Les Mystères du confessionnal/Épilogue

Imprimerie E.-J. Carlier (p. 117-118).



ÉPILOGUE


Origine de la Confession


La confession proprement dite, sacramenttelle, auriculaire, obligatoire, ne remonte pas au delà du XIIIe siècle ; elle fut imposée aux fidèles catholiques par le concile de Latran, en 1215, sous Innocent III, et érigée en dogme par le concile de Trente.

Cette pratique n’était pas une invention du christianisme ; la confession était en vigueur chez les races antiques de l’Inde, treize mille ans avant notre ère. « Boudha institua la confession pour les religieux et même pour les fidèles. Deux fois par mois, à la nouvelle et à la pleine lune, les religieux confessaient leurs fautes en présence de Boudha et devant l’assemblée des fidèles, à haute voix. Ce n’était que par le repentir et par la honte, dans le for intérieur et devant les autres, — comme au temps de la primitive Église — qu’on pouvait obtenir le pardon de ses fautes. Des rois puissants confessèrent au Boudha des crimes qu’ils avaient commis, et ce fut au prix de ces pénibles aveux que les coupables obtinrent leur pardon. » Barthélémy St-Hilaire. Boudha et sa religion.

« Dans l’ancienne religion de Zoroastre on trouve des préceptes et des pratiques relatifs à la confession, parfaitement identiques avec ce qui s’est observé à différentes époques dans la religion chrétienne. Ainsi on y reconnaît l’aveu et le pardon public des péchés, la confession auriculaire faite aux prêtres, la pénitence qu’ils imposent et l’absolution qu’ils donnent aux pécheurs ; enfin, on y trouve une espèce de pape auquel Dieu est censé avoir donné les clés du ciel. » Anquetil-Duperron. Zend-Avesta.

« Chez les Indiens sectateurs du Brahmanisme, les Gourous, qui sont les directeurs des consciences, peuvent remettre tous les péchés. Les formules qu’ils emploient rappellent celles du Rituel romain et ont dû servir de modèles aux prêtres catholiques. L. Jacolliot. Les fils de Dieu.

« Environ sept mille ans avant le Christ, la confession est introduite en Égypte par le législateur indien Manou, qui prend en Afrique le nom de Manès. » L’abbé Dubois. Mœurs et institutions des peuples de l’Inde.

« Chez les Grecs et chez les Romains il y avait un simulacre de confession, mais cette pratique revêtait le caractère de confidence ; c’était le déversoir des peines de l’âme. On n’attribuait pas aux prêtres le pouvoir de remettre les fautes. Plutarque raconte qu’un hiérophante, — prêtre — de Lacédémone, s’étant approché d’un guerrier mourant pour le confesser, celui-ci l’avait interpellé ainsi : À qui dois-je faire l’aveu de mes fautes ? — À Dieu, avait répliqué l’hiérophante. Alors, avait riposté le Spartiate, retire-toi donc, ô homme, tu n’es pas la divinité. » Lasteyrie. Histoire de la confession

L’Évangile ne contient aucune prescription de la pratique de la confession, pas même un indice ; les docteurs protestants ont démontré qu’il n’en a jamais été fait usage dans les premiers siècles de l’Église.

On voit poindre cette institution au VIe siècle, mais sous les modes suivants :

1o Elle avait lieu, selon une formule générale faite par chacun des fidèles ou par le prêtre au nom de l’assemblée ;

2o Ou par l’aveu des fidèles fait à celui ou à celle à qui un préjudice avait été occasionné, en vue d’une réconciliation ou de la réparation du tort éprouvé ;

3o Ou par une simple confidence faite par un coupable qui éprouvait des remords et avait besoin des conseils d’un pasteur ou d’un ami expérimenté ;

4o Ou par l’aveu public que l’Église imposait aux pécheurs pour des fautes dont ils désiraient obtenir le pardon. La confession devait être faite dans le temple même et devant l’assemblée des fidèles.

Dans le cours du VIe siècle, on crée à Constantinople la charge de pénitencier ; mais un seul prêtre en remplit les fonctions.

Ce personnage avait pour mission d’écouter les confessions faites publiquement, d’admonester les coupables et de les réconcilier avec les personnes qu’ils avaient offensées. Saint Jean Chrysostôme, dans son homélie, De incomprehensibili dei naturā, apporte son témoignage contre l’usage de la confession : « Je vous exhorte, je vous prie et vous supplie de vous confesser à Dieu ; ce n’est pas moi qui vous condamnerai à révéler vos péchés aux hommes. Il vous suffit de déployer votre conscience devant Dieu. Montrez-lui les plaies de votre âme et demandez-lui en la guérison. Montrez-les à celui qui ne réprimande point, mais qui guérit. Vous n’avez même pas besoin de parler puisqu’il connaît les choses les plus secrètes. »

Saint Augustin réprouve toute espèce de confession faite aux hommes :

« Qu’ai-je besoin que les hommes entendent ma confession, comme s’ils pouvaient porter remède à toutes mes fautes ? » Confessions, Livre X, Chapitre III.

Saint Jérôme n’est pas moins explicite que Chrysostôme et Augustin : « Il est bon de confesser ses péchés, non aux hommes, mais à Dieu seul qui peut nous guérir. » Édition de Martigny, 1699.

Au VIIe siècle, à la suite des invasions des moines bénédictins sortis du Mont-Cassin, en Italie, et répandus en Occident, un abbé imagina d’imposer à ses religieux l’obligation de faire l’aveu de leurs fautes au supérieur, chaque jour ; on appela cette coutume la coulpe. C’était un moyen de surveillance et d’espionnage que beaucoup de chefs de monastères apprécièrent et adoptèrent dans leurs moustiers. Les abbesses introduisirent la coulpe dans les couvents de femmes et confessèrent les religieuses.

La coutume s’étendit de proche en proche ; des monastères elle gagna le monde des fidèles ; le système d’espionnage, par la confession, était favorable au clergé catholique ; les prêtres, d’accord avec les moines et les religieux de tous les ordres, s’occupèrent de réglementer l’institution. Ce fut le travail lent, mais incessant, de plusieurs siècles.

En 1215, sous le pontificat d’Innocent III, le IVe concile de Latran, le XIIe concile œcuménique, rendit obligatoire la confession auriculaire. Il fut décidé que les curés seraient tenus de promulguer en chaire, à l’office du quatrième dimanche du carême : « Que tout fidèle de l’un et de l’autre sexe, parvenu à l’âge de discrétion, devait confesser seul tous ses péchés exactement, au moins une fois l’an, à son propre pasteur ; qu’il devrait accomplir la pénitence qui lui serait imposée et recevoir avec respect, au moins à Pâques, le sacrement de l’Eucharistie, sinon que l’entrée de l’Église lui serait interdite pendant sa vie ; et, à sa mort, il devait être privé de la sépulture des chrétiens. » Conc. L., sess. XXIII, c. 7.