Les Avadânas, contes et apologues indiens/Nouvelles chinoises/La Mort de Tong-tcho. Avertissement

Traduction par Stanislas Julien.
Paris B. Duprat (2p. 219-222).


AVERTISSEMENT

SUR LA MORT DE TONG — TCHO.


Les Chinois possèdent plusieurs romans historiques fort estimés. L’un des plus célèbres est le San-koué-tchi, qui renferme, en vingt volumes, l’histoire de trois royaumes, Cho, Weï et Wou, entre lesquels la Chine fut partagée, l’an 220 de notre ère, lorsque la dynastie des Han orientaux s’éteignit avec l’empereur Hien-ti, sous le règne duquel eut lieu, en l’an 102, la mort du ministre Tong-tcho.

Tchin-cheou, qui écrivit, vers la fin du iiie siècle, l’histoire des trois royaumes dont nous venons de parler, raconte en quelques lignes la mort de Tong-tcho, qui, de simple général, s’éleva promptement au rang de Thaï-ssé ou premier ministre. Nous ajouterons quelques détails empruntés aux annales de la Chine.

Tong-tcho se trouvait à la tête d’une armée nombreuse qui lui avait été confiée pour étouffer une insurrection ; il accrut rapidement sa puissance, au point de paralyser celle de l’empereur, qu’il détrôna de son autorité privée, pour mettre à la place son frère Lieou-hieï. Il fit enfermer l’impératrice et son fils qu’il venait de déposer, et, quelque temps après, il les fit périr tous deux. Dès ce moment, il crut pouvoir tout oser. Il prit le titre de gouverneur de l’empire, et n’épargna aucun crime pour assouvir sa vengeance ou son ambition. Il fit brûler la ville de Lo-yang, dont les habitants s’élevaient à plusieurs centaines de mille, et força l’empereur à aller résider à Tchang-’an. Tsao-tsao, Sun-kien et plusieurs chefs puissants se liguèrent pour le combattre, mais ils se séparèrent aussi facilement qu’ils s’étaient unis ; et, après la mort de Youen-chao, ils oublièrent le salut de l’empire pour s’occuper de leurs intérêts particuliers. Cette désunion des confédérés combla de joie Tong-tcho, et il ne songea plus qu’à s’emparer du pouvoir suprême ; mais le ministre Wang-yun, fatigué de ses crimes, obtint un ordre de l’empereur, et le fit assassiner par Liu-pou.

Sous le règne de la dynastie mongole des Youan, au xive siècle, l’histoire des trois royaumes de Tchin-cheou fournit à Lo-kouang-tchong le fond du célèbre roman historique intitulé San-koué-tchi (l’Histoire des trois royaumes), où il releva l’aridité des faits par un style noble et brillant, et entremêla son récit d’épisodes d’un intérêt dramatique (comme celui de Tiao-tchan) qui sont de son invention, et qui ont puissamment contribué au succès de son ouvrage.

Un auteur qui vivait sous les empereurs Mongols, et dont le nom n’est point parvenu jusqu’à nous, a composé une tragédie sur la Mort de Tong-tcho. Elle se trouve, sous le titre de Lien-hoan-ki, dans le Répertoire en quarante vol. d’où a été tiré l’Orphelin de la Chine, dont j’ai publié la traduction en 1834.