Comtesse Mathieu de Noailles ()
Calmann-Lévy, éditeurs (p. 172).

ENCENS


Un jour vient où nul mot n’est assez tendre ou pur
Pour exprimer devant la divine atmosphère
Le plaisir enivré que son ciel vient nous faire,
Qu’il monte de ma bouche une haleine d’azur !
Qu’il monte de mes mains une extase odorante
Pour ces grands cieux d’été, voilés par la chaleur,
Où les arbres, souSIant une verte vapeur,
Dissolvent au soleil leur âme respirante.
Qu’il monte de mes yeux pâmés une oraison
Pour ces petits vergers pleins de douce abondance,
Où le blanc cerisier semble un sylvain qui danse,
Où le gai poulain mord les plis frais du gazon.
Et que ma vie enfin, de joie exténuée,
Soit un parfum brûlant, expansif, éperdu,
Qui fusant de mon sang, de mon regard fondu,
Aille inscrire mon nom sur la sainte nuée !