Les Chants du bivouac/À Brienne

Texte établi par Avec une préface de M. Maurice BarrèsLibrairie Payot et Cie (p. 155-158).


À BRIENNE














 


 

À BRIENNE

(Sonnet rimé le 12 septembre durant que le canon tonnait sur Sompuis, Sommesous, Courdemange, Les Rivières, Huiron, entre Vitry-le-François et Brienne.)

En mil huit cent quatorze, ici — nul ne l’ignore —
Napoléon, soudain, entrevit son Destin :
Où l’écolier frémit d’ivresse à son aurore
L’Empereur frissonna d’angoisse à son déclin.

Brienne ! es-tu donc là comme un écho sonore
Pour nous rendre le bruit du Désastre en chemin,
Prédire à l’orgueilleux qui veut monter encore
Que le Malheur, vers lui, rampe comme un félin ?


Car voici que cent ans sonnés d’hier à peine,
Penché lugubrement sur ton immense plaine,
Écoutant de la Mort le funèbre galop,

Un pâle imitateur de ton élève Corse
S’écrie en frissonnant malgré sa rude écorce :
« Où vais-je ? »
Et tu réponds, sinistre :
« Á Waterloo ! »

(Brienne, le 12 septembre.)