Les Facéties érotiques de Bebelius/06
6. — QUIPROQUOS[1]
À l’époque où beaucoup de lansquenets de Souabe et d’ailleurs servaient aux Pays-Bas, sous l’empereur Maximilien, contre les gens de Bruges, un lansquenet se confessait à un très vieux moine de Cologne :
— « Mon père, j’ai gravement péché. J’ai couché avec une nonne ! »
Il faut vous dire que, chez nous, ce mot de nonne a un double sens : il désigne non seulement une religieuse, mais encore un cochon châtré.
Le moine, voyant la contrition du lansquenet, croit qu’il s’agit d’un cochon châtré :
— « Quelle horreur ! Tu es un hérétique ! Je ne peux t’accorder l’absolution. Coucher avec un animal au pied fourchu ! Vade Retro ! »
Le lansquenet se met à rire :
— « Mais non ! mais non, mon père ! c’est d’une religieuse qu’il s’agit ! »
— « Alors, je te pardonne, mon fils. Hélas ! Je voudrais bien pouvoir en faire autant ! »
Un autre lansquenet se confesse à un frocard romain :
— « J’ai couché avec une béguine ! »
Le Welsche ne sait pas ce que c’est qu’une béguine :
— « Par les cornes de Mahomet ! Qu’est-ce-là, une béguine ? »
— « Une bête ! »
— « Jésus ! Marie ! Quelle sorte de bête ? »
— « Une putain ! »
Le Welsche lance à la fois un rot de soulagement et un pet de joyeuse exhortation :
— « Puisque ce n’est qu’une femme, en avant, mon fils ! Monte à l’assaut, cogne dur, et entre par la brèche ! »
- ↑ Livre I, 51. Confessio lancearii seni monacho.