Le premier livre des Sonnets pour Hélène/Puis qu’elle est toute hyver

Sonnets pour Hélène, Texte établi par Roger Sorgéds. Bossard (p. 77).
XXII

Puis qu’elle est toute hyver, toute la mesme glace,
Toute neige, et son cœur tout armé de glaçons,
Qui ne m’aime sinon pour avoir mes chansons,
Pourquoy suis-je si fol que je ne m’en délace ?

Dequoy me sert son nom, sa grandeur et sa race,
Que d’honneste servage et de belles prisons ?
Maistresse, je n’ay pas les cheveux si grisons.
Qu’une autre de bon cœur ne prenne vostre place.

Amour, qui est enfant, ne celé vérité.
Vous n’estes si superbe, ou si riche en beauté,
Qu’il faille desdaigner un bon cœur qui vous aime.

R’entrer en mon Avril désormais je ne puis :
Aimez moy s’il vous plaist, grison comme je suis,
Et je vous aimeray quand vous serez de mesme.