XXXIV.

On se bat toujours. C’est à peine si, à de rares intervalles, la canonnade s’interrompt. Les résultats sont peu appréciables. Aujourd’hui, 7 avril, les choses en sont au point où elles en étaient le lendemain de Bergeret repoussé et de Flourens tué. Les forts de Vanves et d’Issy bombardent les batteries versaillaises, qui bombardent les forts de Vanves et d’Issy ; les curieux, groupés sur le Trocadéro, voient monter au loin de blanches fumées. Chaque matin, le citoyen Cluseret, délégué à la guerre, annonce qu’un assaut, tenté par les gendarmes, a été victorieusement repoussé par les garnisons des forts. Il est sûr que si les Versaillais attaquent, ils sont repoussés, puisqu’ils n’avancent pas. Mais attaquent-ils ? Je suis vaguement porté à croire qu’on suppose des attaques afin de pouvoir annoncer des victoires. Il me semble évident que les généraux de l’Assemblée nationale — qui s’occupent surtout à cette heure d’établir dus batteries et de grouper leurs forces — n’agiront d’une façon sérieuse que lorsqu’ils se croiront certains du succès. En attendant, ils se contentent d’achever de ruiner les forts déjà démantelés par les Prussiens.

Entre Courbevoie et la porte Maillot, la bataille est continuelle. On perd, on gagne du terrain. Cette maison, que les Versaillais occupaient tout à l’heure, est occupée maintenant par les fédérés. On ne triomphe jamais, on se bat toujours. Quoi ! ne s’élèvera-t-il pas enfin une voix pour crier : « Assez ! assez de sang et de larmes ! assez de Français tués par des Français, de républicains tués par des républicains ! » Que de gens tombent de part et d’autre avec le même cri sur les lèvres ! Oh ! quand donc cessera ce malentendu sinistre !