Les Littératures de l’Inde/Partie I/Chapitre 2

Les Littératures de l’Inde : sanscrit, pâli, prâcrit
Hachette (p. 37-49).

CHAPITRE II

LES BRÂHMANAS


Les Brâhmanas et leurs annexes, énormes volumes de prose rarement entremêlée de vers, font, on l’a vu, partie intégrante du Véda ; mais ils sont postérieurs aux Védas proprement dits, en ce sens du moins que les parties les plus anciennes des recueils brahmaniques doivent être contemporaines des plus récents hymnes des Védas. La rédaction et la compilation de cette immense littérature s’espacent sans nul doute sur une durée de trois à quatre siècles, sinon davantage.

Chaque Véda a son Brâhmana : la plupart en ont même plusieurs, car chacune des grandes écoles de théologie a possédé le sien ; mais tous ne sont pas connus, et ceux qui le sont ne sont pas tous publiés, ce qui à peine est un dommage, car ils se copient ou se répètent fastidieusement. Au Rig Véda se rattachent l’Aitarêya et le Kausîtaki, noms propres d’écoles ; à l’Atharva, le Gôpatha ou « Chemin des Vaches » ; au Sâma-Véda, le Tândya et divers autres, dont un rituel de magie (Sâmavidhâna). Le Yajur Véda est à lui-même son propre Brâhmana ; car dans l’une de ses recensions, celle qui est dite « la noire », les stances et le texte explicatif s’entrelacent pêle-mêle ; mais de « la blanche) on a extrait à part un traité considérable d’étendue et d’importance, « les Cent Voies » ou le Çatapatha.

Les Brâhmanas sont des traités techniques de théologie, destinés à faire comprendre à chacun des célébrants du grand culte, selon son office, le sens intime des vers qu’il récite, des mélodies qu’il chante, des manipulations qui lui incombent p. 18). Ces détails matériels, ils ne les exposent point ; ils les supposent connus, comme ils l’étaient en effet de tout prêtre digne de ce nom : ils se bornent à en dégager l’esprit, à grand renfort de commentaires verbeux, de jeux de mots étymologiques et de subtilités qui confinent à l’extravagance. Aussi nous seraient-ils inintelligibles, si eux-mêmes n’avaient été abondamment commentés et n’étaient complétés par les Sûtras dont il va être question.

Au Brâhmana s’annexe d’habitude un Âranyaka ou « livre de la forêt », c’est-à-dire « qu’il faut étudier et méditer dans la solitude ». Ces deux genres d’ouvrages, au surplus, ne diffèrent point, à une nuance près d’ésotérisme mystique plus marquée dans le second.

Ce caractère s’exagère, et le mysticisme tourne au monisme panthéistique, dans l’upanisad ou « leçon intime », produit suprême de la réflexion dissolvante de l’âge brahmanique. Qu’on se représente, moins la rigueur de la méthode syllogistique, la Somme de S. Thomas qui se clorait par les Principes de Spinoza : c’est assez l’impression que produit un Brâhmana suivi de son Upanisad ; mais telle est la largeur ou l’indifférence de la pensée religieuse de l’Inde, que ce premier et parfois sublime balbutiement de la négation philosophique passe pour le dernier mot de l’orthodoxie.

Le Sûtra, dont la langue c’est déjà presque plus védique, est un ouvrage à part, un catéchisme sans demandes comme l’Inde seule sans doute en a connu. Quand la liturgie fut devenue trop touffue ou la mémoire plus rebelle, on éprouva le besoin de fixer les règles, et on le lit sous forme de versets courts et prégnants, qui se suivent en se commandant ou s’amendant les uns les autres, en un tel enchevêtrement qu’une glose savante et continue suffit à peine à en donner la clef. Les Sûtras — il y en a autant que d’écoles védiques — forment ainsi une mnémotechnie infiniment concise, soit de la liturgie du grand Culte (kalpa), soit de celle des menues pratiques quotidiennes el sacrements domestiques (grhya) : tel verset d’un seul mot y vaut une page de prescriptions ; un monosyllabe, — « et », « ou », — peut enfermer un monde de significations variées. Une fois le procédé soûtrique créé en vue de la liturgie, l’Inde en fut si satisfaite qu’elle t’appliqua aux objets les plus divers : à la grammaire (Pânini)[1], à l’astrologie, à la médecine, aux arts libéraux, et même, avec une impudeur raffinée, aux relations sexuelles !


1. — LA RELIGION BRÂHMANIQUE


Puisque les Brâhmanas font corps avec les Védas, il peut sembler étrange de lire que le brâhmanisme diffère déjà fort sensiblement du védisme ; rien pourtant n’est plus vrai. Entendons-nous : il va de soi que le brâhmanisme n’en convient point, ni l’Inde religieuse à sa suite ; mais un type religieux qui évolue est rarement ce qu’il croit être ; nous en avons ici la preuve palpable et éclatante.

La façade est restée la même. Les Dieux du Véda sont aussi ceux du Brâhmana ; il les a recensés avec cette méticuleuse apparence de précision qui le caractérise ; à chacun et à chaque groupe de déités il a assigné son rôle et son lot dans le système compliqué des oblations. La religion, sans doute, a pris un aspect moins naturaliste et plus formaliste : les personnages franchement mythiques, comme l’Aurore et ses garçons d’honneur, les deux Cavaliers jumeaux (Açvins), ne figurent plus que dans les préliminaires du sacrifice ; ceux au contraire où le mythe se voile jusqu’à cesser d’être intelligible, passent au premier plan, et Visnu, par exemple, sans prétendre au rang considérable qu’il occupera dans la suite, tient une place hors de toute proportion avec l’indigence de sa légende védique[2]. Mais ce sont là, somme toute, de simples nuances : d’ensemble, et à ne s’en rapporter qu’aux dehors, le brahmanisme ne fait qu’un avec la religion védique.

Regardons-y de plus près : tous les dieux, il est vrai, sont là, visibles et tangibles, et pourtant on saisit le travail de la réflexion spéculative qui bien tôt les dissipera en fumée ; ils rentrent à volonté les uns dans les autres, ils ne sont guère plus que des symboles. « Ceci esl la même chose que cela » : c’est la formule qui revient à tout moment dans tous les Brâhmanas : tandis qu’ils accusent une tendance mystique à multiplier le nombre des dieux, en déifiant une foule d’entités qui dans le Véda ne paraissent avoir qu’une personnalité métaphorique, — le Sacrifice, l’Année, etc., — ils le réduisent indéfiniment, au contraire, en enseignant que toutes ces entités se confondent entre elles et avec les dieux en chair et en os que célèbrent les hymnes. Rien de tout cela, bien entendu, n’est systématisé : le théologien éparpille ses identifications arbitraires, tantôt l’une, tantôt l’autre, au gré d’une pensée aussi peu fixée que celle du rêve ; mais, du jour où interviendra là dessus la puissante synthèse des Upanisads, toute cette grenaille fera balle, et le panthéon védique se trouvera, par une série indéfinie d’équations plus ou moins probantes, réduit tout entier, lui et l’univers, à l’unité pure. Les Brâhmanas, certes, n’en sont point encore là ; mais ils s’y acheminent rapidement, et leurs chapitres les plus récents y sont parvenus.

Cette unification ne s’opère point abstraitement, mais sous le couvert surtout d’un dieu nouveau que les Védas propres connaissent à peine : Prajâpati « le Maitre des créatures ». De ce nom, en quelque sorte commun, qui pourrait dans les Védas décorer n’importe quel dieu, les Brâhmanas ont fait un être suprême, préexistant à tous les dieux et à l’ordre de l’univers : il ne les a pas créés, mais engendrés ou, si l’on préfère, fait émaner de sa propre substance : ce qui revient à dire qu’il les contient tous et qu’ils ne sont rien en dehors de lui. On reconnaît ici l’ébauche de cet Atman. haleine ou âme du monde, ou de ce Brahmâ, qui appelle tous les êtres à la vie lorsqu’il se réveille, et les replonge dans le néant lorsqu’il se rendort : seulement, un jour ou une nuit de Brahmâ dure plus de quatre milliards d’années humaines[3]. Les Brâhmanas n’ont pas encore appris à se jouer ainsi dans les infiniment grands qui épouvantent la pensée : leur cosmogonie et leur théologie sont encore à l’état fluide ; mais, en enseignant que tout est dans tout et que Prajâpati est Tout, ils aplanissent la voie triomphale par où passera un jour le fameux char de Jagannâtha « Souverain Sauveur du Monde »[4], écrasant sous ses lourdes roues, non seulement ses dévots, martyrs volontaires, mais tous les autres dieux, dont l’abstraction poussée à l’outrance ne laissera plus subsister que les noms vidés de leur sens.


2. — Le style brâhmanique


Sauf dans leurs rares parties narratives, les Brâhmanas n’offrent presque rien de littéraire. Mais les Hindous, à tous les moments de leur histoire, ont su joliment conter en prose, et peut-être ne verra-t-on pas sans plaisir ce qu’est devenue sous leur plume l’universelle légende du déluge.

Voici qu’à Manu on apporta de l’eau pour l’ablution du matin ; sur ces entrefaites, et tandis qu’il se lavait, un poisson lui vint dans les mains. Le poisson lui dit : « Élève-moi, je te sauverai. — De quoi me sauveras-tu ? — Il viendra un grand flot, qui balaiera tous les êtres : de ce flot je te sauverai. — Mais comment t’élever ? — Tant que nous sommes fretin », dit le poisson, « nous n’avons que peu de chances de vie, car les poissons se mangent entre eux. Nourris-moi d’abord dans un vase ; quand je serai devenu trop grand pour ce vase, tu creuseras une fosse et tu m’y élèveras ; quand je serai devenu trop grand pour la fosse, tu me porteras à la mer : je serai alors à l’abri de tous risques. » Car c’était un de ces poissons qui deviennent de vrais monstres à l’état adulte. « Or, en telle année, le flot viendra : tu construiras un navire et tu m’invoqueras ; le flot venu, tu t’embarqueras, et moi, je te tirerai de là. » Manu donc l’éleva et le porta à la mer. Or, en l’année désignée, il construisit un navire et invoqua le poisson : le flot venu, il s’embarqua, et le poisson nagea vers lui ; à la corne du poisson il attacha le câble de son navire, et ainsi il navigua jusqu’à la montagne du nord. Le poisson lui dit : « Je t’ai sauvé : amarre ton navire à un arbre et prends garde que le flot ne t’emporte de la montagne ; puis, à mesure que l’eau baissera, tu en descendras tout doucement. » Il en descendit tout doucement : c’est pourquoi la pente de la montagne du nord[5] qui est de ce côté-ci s’appelle « la Descente de Manu ». Or, le flot avait balayé tous les êtres, et Manu demeurait seul. Il vécut dans la prière et la pénitence, étant désireux de postérité[6]. Un jour qu’il faisait une oblation d’aliments cuits, il fit dans l’eau libation des ingrédients requis : petit lait, beurre, crème aigre et fromage mou. Au bout d’un an, il en naquit une jeune fille : elle en sortit comme confite de beurre, car il y avait une flaque de beurre dans chaque empreinte de son pas. Mitra et Varuna la rencontrèrent : Qui es tu ? » lui dirent-ils. — La fille de Manu. — Dis que tu es à nous. — Non : celui qui m’a engendrée, c’est à lui que je suis. » Ils lui demandèrent son amitié : elle la leur accorda, ou non, on ne sait ; toujours est il qu’elle aborda Manu. « Qui es-tu ? » lui dit-il. — « Ta fille. — Comment, ma chère, serais-tu ma fille ? — Cette libation d’antan que tu as versée dans l’eau, petit-lait, beurre, crème aigre et fromage mou, c’est d’elle que tu m’as engendrée. Je suis bénédiction : donne-moi donc place rituelle dans le sacrifice. Si tu me donnes place rituelle dans le sacrifice, tu te multiplieras en postérité et bétail, et, quelque bénédiction que tu profères en m’y adjoignant, elle se réalisera toute. » Il lui assigna donc sa place au milieu du sacrifice ; car c’est là le milieu du sacrifice, ce qui se trouve entre les oblations préalables et les oblations consécutives. Avec elle il vécut en prière et pénitence, désireux de postérité, et par elle il engendra toute cette descendance qu’on appelle « les enfants de Manu » (les bommes), et toute bénédiction qu’il proféra en l’y adjoignant, elle se réalisa. (Çatapatha-Br., I. 8, 1.)

J’ai donné ce texte in extenso, quoique étrange et un peu long, parce qu’il est un type parfait du récit brâhmanique : d’abord, les absurdités y fourmillent, sans jamais troubler la sérénité du rédacteur ; puis, celui-ci ne conte pas pour conter, pour nous apprendre, par exemple, l’histoire du déluge, ou nous expliquer comment la terre se repeupla à la suite de cette catastrophe, mais pour dégager congrûment le sens intime de l’oblation rituelle dite ilâ et de la place qu’elle occupe dans le sacrifice. Ainsi toujours : c’est au même motif tendancieux que nous devons la conservation, dans l’Aitarêya (VII, 13-18), de cette admirable légende de Çunahçèpha, qui a inspiré à Leconte de Lisle un de ses plus beaux Poèmes barbares, et où l’on se bornera à cueillir ce trait superbe dans son énergique concision. Des parents réduits à l’extrême détresse ont trois fils ; on leur propose la richesse en échange de l’un d’eux à sacrifiera Varuna. « Pas celui-ci », dit le père en étreignant l’aîné. « Ni celui-ci », dit la mère en étreignant le plus jeune. Le sanscrit dit cela en moitié moins de mots que le français !

Mais c’est presque donner des Brâhmanas une idée fausse, que d’en extraire, à titre de spécimen, de semblables légendes. Ordinairement, le récit, si récit il y a, tient en quelques lignes, en une seule phrase, noyée dans le fatras de technologie théologique qui y a donné prétexte : autant, dès lors, le Brâhmana, ou l’Âranyaka, qui lui ressemble entièrement, intéresse l’historien de la liturgie, autant doit laisser froid celui de la littérature.

Quant à l’Upanisad, sa naïve physique du globe, sa prose tourmentée, la logique plutôt latente de ses déductions, ne l’empêchent pas d’atteindre à la beauté du style et au sublime de la pensée ; mais c’est par éclairs brusques, aveuglants de splen- deur.

« Vois ce grand arbre, mon fils : qu’on l’entaille à la racine, la sève jaillira ; au milieu, la sève jaillira ; au sommet, la sève jaillira. C’est qu’il se dresse là, gonflé de sève, d’âme, de vie, heureux de vivre. Mais que la vie quitte une de ses branches, elle séchera ; une autre, elle séchera ; une troisième, elle séchera ; qu’elle le quitte tout entier, il séchera tout entier. Apprends par là, mon fils, la vérité, » lui dit-il : « tout ce qui s’imprègne de vie meurt ; mais la vie ne meurt pas. Cette essence ténue, c’est l’âme de tout cet univers, c’est la réalité, c’est l’unique vivant ; et cela, c’est toi, mon enfant. — Révérend, daignez m’en enseigner davantage. — Je le veux bien, mon fils, » lui dit-il… (Chândôgya-Up., VI, 11.)

Et la leçon continue, tantôt puérile, tantôt profonde, parfois grotesque de sophistique inconsciente, jamais banale. Ce n’est pas le fond seul, c’est la forme aussi des Upanisads, qui arrache des cris d’admiration aux deux philosophes qui les ont le plus ardemment méditées : Schopenhauer, et son disciple immédiat, M. Deussen.

Nous retombons de haut avec les Sûtras ; mais ici, par définition même, il ne peut plus être question de style ; encore moins dans les Vêdângas, c’est-à-dire dans les angâni ou « membres » du Véda, accessoires scientifiques ou techniques de la grande compilation. Nous sortirions entièrement de la littérature, si nous nous arrêtions aux traités, en général sensiblement postérieurs, qui les enseignent. Il ne faut qu’énumérer en fin de chapitre ces six ordres de connaissances, indispensables à l’exercice du sacerdoce, savoir : phonétique (çiksâ), métrique (chandas), grammaire (vyâkarana), étymologie (nirukta), astronomie (jyôtisa), et cérémonial (kalpa). Tandis que le prêtre s’enferme de plus en plus dans les arcanes compliqués du sanctuaire, voici que, timidement, les lettres commencent à se laïciser.

  1. Ne devant plus revenir sur cet important ouvrage, qui n’a aucun caractère littéraire, je saisis l’occasion d’en dire un mot en passant. Il a dû être écrit vers le IVe-IIIe siècle avant notre ère, et se donne pour une encyclopédie générale des deux langues sanscrites (classique et védique). Un pareil livre ne pouvait être composé que dans l’Inde ; on essaierait en vain de donner à un Occidental une idée même confuse de l’absence de méthode, — non, ce n’est pas assez dire, — du désordre voulu et méthodique qui y préside ; morphologie, phonétique, syntaxe, style noble et jargon, sont jetés pêle-mêle à travers les huit livres, en quatre chapitres chacun, et les 3980 règles en formulaire télégraphique, de cette monstrueuse compilation. Avec cela, elle fait encore autorité dans les écoles de la Péninsule, et les savants européens qui l’ont dépouillée à fond assurent qu’en effet tout s’y trouve. Il vaut mieux les en croire sur parole.
  2. Il s’oppose immédiatement à Agni, en tant qu’il est le plus élevé des dieux, Agni étant topographiquement le plus bas puisqu’il habite sur terre ; et ce seul trait devrait suffire à faire unanimement reconnaître en Visnu une des plus hautes incarnations du soleil.
  3. C’est plus tard que ces fantastiques notions se systématisent, qu’on divise chaque grand âge de Brahmâ en quatorze âges de races humaines, dits manvantaras, et qu’on y distingue quatre périodes analogues aux âges dits d’or, d’argent, d’airain et de fer, mais numérotées selon les points du jeu de dés, qui est la grande passion des Hindous, savoir : krta « rafle-tout », trêta « trois », dvâpara « deux », et kali « as ». Nous sommes à présent dans l’âge Kali, qui a commencé le 18 février 3102 av. J.-C., à minuit du méridien d’Oudjein.
  4. C’est la gigantesque et très célèbre idole de Visnu dont le nom est plus connu en Occident sous sa tonne anglicisée, Jaggernaut.
  5. Le Himâlaya ? Le rédacteur devait l’entendre ainsi, mais tel n’est pas le sens primitif ; car la légende avait déjà pris naissance au temps où les Aryas habitaient encore la région transhimâlayenne. Au reste, il ne faut chercher dans ces récits aucun renseignement, à plus forte raison aucune précision, historique ni géographique.
  6. Chacun des Manus marque le début d’un Manvantara (p. 43, n. 1), c’est-à-dire qu’il est l’ancêtre d’une humanité nouvelle : le Manu en question est celui de l’humanité actuelle.