Traduction par Edmondo Fazio alias Edmond Fazy.
E. Sansot (p. 24-25).

6. — QUIPROQUOS[1]

À l’époque où beaucoup de lansquenets de Souabe et d’ailleurs servaient aux Pays-Bas, sous l’empereur Maximilien, contre les gens de Bruges, un lansquenet se confessait à un très vieux moine de Cologne :

— « Mon père, j’ai gravement péché. J’ai couché avec une nonne ! »

Il faut vous dire que, chez nous, ce mot de nonne a un double sens : il désigne non seulement une religieuse, mais encore un cochon châtré.

Le moine, voyant la contrition du lansquenet, croit qu’il s’agit d’un cochon châtré :

— « Quelle horreur ! Tu es un hérétique ! Je ne peux t’accorder l’absolution. Coucher avec un animal au pied fourchu ! Vade Retro ! »

Le lansquenet se met à rire :

— « Mais non ! mais non, mon père ! c’est d’une religieuse qu’il s’agit ! »

— « Alors, je te pardonne, mon fils. Hélas ! Je voudrais bien pouvoir en faire autant ! »

Un autre lansquenet se confesse à un frocard romain :

— « J’ai couché avec une béguine ! »

Le Welsche ne sait pas ce que c’est qu’une béguine :

— « Par les cornes de Mahomet ! Qu’est-ce-là, une béguine ? »

— « Une bête ! »

— « Jésus ! Marie ! Quelle sorte de bête ? »

— « Une putain ! »

Le Welsche lance à la fois un rot de soulagement et un pet de joyeuse exhortation :

— « Puisque ce n’est qu’une femme, en avant, mon fils ! Monte à l’assaut, cogne dur, et entre par la brèche ! »

  1. Livre I, 51. Confessio lancearii seni monacho.