XXIII

Les eaux-fortes et les aquarelles de Jules.
Sa correspondance.

Les rares acheteurs de l’Art du dix-huitième siècle n’avaient pas été seulement frappés par la richesse et la nouveauté des détails sur les maîtres et les petits-maîtres jusque-là dédaignés, et par leur ressemblance littéraire. Les fascicules de couleur brique, tirés à deux cents exemplaires sur papier teinté, qui sortaient des presses d’un imprimeur lyonnais et que mettait en vente la librairie Dentu, au Palais-Royal, renfermaient des eaux-fortes d’un aspect très personnel, faites, en dehors de toute règle, avec la seule préoccupation de rendre, le plus près possible, les dessins originaux que commentait le texte. Ces eaux-fortes, sauf deux qui ne sont pas les moins curieuses et qui ont été gravées par Edmond, avaient pour auteur Jules de Goncourt.

Toutes se font remarquer par une interprétation bien personnelle qui s’est accrochée au caractère du modèle beaucoup plus qu’à la littéralité de ses détails. C’est l’impression de l’original qu’a surtout poursuivie et obtenue le graveur. Dans les planches où il a osé se mesurer avec La Tour et transporter dans une forme d’art monochrome les masques merveilleux d’animation et de couleur, à larges lumières, heurtés, sabrés d’audacieuses balafres de pastel pur, sans écrasement d’estompe ou de pouce et sans modelé, Jules de Goncourt est arrivé à une puissance d’effet qui égale presque celle des originaux. Il y a, dans son œuvre d’après La Tour, trois ou quatre pièces qui sont tout à fait de premier ordre et aucun autre graveur, homme de métier et de belle taille, n’a rendu le roi du pastel avec cette autorité et cette affinité de talent. La Lecture de Fragonard, pâle sépia toute en nuances, et le Gobelet de Chardin sont rendus aussi avec un bonheur d’autant plus charmant que l’interprète se meut avec liberté dans des chemins qu’il a ouverts. Une façon inattendue d’attaquer le cuivre, de muscler les contours, donne à ces eaux-fortes une saveur d’intimité, d’improvisation et d’élégance qui les rendent infiniment précieuses.

Ces qualités personnelles on les trouve aussi, non moins franches d’accent, dans les aquarelles par lesquelles Jules avait débuté dans l’art. Il était arrivé assez vite à connaître toutes les roueries du métier. Ses aquarelles, très pittoresques, sont d’un ton rare et feraient plutôt penser, par leur tonalité, aux travaux des aquarellistes anglais qu’à ceux de Decamps et de Marilhat qui, au temps où Jules cherchait sa voie dans la peinture à l’eau, étaient en possession, chez nous, de la maîtrise et du succès. Il se permet pourtant des licences que les peintres anglais considèrent comme des crimes : des grattages de papier, des reprises de gouache, même des rehauts de crayon lithographique. C’est que l’indépendance des idées crée naturellement un art indépendant. Jules de Goncourt pensait, avec Shakspeare, que tout est bien qui finit bien, et — quoiqu’il ne fût pas jésuite — il était d’avis que la fin justifie les moyens.

Après sa mort, M. Philippe Burty eut l’idée de faire connaître au public, par des reproductions sur bois, ces aquarelles qui n’avaient jamais été exposées et de réunir l’œuvre gravé de son ami. Jules n’avait pas illustré seulement l’Art du dix-huitième siècle, il avait transporté sur le cuivre sept dessins de Gavarni et un assez grand nombre de pièces diverses. M. Ph. Burty venait de faire avec succès une publication de l’œuvre gravé du fameux chirurgien anglais Seymour Haden. Il s’ouvrit de son projet à M. Edmond de Goncourt qui, l’approuvant, lui répondit, à quelques jours d’intervalle, par les deux lettres suivantes :

Bar-sur-Seine, 30 juin 1870.
Cher ami,

Que vous êtes obligeant et qu’aimablement vous caressez ma douleur ! Votre idée du petit livre pour les amis me sourit. Il faut vous dire que, peu de jours avant sa mort, il m’avait dit : « Je voudrais réunir mes eaux-fortes de Gavarni. Je demanderai cela à Burty qui sait fabriquer un livre avec une préface. »

Je suis un peu souffrant. Toute la fatigue de ces jours derniers s’est tournée en irritation d’entrailles ; mais cela n’a rien d’inquiétant.

Figurez-vous que je ne connais pas l’article de Saint-Victor[1]. J’ai un ardent désir de le lire. Vous seriez bien aimable de l’envoyer. Par la même occasion, si vous pouvez vous procurer un article de Banville publié dans le National du 26 ou 27 courant, jetez-moi-le à la poste.

Tout à vous de cœur,
Edmond de Goncourt.
Mercredi, 30 juillet 1870.

Cela va mieux, mais j’ai gardé une telle lassitude de corps et une telle fatigue de tête que cela me coûte d’écrire une lettre. Que vous êtes charmant, bon, serviable et comme, à mon retour, je veux faire de nos relations un peu espacées, une amitié intime, si vous le voulez bien. J’ai reçu un petit mot de Charles Blanc ; j’ai également reçu des lettres d’Hugo et de Seymour Haden[2]. Je veux répondre au dernier ces jours-ci. Saint-Victor m’a envoyé son feuilleton. Le portrait moral de mon frère est charmant et très vrai. Il a été plein de cœur dans cette circonstance et s’est fait reaimer entièrement par moi.

Bien pardon pour la recherche du National.

Vous viendrez chez moi, à mon retour, et tout ce que vous trouverez de Jules vous le prendrez. Les cuivres seront à votre disposition pour les planches qui manqueront. Je vous ferai voir quelques dessins de Jules que vous ne connaissez pas, et un portrait de lui aquarellé par moi en 1857 que je trouve très ressemblant. Pour le petit travail que je suis heureux et fier de vous voir faire, vous aurez tout ce que vous voudrez et plus encore.

Quant au dessin de Lalanne, je vous dirai que je suis assez embarrassé. Je crois qu’il vaut mieux attendre mon retour qui aura lieu à la fin du mois, et j’ai peur que le jardin soit complètement grillé. Je me déciderai dans quelques jours.

Je vous dirai que je négocie en ce moment avec Carpeaux un médaillon de mon frère pour mettre sur sa tombe[3]. Je serais bien désireux de l’obtenir.

Rappelez-moi au souvenir de votre femme et de votre pauvre père.

Je vous serre les deux mains.
Edmond de Goncourt.

Heureux homme qui, avec vos collections, avez de jolies petites filles à aimer !

Les documents, les indications manquaient à M. Burty. On les lui donne :

Cher ami,

Ce n’est pas commode les renseignements que vous me demandez. Vous n’allez pas faire ça instantanément, et il vaut mieux causer. Parole d’honneur ! je ne connais pas l’engendreur de mon frère. Le pourquoi ? — C’est qu’un graveur nous avait pris soixante francs pour une eau-forte qu’il n’a pas gravée et mon frère a trouvé plus économique d’être son graveur pour rien… Le premier imprimeur de la première eau-forte Goncourt ? — Diable m’emporte si je me le rappelle ! — De quoi on parlait ? — Mais, dans ce vieux temps lithographique, aucun aquafortiste ne montait la tête aux populations.

Mon frère a travaillé sans amour-propre et à défaut de moi qui l’embêtais, il en serait peut-être resté à sa première. Il croyait bien à une eau-forte nouvelle, ou, du moins, plus originale que celle de son temps et qu’il aurait trouvée, mais à la condition d’un an ou deux ans de travaux préparatoires, d’études sur les morsures, etc. Mais à cela il préférait l’écriture. Il n’a jamais été amusé que par quelques têtes d’après La Tour qu’il sabrait à grands coups, en une heure.

Dans une visite faite, dans une partie de chasse, aux environs de Paris, j’ai trouvé sur une table de château, le roi des albums japonais, un album rapporté du Japon par M. de Chasseron, où il y a des séries de masques japonais et des petits théâtres qui s’ouvrent et se déploient, amusants comme tout.

Mes compliments à Madeleine pour son grandissement, son grossissement, son forcissement ; mes amitiés à Madame Burty. Est-elle devenue la Meunière du Moulin de Boucher ? Quant à moi, je vais me sauver un mois en Champagne, et ne pas travailler du tout au bouddhisme. Burty ! Burty, la science te perdra ! Tu es l’homme qui veut tout savoir, et rien n’est malsain, pour un esprit parisien, comme l’étude des religions !

Tout à vous, cher ami,
Edmond de Goncourt.

Le paragraphe de cette lettre relatif à la première eau-forte de Jules se complète par un fragment du Journal où le lecteur assiste, chez le patriarche de l’impression, le vieux Delâtre, au tirage d’une épreuve d’essai :

17 février 1859. — Je suis dans une pièce au rez-de-chaussée où deux fenêtres sans rideaux versent un jour cru et laissent voir un jardinet pelé, aux arbustes maigres. Devant moi une grande roue et, sur la roue, le bras nu d’un homme, la manche relevée ; à côté, le dos d’un autre homme en blouse grise, encrant et chargeant une planche de cuivre sur la boîte, l’essuyant avec la paume de sa main, la tamponnant avec de la gaze, la bordant et la margeant avec du blanc d’Espagne…

Et moi, sur ma chaise, j’attends avec l’émotion d’un père qui attend un héritier ou rien. C’est ma première eau-forte que je fais tirer chez Delâtre : le portrait d’Augustin de Saint-Aubin. Oui, voilà plusieurs jours que nous sommes plongés dans l’eau-forte, mais jusqu’au cou et même par-dessus la tête. Particularité étrange, rien ne nous a pris dans la vie comme ces choses : autrefois le dessin, aujourd’hui l’eau-forte. Jamais les travaux de l’imagination n’ont eu, pour nous, cet empoignement qui fait absolument oublier non seulement les heures mais encore les ennuis de la vie et tout au monde. On est de grands jours à vivre entièrement là-dedans. On cherche une taille comme on ne cherche pas une épithète, on poursuit un effet de griffonnis comme on ne poursuit pas un tour de phrase. Jamais peut-être, en aucune situation de notre vie, autant de désir, d’impatience, de fureur d’être au lendemain, à la réussite ou à la catastrophe du tirage.

Et voir laver la planche, la voir noircir, la voir nettoyer, et voir mouiller le papier, et monter la presse, et étendre les couvertures, et donner les deux tours, ça vous met des palpitations dans la poitrine, et les mains vous tremblent à saisir cette feuille de papier tout humide où miroite le brouillard d’une image à peu près venue.[4]

Mais la guerre et la Commune intervinrent et le projet de la publication des eaux-fortes fut nécessairement ajourné. On n’y revint que trois ans après, au commencement de 1874.

Janvier 20, 1874.
Cher ami,

Je vous ai préparé ces jours-ci le catalogue de Jules : il y a 79 pièces, y compris le Figurant de Gavarni qu’a Bracquemond + bis + la planche en collaboration avec Gavarni : ce qui fait, pour la totalité de l’œuvre, 85 pièces.

Tout à vous,
« Edmond de Goncourt. »

Le papier est bougrement court pour le Pont neuf de Gabriel de Saint-Aubin.

N’avez-vous pas un Amour à la pointe sèche que je me rappelle vaguement et que je n’ai pas ? Ça ferait 86.

Lundi soir (août 1875 ?).
Cher ami,

Je déjeunais ce matin dans un endroit où je vous mènerai dîner un jour. J’avise un monsieur en face de moi. C’était Gaucher, de retour de Florence, d’Amsterdam et même de la rue Laffitte. Je vais causer avec lui. Il s’écrie, avec un désespoir comme les dessine le Punch : « Ce Burty, il n’est pas passé à l’Art, et cependant Gaucherel lui avait dit qu’il vînt voir le dessin de Bocourt, qu’il y vînt désigner le graveur qu’il voulait, et le temps ! Moi, mon avis est que le dessin de Bocourt soit gravé par le graveur qui a fait le Carpeaux de l’Illustration de cette semaine.

De Gaucher j’ai été à Méaulle. Il m’a juré, sur la jolie tête de son fils, que tous les bois seraient livrés avant la fin du mois, y compris la reprise générale et tous les bois de Maurand. Et la copie ?

J’avais juré d’être sage. Je l’avais été chez Sichel et chez Bing ; mais le moyen de l’être chez Mme Dessoye qui venait d’acquérir cinq petites boîtes de laque ancienne, genre Marie-Antoinette. J’en ai acheté quatre seulement, mais c’est fini, n..i-ni, fini !

À jeudi.

Tout à vous,
Edmond de Goncourt.
21 octobre 1875.
Cher ami,

Je suis passé aujourd’hui chez Liénard. Je l’ai trouvé occupé des tirages sur Japon. Il y a six ou sept planches, les petits Gavarni entre autres. C’est vraiment charmant. Cela m’a redonné du cœur pour la publication ; que cela vous en donne aussi. Je crois que Gaucher nous prépare une gracieuseté, à savoir deux exemplaires des planches sur parchemin !

Tout à vous,
Edmond de Goncourt.

L’album émergeant de toutes les lenteurs qui accompagnent l’élaboration d’un livre soigné, parut enfin, à la Librairie de l’Art, en 1876. On trouvera plus loin, dans le chapitre traitant de l’Iconographie, sa description détaillée, le catalogue des pièces gravées et des reproductions qui ont été faites sur bois d’après les aquarelles les plus importantes de Jules. L’œuvre gravé complet, très complet, des deux frères, avec tous les états et les pièces presque uniques, a été déposé à la Bibliothèque nationale, ainsi qu’il appert du document suivant :

21 décembre 1884.
Mon cher Burty,

Je dois vous reporter tous les jeudis les lettres de mon frère et mille choses m’en ont empêché ! Jeudi dernier, ça été une réunion pour le buste de Flaubert. Vous savez que j’ai bouleversé le haut de ma maison[5] et que ce remaniement, qui devait durer huit ou dix jours, dure depuis cinq semaines, sans que j’en voie la fin, et ça été un prétexte à tout à fait me ruiner. Jeudi, sans faute, je vous rapporterai lesdites lettres. J’en ai retrouvé de très curieuses chez Louis Passy, des lettres d’Afrique, de Suisse, deux lettres sur la mort de notre mère !

Tout en refaisant ma maison, je suis en train de faire mes paquets pour le néant et l’œuvre de mon frère que je devais laisser, après ma mort, au Cabinet des Estampes, je viens de le donner tout de suite.

Voici la petite note que j’ai mise en tête. Si vous y trouvez matière à un fait divers pour un journal d’art, faites-en ce que vous voudrez :

« Œuvre de Jules de Goncourt donné au Cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale par son frère.

Œuvre unique formé par le graveur, offrant la réunion de ses 86 eaux-fortes (154 épreuves) dont quelques-unes n’ont tiré qu’à deux ou trois exemplaires, et contenant tous les états.

À la collection des eaux-fortes de mon frère, je joins les quelques très méchantes planches faites par moi à ses côtés, pour lui tenir compagnie, pendant qu’il piochait le cuivre.

Le catalogue détaillé de ses eaux-fortes a été rédigé par Philippe Burty et publié à la librairie de l’Art, en 1876. »

Novembre 1884.
Edmond de Goncourt.

Avant d’entrer dans la phase nouvelle de la vie d’Edmond et de dire sur l’œuvre de Jules les dernières paroles, il reste à noter sa correspondance qu’Edmond commença à réunir en 1884 et qu’il a publiée en 1885. Dans la vie commune des deux frères, Jules, d’esprit plus souple, toujours prêt à improviser, avait été amené à écrire presque toutes les lettres de la maison et à entretenir les relations avec les amis. Aussi, de 1851 à 1870, les lettres d’Edmond sont-elles fort rares ; mais on en trouve quelquefois de la main de Jules qu’il signait Edmond avec une grâce touchante. Les lettres importantes, concertées entre eux, comme tout ce qu’ils faisaient, portaient les deux initiales E. J.

Ce recueil de lettres, d’une lecture mélancolique, s’empare avec autorité, dès le début, de l’esprit du lecteur. Elles reflètent l’histoire de deux intelligences unies dans une même passion, combattant dans l’obscurité et dans le vide. Toutes les étapes de leur route sont marquées par des bulletins de défaite, d’où éclate parfois une fusée de rire. Mais la note soutenue est la tristesse des déceptions et l’indifférence méprisante pour tout ce qui n’est pas l’art. M. Aurélien Scholl a été, le plus souvent, le confident des déboires de Jules. À lui cette lettre :

Nous vous écrivons navrés, très positivement. Un peu souffrants de corps tous deux, un peu nous découvrant de grosses promesses d’infirmités pour nos vieux jours, puis, par là-dessus, très malades d’âme, nous raidissant contre le découragement et nous y laissant aller d’heure en heure. Pas une main tendue ; les médiocres et les vieux régnant ; pas un courant, pas un mouvement ; la mer littéraire endormie comme un lac d’huile : l’éditeur, un mythe ; quelques titres, une défaveur ; le théâtre possédé absolument par les vaudevillistes infects ; le public lisant tout ; la critique, une accoucheuse qui ne fait que des avortements ; les petits journaux ne révélant personne ; les grands taisant les jeunes gens ; l’inimitié et l’insolidarité poussées au plus haut point dans la République des lettres ; des alliés ridicules ; et vos luttes, et vos fièvres, et vos angoisses, et votre furie d’avenir, enfin tout ce cœur que vous mettez dans votre tête, ne servant de rien, ne menant à rien. Allez, je vous le répète, nous fatiguons une mer d’huile !

… Nous vous aimons comme vous nous aimez. Nous vous aimons parce que vous nous aimez. Nos tristesses se confessent l’une à l’autre ; nos étoiles anonymes se sont prises dans la vie, bras dessus, bras dessous, et ne se quitteront pas. Et maintenant, la main dans la main, tous trois égaux devant notre belle amitié, causons, ami…[6]

Et c’était un moment de rassérènement bientôt suivi par de nouvelles tristesses. Cette idée poursuit le lecteur, durant tout le temps qu’il parcourt le livre, que Jules n’a pas seulement entrevu le succès qui allait ensoleiller l’œuvre à laquelle il avait voué sa vie, et qu’il est mort, en pleine bataille, sans en avoir connu le résultat.

Mais sa mémoire a été recueillie par une amitié fidèle. L’œuvre commune des deux frères assure définitivement leurs deux noms contre l’oubli. M. Edmond de Goncourt a voulu faire plus. Renonçant volontairement à la part de collaboration qui lui revient dans les lettres de Jules, il lui a élevé de ses mains un monument littéraire sur le socle duquel il a écrit simplement : Lettres de Jules de Goncourt.

  1. Il s’agit de l’article nécrologique dont il a été question plus haut (Liberté, 27 juin 1870).
  2. Cet hommage de l’aquafortiste anglais mérite qu’on s’y arrête. Il est plus qu’un acte de courtoisie puisque des relations personnelles ne l’avaient pas provoqué :
    62, Sloane St., 28 juin 1870.
    Monsieur,

    Pardonnez-moi si, n’ayant pas l’honneur de votre connaissance, j’ose ajouter à ceux de vos amis les vifs regrets que la perte cruelle que vous venez d’éprouver causent à un étranger.

    Mainte fois, en venant à Paris, l’idée m’est venue de prier mon ami Burty de vouloir bien me présenter à ces deux frères qui, par la distinction de leurs goûts et de leurs travaux, m’ont toujours si intéressé, me mettre en rapport avec ces deux esprits qui m’ont toujours été si sympathiques.

    Permettez-moi, Monsieur, de vous assurer que la triste nouvelle que la chronique vient m’apporter m’a peiné à un point difficile à exprimer, et excusez-moi si, au milieu de vos chagrins si récents, je me suis permis de vous adresser ces sincères paroles de condoléance et de respect.

    Seymour Haden.
  3. Ce projet n’a pas abouti.
  4. Rapprocher ce morceau d’une autre scène de tirage d’épreuve, dans Manette Salomon (t. II, p. 189). À ce sujet, j’extrais d’un billet de mai 1880 adressé par Jules à M. Ph. Burty : « Le papier vergé pour les tirages est une blague, quand il est sec. Et puis le Chine volant aussi. Je le proclamerais sur l’échafaud ! » Edmond ajoute : « Jules n’aimait que le papier du Japon. » Lettres de Jules, p. 251.
  5. Sous l’inspiration de M. E. de Goncourt, M. Frantz Jourdain, un lettré d’avant-garde doublé d’un artiste, agençait le Grenier pour les réunions dominicales.
  6. Lettres de Jules, p. 80 et 63.