Les Avadânas, contes et apologues indiens/47

Traduction par Stanislas Julien.
Paris B. Duprat (1p. 174-175).


XLVII

LE COURTISAN MALADROIT.

(De ceux qui s’écartent de la raison.)


Il y avait jadis un homme qui voulait gagner la faveur du roi. Il demanda à d’autres comment il fallait s’y prendre.

« Rien n’est plus aisé, lui dit quelqu’un ; le moyen de lui plaire est de l’imiter, même dans ses défauts. »

Cet homme ayant remarqué que le roi clignait les yeux, il se mit à l’imiter et à cligner comme lui. Le roi lui dit :

« Avez-vous mal aux yeux, ou bien avez-vous gagné un coup d’air ? Pourquoi clignez-vous ainsi ?

— Je n’ai pas mal aux yeux et je n’ai pas non plus gagné un coup d’air, répondit-il ; j’ai seulement voulu gagner les bonnes grâces de Votre Majesté. Ayant remarqué que le roi clignait les yeux, j’ai tâché de l’imiter. »

À ces mots, le roi fut transporté de colère ; il ordonna à ses serviteurs de le rouer de coups et de l’expulser du royaume.

(Extrait de l’ouvrage intitulé : Fa-youen-tchou-lin, livre LIII.)