Le premier livre des Sonnets pour Hélène/Estant pres de ta face
XXIII
Estant près de ta face, où l’honneur se repose,
Tout ravy je humois et tirois à longs traicts
De ton estomac sainct un millier de secrets,
Par qui le Ciel en moy ses mystères expose.
J’appris en tes vertus n’avoir la bouche close,
J’appris tous les secrets des Latins et des Grecs :
Tu me fis un Oracle, et m’esveillant après
Je devins un Démon sçavant en toute chose.
J’appris que c’est Amour, du Ciel le fils aisné.
O bon Endymion, je ne suis estonné
Si, dormant près la Lune en un sommeille extrême,
La Lune te fist Dieu ! Tu es un froid amy.
Si j’avois près ma Dame un quart d’heure dormy,
Je serois, non pas Dieu : je ferois les Dieux mesme.