance, à soupçonner ou à apprendre quelque chose, on peut leur demander combien de temps et dans quelle fin ils se sont touchés ; s’ils ont éprouvé quelques mouvements dans leur corps, et pendant combien de temps ; si après l’attouchement il ne leur est pas arrivé quelque chose d’insolite et de honteux ; s’ils n’ont pas éprouvé un plaisir beaucoup plus grand dans leur corps à la fin des attouchements qu’au commencement ; si alors, quand, à la fin, ils ont ressenti une grande délectation charnelle, tous les mouvements du corps ont cessé avec les attouchements ; s’ils ne se sont pas sentis mouillés, etc., etc. Il faut demander aux jeunes filles qui avouent s’être touchées, si elles n’ont pas essayé d’apaiser quelque prurit, et si ce prurit a cessé au moment où elles ressentaient un vif plaisir ; si alors les attouchements avaient cessé, etc…




SECONDE PARTIE
DU DEVOIR DES ÉPOUX

Cette seconde partie sera partagée en deux chapitres. Le premier sera consacré à l’examen de l’empêchement du mariage pour cause d’impuissance. Le second traitera des obligations spéciales des époux.



CHAPITRE PREMIER
§ I
De l’empêchement du mariage par impuissance

L’impuissance est l’incapacité de consommer le mariage, c’est-à-dire d’avoir un coït qui, par lui-même, suffise à la génération.

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Impuissances perpétuelle et temporaire, naturelle et accidentelle chez l’homme

Trois causes produisent cette impuissance :

1o L’absence complète et absolue du pénis, de telle sorte qu’il n’y ait pas même la plus petite extrémité du membre viril, qui puisse répandre la semence même dans les parties génitales extérieures de la femme…

2o L’atrophie de la vessie ;

3o L’absence des deux testicules.

Impuissances perpétuelle et temporaire, naturelle et accidentelle chez la femme

Les causes d’impuissance chez la femme sont :

L’absence de l’utérus, du vagin, l’oblitération naturelle, congénitale et complète de ce dernier ou son excessive étroitesse résultant d’un vice de conformation des os du bassin.

Le P. Debreyne, docteur en médecine et professeur à la Faculté de Paris, avant d’entrer dans les ordres, se complaît ici dans de savantes dissertations sur toutes les causes d’impuissance : dissertations dont nous n’avons pas à nous occuper, car elles relèvent toutes exclusivement de la science médicale.

Le paragraphe II de ce chapitre est consacré aux hermaphrodites : ce paragraphe, lui aussi, n’est qu’une dissertation médicale.



CHAPITRE II
Des devoirs conjugaux ou des obligations des époux

Ce chapitre sera partagé en trois articles ;

Le premier aura pour objet la pétition et la reddition du devoir conjugal ;

Le second sera consacré à l’examen de l’usage du mariage, des circonstances de l’acte conjugal et des péchés qu’y commettent les époux ;

Le troisième article, enfin, traitera de la conduite du confesseur à l’égard des personnes mariées et de celles qui se disposent à entrer dans le mariage.


ARTICLE PREMIER
De la pétition et de la reddition du devoir conjugal
Réflexions préliminaires.

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L’homme doit rendre son devoir à la femme, et réciproquement l’épouse à l’époux ; la femme n’a pas la possession de son corps, mais l’homme ; de même l’homme n’a pas la possession de son corps, mais la femme. (Saint Paul.)

Qu’ils ne se le refusent pas l’un à l’autre, de peur de tomber dans de damnables corruptions, par la tentation de Satan, à cause de l’incontinence de tous les deux ou de l’un seulement d’entre eux. (Saint Augustin.)

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§ I
De la pétition du devoir illicite ou de ceux qui pèchent mortellement en l’exigeant

Un époux qui sait avec certitude que son mariage est nul par un empêchement dirimant quelconque, comme par exemple un empêchement d’affinité provenant d’un commerce criminel, ne peut, par aucun motif, ni demander, ni même rendre le devoir conjugal, parce qu’il commettrait une véritable fornication mortelle.

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L’époux qui doute prudemment et raisonnablement de la validité de son mariage ne peut demander le devoir jusqu’à ce que, après un mûr examen, il ait déposé son doute et formé sa conscience.

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Celui, dit Billuart, qui, après le mariage consommé, a fait vœu de religion ou d’embrasser les saints ordres peut demander et rendre le devoir, parce que par ce vœu il n’a contracté que l’obligation de prendre les ordres ou d’entrer en religion, s’il survit. Mais aussitôt après la mort de son conjoint, il est tenu d’accomplir son vœu. Mais s’il a fait ces vœux avant la consommation du mariage, il est tenu de le remplir avant la consommation, puisqu’il le peut licitement d’après l’hypothèse. S’il consomme le mariage, il pèche mortellement une première fois, mais ensuite il peut demander et rendre le devoir pour les raisons alléguées.

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§ II
De ceux qui pèchent véniellement en exigeant le devoir conjugal.

1o Plusieurs théologiens, d’après l’autorité de saint Thomas, regardent comme une faute mortelle l’usage du coït pendant que la femme a ses règles.

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Nous ne pouvons croire, cependant, malgré la grande autorité de saint Thomas, que l’acte conjugal exercé pendant l’époque des règles soit un péché mortel. Il faudrait pour cela qu’il fût prouvé expérimentalement et physiologiquement que cet acte est essentiellement infécond ou contraire à la conception.

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2o La grande majorité des théologiens affirme que la pétition conjugale, dans l’état de grossesse, n’est qu’une faute vénielle, pourvu qu’il n’y ait point danger d’avortement. Mais ce danger est souvent très difficile à connaître ou à apprécier. Voici du reste, sur ce point, l’énoncé général de la science (suit une longue dissertation technique et médicale).

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3o On demande si la pétition conjugale est permise les jours de fête, le dimanche et un jour de communion.

Saint Thomas répond :

L’acte matrimonial, quoique exempt du péché, cependant comme il abaisse la raison à cause de la délectation charnelle, rend l’homme inapte aux choses spirituelles ; il n’est donc pas permis de demander le devoir les jours où l’on doit plus particulièrement vaquer aux choses spirituelles… Ces jours-là on peut employer d’autres moyens pour réprimer la concupiscence, comme la prière, et beaucoup d’autres moyens de ce genre, employés par ceux qui gardent la continence perpétuelle.

Mais Sanchez est d’un sentiment contraire, et avec lui de nombreux théologiens, parce que, disent-ils, la pétition conjugale n’est défendue aux jours précités par aucun droit divin ou ecclésiastique.

. . . . . . . . . . . . . . . . . .

On demande si celui qui a éprouvé une contamination nocturne peut communier le jour suivant.

Voici ce que répond saint Grégoire et sa décision sert de base à la pratique des confesseurs.

« Ou l’éjaculation provient d’un superflu de la nature et de faiblesse, et alors n’est pas du tout coupable ; ou d’un usage excessif des aliments, et alors elle est un péché véniel ; ou d’une pensée précédente, et alors elle peut être mortelle. Dans le premier cas, cette illusion n’est pas à craindre ; dans le second, elle n’empêche pas de recevoir le sacrement ou de célébrer les mystères, s’il y a quelque motif de le faire, comme par exemple, la circonstance d’une fête ou d’un dimanche ; mais dans le troisième cas, on doit, à cause d’une telle pollution, s’abstenir ce jour-là des saints mystères, dit saint Grégoire ; cependant, si la pollution n’a pas été mortelle dans sa cause, ou si le prêtre vraiment repentant en a été absous, et qu’il ait quelque raison de le faire, il pourra célébrer. »


§ III
De la reddition du devoir conjugal et des raisons qui en dispensent légitimement

Le devoir doit être rendu sous peine de péché mortel toutes les fois qu’il est raisonnablement, sérieusement et légitimement demandé, soit expressément, soit tacitement, parce qu’il n’importe pas, dit saint Thomas, si on le demande par paroles ou par signes. Si donc une partie s’aperçoit que sa partie le demande tacitement, ou est en danger d’incontinence, elle est tenue de la prévenir.

Voici les raisons qui excusent ou empêchent de le rendre.

1o L’époux qui est moralement certain de la nullité de son mariage ne peut rendre le devoir à sa partie.

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2o Si l’époux qui demande le devoir est dans un état de démence ou d’aliénation mentale, il n’y a point d’obligation à le rendre, parce qu’une telle demande n’est point un acte humain. Si la folie présentait des intervalles de lucidité, le devoir devrait alors être rendu, à moins que l’usage du mariage n’augmentât la maladie.

Quant à l’époux qui a perdu l’usage de la raison par l’ivresse, il n’y a nulle obligation à lui obéir.

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Sanchez dit que le devoir ne doit pas être rendu à une femme folle et furieuse, à cause de l’avortement qu’on a toujours à craindre, à moins, ajoute-t-il, qu’elle ne soit reconnue stérile.

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3o L’époux qui ne peut rendre le devoir sans exposer gravement sa santé n’y est pas tenu, car, dit l’axiome : il faut d’abord vivre et se bien porter, et saint Thomas ajoute : l’homme est tenu de rendre le devoir à sa femme pour tout ce qui tend à la génération ; sauf cependant avant tout la santé de la personne.

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La femme ne pourrait se refuser à rendre le devoir à cause des grandes douleurs ou des difficultés de l’accouchement. Si néanmoins, d’après le jugement ou la décision des hommes de l’art, ou d’après l’expérience de la femme, l’accouchement ne pouvait pas se faire sans danger pour la vie, elle est dans ce cas dispensée de rendre le devoir conjugal.

4o La femme n’est pas tenue à la reddition conjugale pendant l’époque des règles…

— Il pourra quelquefois, dit Sanchez, y avoir péché mortel, si le coït devait produire une grave maladie ou une notable aggravation de maladie, comme disent saint Antonin et Sanchez…, etc. On doit craindre ce même danger, comme dit Ronc…, si le coït a lieu aussitôt après l’accouchement, c’est-à-dire le jour même ou le suivant, ainsi qu’un médecin fort expérimenté me l’a assuré.

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La femme n’est pas tenue de rendre le devoir en temps d’écoulement menstruel ou d’accouchement, à moins qu’elle n’ait raison de craindre que son mari n’encoure le danger d’incontinence ; cependant si par ses prières elle ne peut l’en dissuader, finalement elle doit le rendre, parce qu’il y a toujours à craindre le danger d’incontinence, ou une querelle, ou quelque autre inconvénient. C’est l’avis de saint Bonaventure et de beaucoup d’autres d’après Sanchez.

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Qu’on doit excuser de l’obligation de rendre le devoir, dit Sanchez, une mère allaitant son enfant, et assez pauvre pour ne pas pouvoir payer une nourrice, et qui sait que ses mamelles seront à sec si elle conçoit de nouveau, ou que son lait sera très pernicieux à son enfant.

5o L’époux n’est pas tenu de rendre le devoir à sa partie qui, par le fait d’un adultère, aurait perdu le droit de le demander.

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6o Une des parties n’est pas tenu de rendre le devoir lorsqu’il est demandé d’une manière contraire à l’honnête exigence de la raison.

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7o Il n’est pas permis de refuser le devoir, dans la crainte d’avoir trop d’enfants.

Tel n’est pas cependant l’avis de Sanchez.

… — J’avouerai cependant, écrit-il, qu’il n’y a pas péché mortel à refuser le devoir pour ce motif, quand il n’y a pas danger d’incontinence dans l’autre époux, et que les parents ne peuvent nourrir tant d’enfants. En effet, un grand inconvénient excuse de l’obligation de payer les autres dettes de justice, et personne n’est tenu de restituer à son grand détriment. En outre, l’époux n’est pas tenu de rendre le devoir, s’il y a crainte probable de danger ou de détriment pour les enfants déjà nés ; danger qui serait cependant vraisemblable, si des parents destitués des moyens de nourrir plus d’enfants augmentaient leur famille… Bien plus il n’y aura pas même faute vénielle à refuser le devoir dans ce cas. (Liv. IX, disp. 25, n° 3.)

Nous croyons que cet avis de Sanchez n’est pas sûr dans la pratique.


§ IV
Des époux qui pèchent mortellement en rendant le devoir conjugal

1o On pèche mortellement à rendre le devoir conjugal lorsque la pétition se fait dans un lieu sacré ou public, ou devant les enfants et domestiques (ce qui n’arrive guère), ou avec danger d’avortement, ou grave danger pour la santé de l’un ou de l’autre, ou avec le danger évident de répandre le sperme hors du vase, quand le coït pourrait se faire autrement ; ou en s’accouplant d’une façon hors nature, sodomique, etc. Il est certain que dans tous ces cas, celui qui rend le devoir pèche aussi mortellement, parce qu’il participe au crime et en contracte la malice.

2o Ce serait également une faute mortelle que de rendre le devoir à la partie atteinte d’une impuissance perpétuelle.

3o… Si l’homme était tellement décrépit, etc. (suit une citation de Bouvier, que nos lecteurs trouveront à sa place dans nos extraits des Diaconales).

4o On demande si l’on peut, sans péché mortel, rendre le devoir à celui qui le demande, bien qu’il ait fait vœu de chasteté ou qu’il se propose un but criminel.

Les uns prétendent qu’il y a péché mortel… les autres, au contraire, prétendent, — et c’est le plus grand nombre, — que la partie peut rendre le devoir.


§ V
Des époux qui pèchent véniellement en rendant le devoir

Quand l’usage du mariage est péché véniel pour l’époux qui demande le devoir par exemple, comme parce qu’il le demande pour le seul plaisir, il semble qu’il y a quelque faute à le rendre, s’il n’y a aucune raison de le faire, parce qu’alors on fournit la matière d’un péché véniel ; mais une pétition absolue est une raison suffisante et légitimant la reddition ; car il est à craindre que le refus ne fasse naître des rixes, haines, scandales, péril de pécher gravement, etc.

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ARTICLE DEUXIÈME
De l’usage du mariage, des circonstances de l’acte conjugal et des péchés qu’y commettent les époux
§ I
De l’usage du mariage et des péchés véniels qu’y commettent les époux quant aux motifs

1o L’acte conjugal exercé pour le seul plaisir est exempt de toute faute même vénielle.

2o L’usage du mariage est-il permis pour éviter l’incontinence ?

Tous les théologiens conviennent qu’il est permis de rendre le devoir à l’époux qui le demande, sans autre raison que celle d’éviter l’incontinence.

« À cause de la fornication, que chacun ait son épouse, et chaque femme son mari… Ne vous trompez pas l’un l’autre, si ce n’est par un consentement mutuel pour un temps, pour vaquer à l’oraison, et retournez-y de nouveau, de peur que Satan ne vous tente à cause de votre incontinence ; je dis cela par indulgence, et non par commandement, car je voudrais que vous fussiez tous comme moi. » (I Corinth. 4.)

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L’époux qui désire que l’acte conjugal soit stérile pèche selon l’opinion de tous les théologiens, mais seulement d’une manière vénielle.

Cependant Sœttler s’exprime ainsi :

Si quelqu’un désire n’avoir pas d’enfants, d’après un grand nombre de théologiens il pèche mortellement, parce que ce désir répugne gravement à la fin du mariage… Selon d’autres beaucoup plus nombreux, ce désir, si on s’arrête là, s’il est purement spéculatif, et si l’on ne fait rien pour empêcher la génération, est seulement véniel, mais dangereux, dit Vernier, comme tendant au péché mortel.

Tout peut donc se résumer en ces quatre paroles de Collet : « La copulation exercée pour toute autre fin que celle de la génération ou de la justice est toujours un péché. » Cette proposition est d’ailleurs fondée sur ce passage de saint Augustin :

« Le coït nécessaire pour la génération n’est pas coupable… Mais celui qui va au delà de cette nécessité n’obéit plus à la raison, mais au libertinage. Et cependant ne pas l’exiger, mais le rendre à son époux, de peur qu’il ne pèche gravement en forniquant, est une nécessité pour la personne conjugale. » (Manuel des bons époux.)


§ II
Des circonstances où l’usage du mariage est généralement péché mortel quant à l’acte, conformément à l’opinion de tous les théologiens

1o D’après tous les théologiens, il y a péché mortel si quant à la position le coït n’est pas naturel, et s’il y a grave danger d’effusion en dehors du vase, soit en demandant, soit en rendant le devoir : « Mais, en dehors de ce danger, demander ainsi ou rendre le devoir sans nécessité est un péché seulement véniel, parce qu’une telle inversion n’est pas essentielle et n’est pas opposée à la génération. Cependant elle doit être sévèrement blâmée. S’il y a nécessité d’agir ainsi, comme par exemple à cause de la grossesse, ou parce que le corps ne peut souffrir une autre position, il n’y aura aucun péché, pourvu qu’il n’y ait pas danger probable d’effusion en dehors du vase. »

2o Les époux pèchent mortellement, quand, comme nous le verrons mieux plus bas, ils excitent volontairement une semblable effusion, ou même commencent d’une façon sodomitique le coït avec l’intention de le consommer selon les règles ; car un tel acte, désordonné, tendant de soi à l’effusion hors du vase, doit être considéré comme une sodomie commencée. C’est l’avis de Sanchez, S. Liguori, Bouvier et beaucoup d’autres. Il faut ajouter que généralement les époux pèchent mortellement, s’ils ne rougissent pas d’exercer des actes très honteux et répugnant gravement à la nature et à l’honnêteté (tels que la masturbation labiale, etc.)

3o De même pèchent mortellement les époux qui de quelque façon que ce soit empêchent la génération, ou s’exposent, comme dit Collet, au danger de rejeter le fœtus par voie d’avortement, ou de le blesser gravement.

4o L’homme pèche mortellement, dit encore le savant Collet, quand il se retire et ne consomme pas l’évacuation de la semence dans le vase. De même la femme si elle élimine à dessein la semence ou s’efforce de l’éliminer, ou répand à dessein sa propre semence.

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Saint Antonin, saint Liguori, etc., etc., affirment qu’il n’y a pas péché mortel, si la copulation une fois commencée, les époux arrêtent l’effusion, c’est-à-dire, si avant l’effusion, l’homme se retire du consentement de la femme, pourvu qu’il n’y ait pas danger d’effusion au dehors du vase, ou de pollution chez l’un ou l’autre époux. Plusieurs autres, comme les RR. PP. Navarre, Ledesma, Azor, etc., pensent qu’il y a alors péché mortel, parce qu’on empêche la génération pour laquelle la copulation est faite, et qu’ainsi l’acte conjugal est frustré de sa fin essentielle, qui est la génération.

Saint Liguori demande au cas où l’homme a déjà éjaculé : si la femme pèche en se retirant ou si l’homme pèche mortellement en n’attendant pas la sémination de la femme.

Voici notre réponse : la quasi-spermatisation de la femme ne paraissant pas nécessaire à la génération, nous ne voyons pas trop la solidité des raisons qu’on apporte en faveur du péché mortel, parce que la matière qui forme la spermatisation de la femme n’est point une véritable semence, mais de simples mucosités vaginales et utérines… La femme, d’après tous les physiologistes modernes de l’Europe et du monde entier, est incapable d’une véritable sécrétion séminale ou spermatique ; elle n’a point d’organe spécial pour cela. Elle fournit seulement l’ovule ou le germe qui vient de l’ovaire, plus ordinairement une certaine quantité de mucosités ou d’humeurs lubréfiantes, qui sont l’effet de l’organisme érotique et qui sont propres à faciliter ou à compléter l’acte conjugal, mais qui ne paraissent pas du tout essentielles à la fécondation.

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De ce fait d’union sexuelle accomplie du côté de la femme avec dégoût, répugnance, une sorte d’horreur, malaise et souffrance physique, il s’ensuit que, dans ces cas de coïts froids et insensibles, il n’y a point de sémination prolifique dans le sens que l’entendent les théologiens, parce que, dans un tel acte, il est physiologiquement impossible qu’une effusion de sperme s’accomplisse sans sensation érotique ou voluptueuse de la part de la femme, comme du côté de l’homme. Donc la sémination féminine n’est pas nécessaire à la conception, puisque celle-ci peut s’accomplir sans elle par le seul fait de la sémination virile.

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Les théologiens demandent :

Est-il permis à la femme, quand l’homme s’est retiré après la sémination, de s’exciter aussitôt elle-même par des attouchements à sa propre éjaculation pour se procurer un soulagement nécessaire ?

Réponse : Nous pensons que cela n’est pas permis à la femme, parce que cette action solitaire n’a plus aucun but physiologique dans l’ordre de la procréation ni aucune relation avec l’acte conjugal, et que ce serait une véritable masturbation. Quant au soulagement ou au besoin à satisfaire, nous n’y voyons d’autre remède que la prolongation de l’acte ou un autre acte plus complet et plus normal. Les théologiens qui pensent comme nous apportent pour raison que la semence de la femme n’est pas nécessaire à la génération, et que cette effusion de la femme, étant un acte séparé, ne fait plus une seule chair avec l’homme. Saint Liguori ajoute : Si on le permettait aux femmes, il faudrait aussi le permettre aux hommes, dans le cas où la femme se retirerait après sa sémination, et où l’homme resterait en état d’irritation. (Livr. 6, no 219.)

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« Quoique la semence de la femme, dit Sanchez, ne soit pas nécessaire à la génération, cependant elle aide beaucoup à la rendre plus facile… Il n’est pas nécessaire que les deux époux sèment ensemble. C’est pourquoi pendant que l’homme sème, il n’est pas du tout tenu à attendre l’effusion de la femme. La preuve en est que Galien et d’autres enseignent que la semence de la femme n’est pas nécessaire, et ne concourt pas activement à la génération, etc. » Un grand nombre d’auteurs sont ici cités enseignant tout ce que Sanchez vient d’établir, à savoir que la semence de la femme n’est pas nécessaire à la génération… Sanchez ajoute : « et beaucoup d’autres, et toute l’école des théologiens (excepté les disciples de Scot) »… Ce qui le prouve encore, c’est que d’après l’expérience les femmes conçoivent même malgré elles, en recevant dans le bain la semence virile (ce qui est fabuleux et faux) ; car alors elles ne sèment en aucune façon, autrement elles ne pourraient pas ressentir une très grande délectation vénérienne… Donc, puisque la génération a lieu sans cette semence, même lorsque la sémination a lieu après le coït, il n’y a aucun précepte qui oblige à semer en même temps. On ne peut faire valoir contre cette conclusion que cette sémination simultanée est plus favorable à la génération. Parce que les époux ne sont pas tenus à choisir la voie la plus convenable et la plus favorable à la génération, mais il leur suffit de ne point s’y opposer.

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Les époux pèchent mortellement, s’ils s’accouplent avec une affection adultère et fornicatrice, c’est-à-dire, si l’homme en voyant son épouse désire et ait l’intention de s’accoupler avec une autre femme qu’il se représente ; il en est de même de l’épouse, quand elle songe à un autre homme. Tous les deux commettent l’adultère dans leur cœur. Il n’y a rien de plus honteux, dit saint Jérôme, que d’aimer une épouse comme une adultère. De même ils pèchent mortellement s’ils exercent le coït pour une fin gravement mauvaise, par exemple, pour faire mourir la femme en couches.

Les époux pèchent encore mortellement s’ils se livrent au coït devant témoins, à cause du grand scandale ; ils doivent donc prendre garde que d’autres personnes ne couchent dans leur chambre. Les pauvres et les paysans qui n’ont souvent qu’une seule chambre à coucher pour eux, leurs enfants et leurs domestiques, doivent veiller attentivement, le jour et la nuit, à ce que, en usant de leurs droits, ils ne soient pas pour les autres une occasion de scandale.


§ III
Des attouchements entre époux

1o …Tous baisers, attouchements, embrassements, regards, entretiens obscènes entre époux, en dehors du danger de pollution et dans les limites de l’honnêteté naturelle, sont licites, s’ils se font dans l’intention du coït ; ce ne sont que des péchés véniels, si l’on s’y arrête, sans se proposer le coït. J’ai dit : dans les limites de l’honnêteté naturelle, parce que cette indulgence n’est donnée aux époux, qu’en tant que les actes susdits sont ordonnés selon la nature et la droite raison en vue d’un coït naturel et humain ; et ils sont plus ou moins peccamineux selon qu’ils s’écartent plus ou moins de ces limites. Les époux transgressent gravement ces limites quand ils commettent quelque acte sodomique, ou en agissant avec le danger de la pollution ; hors de ces deux cas, quelque honteux que soient les actes, ils ne paraissent pas excéder le péché véniel (De la luxure, dissert. 6, art. 19).

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En dehors de ces deux cas, tous les actes honteux ne semblent pas excéder le péché véniel, dit aussi Sanchez.

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Les actes tendant à un coït légitime, sans danger de pollution, sont sans aucun doute licites, ce sont comme les accessoires du coït ; la copule étant licite, ils ne peuvent être illicites. Si cependant ils se faisaient en vue d’une plus grande délectation, quoique tendant au coït, ce serait des péchés véniels, à cause de la fin véniellement mauvaise. Mais s’ils étaient gravement opposés à la droite raison, quoique faits en vue du coït, ils seraient des péchés mortels ; car des époux chrétiens ne doivent pas agir comme le cheval et le mulet qui n’ont pas d’intelligence (Ps. 31, 11) ; mais chacun doit posséder son vase dans la sanctification et l’honneur, non dans la passion du désir, comme les païens qui ignorent Dieu (1re épître aux Thessal. 4, 4).

D’après l’opinion la plus commune et la plus vraie, dit saint Liguori, il n’y a pas péché mortel dans les attouchements et regards déshonnêtes entre époux pour le seul plaisir, sans rapport à la copule, pourvu qu’il n’y ait pas danger de pollution. « La raison en est que l’état conjugal, de même qu’il légitime, la copule légitime aussi ces actes et regards ; car autrement, la société entre époux étant si étroite, et comme ils ne peuvent si souvent s’accoupler, ils seraient exposés à de continuels dangers, si de tels actes étaient gravement illicites. »

De tout ce qui précède, il résulte que les attouchements exercés entre époux sont péchés mortels s’ils sont accompagnés du danger prochain de pollution, car cette contamination corporelle n’est pas moins criminelle chez les gens mariés qu’elle ne l’est dans les personnes libres.

2o Maintenant, toute la question controversée par les théologiens se réduit à ceci : les actions déshonnêtes sans danger prochain de contamination corporelle et sans intention ni relation à l’acte conjugal sont-elles entre époux péché mortel ou véniel ?

Plusieurs auteurs, entre autres saint Antonin, Sylvester et quelques autres auteurs encore cités par Sanchez affirment qu’il y a péché mortel parce qu’elles tendent essentiellement à la pollution, par cela seul qu’elles ne se rapportent pas à l’acte conjugal ; car, ajoutent-ils, tout acte vénérien qui ne se rapporte pas à l’acte conjugal est péché mortel.

Suivant Sanchez, Busembaum, saint Liguori, Layman, Bonacina, Lessius, Sporer, Diana et un grand nombre d’auteurs cités par saint Liguori et Sanchez, enfin, suivant l’opinion commune, les actions déshonnêtes comme attouchements, regards, etc., entre époux, sans relation à l’acte conjugal et aussi sans danger prochain de pollution ne sont que des fautes vénielles, parce que, pouvant être exemptes de péché si elles étaient rapportées à leur fin légitime, qui est l’acte conjugal, elles ne deviennent péché mortel que par le manque de cette fin légitime.

Il faut pourtant faire ici une distinction : c’est qu’il faut regarder comme cause du danger prochain de pollution, ou même comme une pollution commencée, les actes considérablement, énormément déshonnêtes ou infâmes, mentionnés ci-dessus, soit, comme dit Sœttler, parce que de tels actes sont ordinairement accompagnés du danger de pollution ; soit parce qu’ils répugnent singulièrement à la nature raisonnable, et qu’ils ne peuvent être rapportés en soi à la copule, et que pour cela ils ne semblent pas pouvoir être excusés de faute grave à cause de l’état de mariage.

C’est avec raison que M. Rousselot, le commentateur de Sœttler, a fait la remarque suivante : « L’expérience prouve que les pécheurs ne se résignent à avouer ces attouchements qu’avec beaucoup de peine, et s’ils les taisent par honte, en sont beaucoup plus tourmentés. Donc les époux considèrent naturellement ces attouchements comme déshonorant grandement la créature raisonnable. »

Tout ce que nous avons dit sur cette matière peut se résumer en ce seul passage de saint Liguori :

— Je pense qu’il est plus probable que les actes honteux entre époux avec danger de pollution, soit en demandant le devoir, soit en le rendant, sont mortels ; à moins que les époux ne les fassent pour s’exciter à une copule prochaine, parce qu’ayant droit à la copule ils ont aussi droit à de pareils actes, quand même une pollution accidentelle précéderait la copule. Mais je pense que des attouchements même pudiques sont des péchés mortels, s’ils se font avec danger de pollution, par exemple, avec la langue, sur le pénis ou sur le clitoris, vu que, dans ce cas, l’attouchement s’exerce pour la seule volupté ; il en serait autrement si c’était pour un grave motif, comme par exemple s’il y avait un motif urgent de donner des signes d’affection pour réchauffer le mutuel amour, ou si un des conjoints voulait empêcher l’autre de soupçonner qu’il aime quelque autre personne. (Liv. vi, n° 934.)

3o Quant aux attouchements et regards sur son propre corps, libidineux et déshonnêtes, sans danger de pollution en l’absence du conjoint, ou dans un temps ou un lieu où le coït ne peut avoir lieu, d’après Sanchez et d’autres qu’il cite, il n’y a que péché véniel, parce que ces actes, disent-ils, sont secondaires et tendent au coït licite, quoiqu’ils n’atteignent pas leur fin légitime.

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L’opinion contraire nous paraît plus sûre et doit être maintenue dans la pratique parce que l’époux, dit saint Liguori, n’a pas droit sur son propre corps per se, mais seulement par accident, en tant seulement qu’il puisse se disposer à la copule ; d’où il suit que la copule n’étant pas possible alors, les attouchements sur lui-même sont tout à fait illicites ; et parce que l’attouchement des parties génitales, quand il a lieu morosement et avec commotion des esprits, tend de soi à la pollution et en entraîne le prochain danger. (S. Liguori, l. vi, no 936.)


§ IV
Du péché d’Onan et de l’onanisme en général

Tout le monde sait que l’onanisme conjugal, aujourd’hui l’écueil, le fléau, la désolation du mariage, est le crime d’Onan : « Il répandait à terre son sperme pour n’avoir pas d’enfants, » dit la Genèse.

Établissons maintenant quelques propositions certaines et admises par tous les théologiens :

1o Un homme qui imite la conduite d’Onan, par quelque motif que ce soit, commet un crime énorme, et est incapable d’absolution tant qu’il persévère dans sa mauvaise habitude.

2o La femme qui engage son mari à en agir ainsi ou qui consent à cette action injurieuse à la nature et contraire à la fin du mariage, ou qui, enfin, à plus forte raison s’oppose elle-même à l’accomplissement de l’acte conjugal, commet également un péché mortel, et, comme son mari, elle est indigne d’absolution tant qu’elle demeure dans cette criminelle habitude.

3o La loi de charité impose à la femme le devoir de faire tout ce qui dépend d’elle pour empêcher que son mari, qu’elle sait être disposé à mal faire, ne fasse l’action détestable d’Onan.

4o La femme est tenue de rendre le devoir si son mari, dûment averti, promet de consommer l’acte conjugal de la manière qu’il y est obligé, si toutefois cette promesse est faite sérieusement et que la femme puisse juger prudemment que tout se passera de la manière ordinaire et normale.

Maintenant, la difficulté est de savoir si la femme peut, en sûreté de conscience, rendre le devoir lorsqu’elle est assurée par l’expérience que, malgré ses avertissements, ses prières et toutes ses instances possibles, son mari coïtera à la manière d’Onan.

À cet égard, quatre opinions se sont établies : la première est celle des théologiens qui soutiennent que la femme ne peut rendre le devoir même pour éviter la mort :

1o Parce que, disent-ils, l’action du mari étant essentiellement mauvaise, la femme participera à son péché dont elle fournit l’occasion prochaine ; 2o parce que le mari ne se propose pas de faire un acte conjugal, mais de se servir du ministère de sa femme pour s’exposer à la souillure ou à la contamination criminelle ; 3o parce que si le mari demandait à sa femme son concours pour un acte sodomique, elle devrait s’y refuser, même au péril de sa vie ; 4o parce qu’enfin la femme coopère aussi directement au crime de son mari qu’un homme participe au larcin d’un voleur en tenant le sac pour y recevoir les objets volés. — Ainsi pensent Hubert, les rédacteurs des Conférences d’Angers et des Conférences de Paris, Collet, avec plusieurs docteurs de la Sorbonne, Bailly, Vernier, etc.

Cette opinion, il faut l’avouer, paraît fortement établie ; elle est fort grave et de nature à faire beaucoup d’impression sur les esprits. Les confesseurs qui la suivent refusent constamment l’absolution à toutes les femmes qui dans de pareilles circonstances rendent le devoir à leurs maris. Mais voici les raisons qu’on peut lui opposer :

1o La femme, dit-on, en obéissant à son mari participe au péché dont elle fournit l’occasion. — À cela, on peut répondre que la femme fait une chose permise, qu’elle use de son droit, dont elle ne doit pas être privée par la dépravation et la corruption de son mari…, que sans consentir à l’action détestable de son mari elle ne fait que se prêter passivement, par devoir et par obéissance conjugale, à un acte qui, de sa part, est dans l’ordre naturel.

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2o On dit encore : le mari, dans cette hypothèse, ne demande point un acte conjugal, mais seulement la coopération de sa femme à une action criminelle. — On peut répondre que cela n’est pas rigoureusement exact, car la souillure, dans ce cas, n’est pas une véritable masturbation ; car la spermatisation externe peut, par une circonstance heureuse, produire quelquefois un heureux effet, en ce sens qu’elle ne sera pas alors complètement extra-vaginale.

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3o On prétend que le cas dont il s’agit n’est en réalité qu’un acte sodomique, et que, par conséquent, la femme ne peut y consentir, même pour éviter la mort. — On peut répondre à cela qu’un acte sodomique est toujours nécessairement stérile et que vouloir confondre une action naturelle et permise à la femme avec un acte de sodomie, c’est confondre les termes, changer l’acception des mots et le moyen assuré de ne plus s’entendre sur rien.

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4o On dit que la femme coopère au crime de son mari de même que le complice participe au vol en tenant le sac pour y recevoir les objets volés. — On peut répondre qu’il n’y a ici aucune espèce de parité, car la femme use de son droit de justice, et celui qui favorise le vol n’a, à cet effet, aucun droit ni aucun titre légitimes.

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Saint Liguori affirme que la femme, dans ces circonstances, doit non seulement rendre le devoir, mais même qu’elle y est obligée.

— « Il semble, dit-il, plus probable que l’épouse non seulement peut rendre le devoir, mais qu’elle y est tenue. La raison en est que la faute étant du côté de celui qui demande, puisqu’il a droit à la copule, l’autre ne peut sans injustice le lui refuser, si elle ne peut en paroles le détourner de cette faute ; et alors il est évident qu’en le rendant elle ne coopère pas, même matériellement, à son péché, puisqu’elle ne coopère pas à la sémination en dehors du vase, mais seulement au commencement d’un coït licite en lui-même pour tous les deux. (Liv. vi, n° 947.) »

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— Une pieuse épouse peut-elle se laisser approcher de son mari quand elle sait par expérience que son mari se conduit comme Onan… surtout si l’épouse en refusant s’expose au danger de sévices, ou craint que son mari ne voie des prostituées ?

La Sacrée Pénitencerie a répondu le 23 avril 1822 : Dans le cas proposé, la femme de son côté ne faisant rien contre nature et laissant faire une action licite, toute la malice de l’acte venant de celle du mari, qui au lieu de consommer l’acte se retire et répand sa semence hors du vase ; alors, si la femme, après les admonestations voulues, n’obtient rien, et que le mari insiste en la menaçant de coups ou de la mort, ou d’autres graves sévices, elle pourra (selon de graves théologiens) se laisser faire sans péché ; car alors elle ne fait que permettre le péché de son mari, et cela pour un grave motif qui l’excuse, parce que la charité, qui l’obligerait à l’en empêcher, n’oblige pas avec un si grand inconvénient.

— Berthe a un mari qu’elle sait par une constante expérience être onaniste. Elle a essayé en vain tous les moyens pour le détourner d’un si affreux crime ; bien plus, elle est menacée probablement des plus graves dangers, qu’elle ne pourrait éviter qu’en fuyant de la maison de son mari, si elle ne permet pas au moins quelquefois l’abus du mariage.

La Sacrée Pénitencerie, aux dates des 15 novembre 1816 et 1er février 1823, a répondu :

De graves et austères théologiens sont d’avis que l’épouse peut rendre le devoir à son mari si son refus doit la faire maltraiter par lui et qu’elle ait à craindre quelque grave inconvénient ; car, disent-ils, dans ce cas, l’épouse n’est pas sensée coopérer formellement au péché de son mari, mais seulement le permettre pour une cause juste et raisonnable. Il faut cependant l’avertir de ne pas cesser d’inviter prudemment son mari à éviter cette turpitude.

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CONSULTATION
Sur certaines propositions touchant l’onanisme

On demande au Saint-Siège quelle note théologique il faut appliquer aux trois propositions suivantes :

1o Pour des raisons honnêtes les époux peuvent user du mariage à la façon d’Onan.

2o Il est probable que cet usage du mariage n’est pas défendu par le droit naturel.

3o Il ne convient jamais d’interroger sur ce sujet les époux de l’un et de l’autre sexe, quand même on aurait raison de craindre que les époux n’abusent du mariage.

Réponse, 4 mai 1851.

À la première : cette proposition est scandaleuse, erronée et contraire au droit naturel.

À la deuxième : cette proposition est scandaleuse, erronée, et d’ailleurs implicitement condamnée par le pape Innocent IX, proposition 49e. (La pollution n’est pas défendue de droit naturel, d’où il suit que si Dieu ne l’avait pas interdite elle serait souvent bonne, et quelquefois obligatoire sous peine de péché mortel.)

À la troisième : proposition fausse, trop relâchée et dangereuse en pratique.
Angelus Argenti,
Notaire de la Sainte Inquisition romaine universelle.


ARTICLE TROISIÈME
De la conduite des confesseurs à l’égard des personnes mariées et de celles qui se disposent à entrer dans l’état de mariage

Un confesseur ne saurait trop se pénétrer de la connaissance des nombreuses et difficiles obligations des époux, qui ont été exposées dans le cours de cet ouvrage. Il faut surtout qu’il les leur représente et les leur inculque suivant l’occasion et le besoin. Il doit se rappeler que les fautes les plus graves et les plus ordinaires des personnes mariées sont les refus injustes du devoir conjugal, l’empêchement ou l’obstacle que l’on apporte volontairement à la génération par les actes onaniques, sodomiques et quelques autres pratiques secrètes plus rares et connues seulement de quelques femmes et de quelques hommes profondément corrompus : manœuvres sataniques d’autant plus difficiles à découvrir que tout se passe à l’extérieur comme dans l’état ordinaire et normal. Le peu de mots qu’il nous a été possible de dire sur ces infernales inventions doit suffire aux confesseurs pour les mettre sur la voie de l’investigation.

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Les confesseurs devront se rappeler que les gens mariés des deux sexes pèchent encore plus souvent qu’on ne pense de la manière que pèchent les personnes libres : la masturbation solitaire ne leur est pas toujours inconnue, ou ils ne l’ont pas complètement oubliée. Il est donc du devoir d’un sage confesseur de chercher avec soin à découvrir les nombreuses et hideuses plaies de toutes les âmes plongées dans la matière et souvent même dans la plus infecte corruption. À cet effet, il lui sera souvent nécessaire de faire des interrogations indispensables.

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Quant à l’abominable crime d’onanisme qui se répand partout dans ces malheureux temps, et dont se souillent si honteusement les époux, surtout plus jeunes, que le confesseur leur demande s’ils n’ont aucun remords au sujet de l’acte conjugal, et s’ils ne craignent pas d’avoir trop d’enfants, si dans le coït ils n’ont rien fait pour empêcher la génération, s’ils n’ont rien commis de honteux en dehors de l’acte, etc. Qu’il ajoute qu’il lui est pénible de faire de telles questions et de toucher de telles matières, mais que cela est nécessaire, pour qu’ils sachent ce qui leur permis ou non ; autrement il leur arriverait de commettre très souvent de très graves fautes par une ignorance inexcusable. Beaucoup, en effet, comme nous l’avons déjà dit, s’imaginent faussement que dans le mariage tout leur est permis, et qui, par des péchés que peut-être ils regardent comme légers, encourent la damnation éternelle.

« Le vice d’onanisme découvert, le confesseur ne peut absoudre le coupable, qu’à condition qu’il se repente de son péché, et ait le ferme propos de ne plus pécher à l’avenir. S’il est incorrigible, le confesseur doit lui refuser l’absolution.

» Quant à la femme qui induit son mari à cette action, ou y consent, ou qui se retire elle-même, malgré son mari, le confesseur ne peut l’absoudre que dans le cas d’une vraie douleur et du ferme propos. Si elle en a l’habitude, on ne peut l’absoudre en aucune façon. C’est pourquoi il faut interroger à ce sujet les femmes qui sont cause que leurs maris se souillent de l’onanisme, et il faut les avertir sérieusement qu’elles sont tenues par la loi de la charité à les détourner de ce crime. Cependant dans le doute si le mari averti agira bien ou mal, la femme peut rendre le devoir, bien plus, elle y est tenue ; car dans le doute un droit certain ne peut-être refusé. » (M. Rousselot.)

Chez certaines femmes on peut se prendre de la manière suivante : on feint d’entrer dans quelques détails relatifs aux enfants de la pénitente, car très souvent ce sont les femmes elles-mêmes qui ne veulent pas la fin du mariage ; on l’interroge sur la manière dont elle les élève et s’ils le sont chrétiennement, etc. — On ajoute ensuite : « Vous seriez sans doute heureuse si Dieu vous en donnait encore d’autres pour les élever de même, afin qu’il vous procurassent de nouvelles et abondantes consolations ? » Souvent à ces derniers mots il leur échappe cet aveu involontaire : « Ah ! mon Dieu, j’en ai déjà bien assez ! — Cette réponse vous instruit suffisamment et vous dispense d’en dire davantage.

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Il est du devoir des confesseurs de dire aux personnes qui sont sur le point de contracter mariage les graves obligations du nouvel état qu’elles vont embrasser. Il sera bon de leur dire que le mariage n’a pas été institué au profit de la passion grossière de la chair, mais pour donner à Dieu et à l’Église des enfants qui deviennent un jour des saints et des habitants du ciel. — On peut ajouter qu’un très grand nombre d’époux s’abusent, se font illusion sur l’état de mariage et se persuadent faussement que tout leur est permis, s’y conduisent comme des êtres sans raison et s’abandonnent sans frein et sans mesure à l’entraînement de leur passion, et qu’ainsi, ils commettent un grand nombre de péchés et se perdront très probablement.

Pour leur éviter un aussi grand malheur dans l’autre vie et d’abord tous les maux de celle-ci qui y conduisent, il faut que le confesseur ait grand soin de leur inculquer cette grave et capitale vérité, savoir : que tout ce qui conduit à la fin du mariage, tout ce qui est dans l’ordre de la procréation et de la génération des enfants est permis ; tout ce qui est contre cette fin de la génération est illicite ou défendu sous peine de péché mortel ; enfin tout ce qui n’est ni suivant ni contre cette fin, par exemple les baisers, les étreintes et tant d’autres familiarités conjugales sont ou péchés véniels, lorsqu’ils sont uniquement faits dans un but voluptueux, ou n’entraînent pas péché lorsqu’ils proviennent d’une affection mutuelle ou du simple désir d’entretenir ou réchauffer l’amour conjugal, à condition toutefois qu’il n’y ait pas péril de pollution. Tout donc peut se résumer sous cette courte formule : ce qui se fait pour la fin est permis, contre la fin est péché mortel ; ni pour ni contre la fin est ou péché véniel ou nul péché.

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Le confesseur doit encore interroger les époux au sujet des attouchements impudiques ou autres infamies qu’ils commettent souvent entre eux. Il peut commencer ainsi : « N’avez-vous rien fait avec votre conjoint en dehors des choses permises par le mariage, c’est-à-dire des choses nécessaires à la génération ? » S’il répond qu’il y a eu quelque chose de tel, il faut demander en quoi il consiste, et l’amener à déclarer enfin s’il y a eu des attouchements ou des exercices honteux ; il faut demander s’il y a eu pollution, ou danger de la souffrir ou de la procurer.

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  1. Ce mot vient du substantif latin mœchia qui veut dire luxure, fornication, concubinage, et du substantif grec logos, qui veut dire : discours, science, traité. Mœchialogie signifie donc : Cours de luxure ou Science de la fornication.
  2. Le R.-P. Charles-René Billuart est un célèbre théologien et prédicateur, né en 1685, mort en 1757. Il était provincial de l’Ordre des Dominicains, c’est-à-dire le chef des dominicains de France.