Traduction par Edmondo Fazio alias Edmond Fazy.
E. Sansot (p. 48-49).

29. — LE COCHON QUI PARLE[1]

La femme d’un boulanger passait la nuit, comme d’habitude, avec son jeune amant.

Cette fois, ils oublient l’heure. Soudain, l’adolescent se lève en sursaut, court à la fenêtre, écarte le rideau, et aperçoit le boulanger tout blanc, qui revient du four, son gros bâton à la main.

Il n’y a pas une minute à perdre.

La femme dit :

— « Cache-toi dans l’étable à cochons ! »

Le boulanger rentre. Il monte l’escalier.

Mais il s’arrête, entendant un bruit de paille remuée :

— « Qui est là ? »

Le jouvenceau imite, assez bien, ma foi, le grognement du cochon. Mais le boulanger insiste :

— « Qui est là ? »

Alors, le jouvenceau, désespéré, s’écrie, d’une voix épouvantable de pourceau à l’agonie :

— « Je ne suis qu’un pauvre cochon ! » Heureusement, le boulanger est un paroissien d’une piété exemplaire. Le voilà terrifié ! Il croit qu’un de ses cochons se trouve possédé du diable, il redescend l’escalier quatre à quatre, et il se sauve à travers la campagne, en faisant force signes de croix.

Là-dessus, les amants, qui rient de bon cœur, se baisent encore un coup, avant de se séparer en paix.

  1. Livre II, 92. Do quodam adultero gruniente more suis.