Librairie de L. Hachette et Cie (p. 102-104).

XXVI

PUNITION DU FAUX PROPHÈTE ÉLYMAS.



Grand’mère. Quelque temps après, Barnabé et Paul, ayant terminé leur mission, retournèrent à Antioche.

Depuis ce temps, saint Luc, qui ne cessa de suivre saint Paul, ne parle presque plus de saint Pierre. Quand j’aurai fini de vous raconter les Actes des Apôtres, je continuerai l’histoire de saint Pierre et celle de saint Paul que saint Luc n’a pas finie.

Marie-Thérèse. Pourquoi ne l’a-t-il pas finie ?

Grand’mère. On ne le sait pas, mais on croit que saint Luc n’a pas continué son livre des Actes des Apôtres, à cause de ses voyages continuels, et qu’il mourut sans avoir eu le temps de l’achever.

Le Saint-Esprit donna ordre à saint Paul et à Barnabé de se séparer de saint Pierre et des autres Apôtres, d’aller dans un pays appelé la Séleucide et ensuite dans l’île de Chypre. Ils obéirent, se séparèrent de saint Pierre et des Apôtres, et partirent immédiatement comme le Seigneur le leur avait ordonné. Ils parcoururent tous ces pays, prêchant l’Évangile et convertissant.

Après avoir parcouru toute l’île de Chypre jusqu’à Paphos, ils y trouvèrent un certain Juif, faux prophète…

Valentine. Comment faux prophète ? Comment était-il faux prophète ?

Grand’mère. En faisant semblant d’être inspiré du Saint-Esprit, en faisant de fausses prophéties, en vivant publiquement comme un Saint de Dieu, ne mangeant ni ne buvant, et menant en cachette la vie d’un homme gourmand, avare, gardant pour lui-même l’argent qu’on lui donnait pour de bonnes œuvres.

Ce faux prophète s’appelait Bar-Jésus ou Élymas. Il était magicien, c’est-à-dire vendu au démon, qui l’aidait à tromper tout le monde. Cet Élymas avait beaucoup d’empire sur le proconsul ou gouverneur romain, nommé Sergius-Paulus, homme juste, honnête, et qui aimait à entendre la parole de Dieu. On lui avait parlé des Apôtres, il les connaissait et il aimait à les entendre.

Élymas cherchait de tout son pouvoir à détruire le bien que Paul et Barnabé faisaient au proconsul et à ceux qui les entendaient. Mais un jour, saint Paul, le regardant, lui dit :

« Ô toi, plein de malice et de mensonge, fils du diable, ennemi de toute justice, ne cesseras-tu pas d’empêcher les hommes de bien de connaître la vérité, qu’ils aiment et qu’ils veulent pratiquer ! La main du Seigneur est sur toi. Tu seras aveugle pendant un temps et tu ne verras pas le soleil. »

Et tout à coup, Élymas se trouva dans l’obscurité, ne voyant plus, quoiqu’il fît grand jour. Il allait à droite et à gauche, cherchant quelqu’un qui lui donnât la main pour le conduire. Le proconsul, voyant ce miracle que venait de faire saint Paul, crut en Notre-Seigneur Jésus-Christ. C’est en souvenir de cette conversion du proconsul Paulus que Saül changea son nom en celui de Paul.

Henri. Combien de temps Élymas est-il resté aveugle ?

Grand’mère. Les Actes des Apôtres ne le disent pas ; probablement quelques mois ou quelques années, jusqu’à ce qu’il se fût repenti de sa vie passée, qu’il eût rompu avec le démon, et qu’il fût devenu meilleur.

Madeleine. Grand’mère, est-ce que saint Paul n’a pas manqué de charité, en traitant si sévèrement Élymas ?

Grand’mère. Non, mon enfant ; la charité ne consiste pas à être indulgent pour le mal. Saint Paul a traité Élymas comme Notre-Seigneur a traité les Pharisiens. La charité qui voit le mal sans le blâmer n’est plus de la charité ; c’est de l’indifférence, ou bien de la faiblesse, quelquefois même de la trahison.