Librairie de L. Hachette et Cie (p. 54-56).

XIV

PREMIÈRE PERSÉCUTION CONTRE LES PREMIERS CHRÉTIENS.



Grand’mère. La rage des Juifs ne pouvait plus se contenir ; tous leurs efforts pour arrêter la multiplication des Chrétiens devenaient inutiles ; leurs menaces contre les Apôtres et les disciples restaient sans effet. Pierre et les Apôtres continuaient à prêcher publiquement la religion sainte de Notre Seigneur Jésus-Christ. Ils résolurent donc d’employer contre les Chrétiens les tortures et la mort. Alors les fidèles, à l’exception des Apôtres, se dispersèrent hors de Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie.

Élisabeth, Pourquoi se sauvaient-ils ? Ils n’avaient donc pas le courage de souffrir pour Jésus-Christ ?

Grand’mère. Tous ne se sentaient pas encore la force de braver les souffrances et la mort ; mais la vraie raison pour laquelle ils se sont dispersés fut le commandement même qu’avait donné Jésus-Christ :

« Si les hommes vous persécutent dans une ville, enfuyez-vous dans une autre. »

Comme le bon Dieu n’exige pas des hommes qu’ils recherchent les dangers et les souffrances, ils se cachaient et attendaient que la fureur des Juifs fût calmée.

C’est ainsi que, sans le savoir et sans le vouloir, les Juifs persécuteurs furent la cause que l’Évangile se répandit au loin, beaucoup plus rapidement.

Pierre. Est-ce que ce n’est pas un peu lâche de se sauver, Grand’mère ?

Grand’mère. Non, mon enfant ; ce n’est que prudent ; la prudence n’empêche pas le courage. De même qu’on n’est pas coupable, quand on est malade, de chercher à se guérir par des remèdes, de même il est très-permis d’éviter une persécution ou un danger quelconque par la fuite. Ces mêmes Chrétiens qu’on pourrait soupçonner de lâcheté pour s’être sauvés, ont souffert la mort avec courage, plus tard, quand la persécution est devenue plus acharnée.

Louis. Mais pourtant les Apôtres sont restés ? Ils n’ont pas eu peur, eux ?

Grand’mère. C’est vrai ; mais les autres Chrétiens n’ont pas fui parce qu’ils ont eu peur. Saint Pierre et les Apôtres étaient les chefs de l’Église naissante. Tout en se dérobant le mieux possible à la fureur des Juifs, il était nécessaire qu’ils restassent à Jérusalem, où le troupeau de Jésus-Christ était le plus menacé. Jérusalem était alors le centre de l’Église ; c’était naturellement le poste de saint Pierre, chef de l’Église.

Louis. Qu’est que c’est : centre ?

Grand’mère. Le centre est le milieu d’une chose. Il fallait donc que le chef de la nouvelle Église restât au centre afin qu’on pût toujours revenir à lui et le consulter sur ce qu’on devait faire.

Marie-Thérèse. Et tous les autres Chrétiens se sauvèrent de Jérusalem ?

Grand’mère. Non pas tous ; quelques-uns même allèrent enlever le corps du premier martyr Étienne et l’ensevelirent ; ils déposèrent ensuite son très-saint corps dans un endroit caché. On commença dès ce temps à l’honorer comme une précieuse relique. On a depuis transporté à Rome les ossements de saint Étienne, premier martyr de la religion chrétienne, et ils y sont encore aujourd’hui.