Gervais Clouzier, 1680 (1 / 2, pp. 131-133).


DAns les grandes chaleurs de l’été, lors qu’on fait faire de tres-grandes courses aux Chevaux, ou qu’on les échauffe trop par un grand travail, ils pissent le sang tout pur, & souvent en meurent ; particuliérement s’ils ont quelque veine ou gros vaisseau rompu qui se dégorge dans la vessie. Il y en a quelques-fois qui pissent le sang en abondance, & qui n’ont ny fiévre ny dégoût, ne donnant aucun signe de maladie, sinon qu’ils pissent le sang ; ceux-là ont seulement trop de chaleur aux reins & sont faciles à guerir, quoy qu’ils semblent par l’abondance du sang qu’ils pissent, ne pouvoir long-temps subsister : mais comme il faut peu de sang pour teindre beaucoup d’urine, on croit que Page:Solleysel - Parfait mareschal - 5è éd., 1680 - tome 1.djvu/146 Chap.
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fine, nourrissez-les dans un mortier avec le miel peu à peu & autant d’extrait de genevre que de miel, & mettez le tout dans un pot pour les usages ausquels vous employez la theriaque ; car il resistera aux venins, consommera les humiditez superflues, donnera appetit, & guerira les tranchées, la dose est d’une once jusques à deux, avec du vin blanc ou clairet.

On nomme ce theriaque diatessaron parce que il n’y entre que quatre sortes de poudres avec le miel, & l’extrait de genevre qui font une composition fort souveraine, & alexitere, qui vaut mieux que la theriaque que beaucoup de Mareschaux employent, qui ne leur coute que un écu la livre, aussi n’a t’elle que le nom de theriaque & non les vertus.

Si les remedes precedents n’ont pas guery vostre Cheval, faites celuy qui suit que j’ay souvent éprouvé.

Autre pour Cheval qui pisse le sang.

Prenez deux onces de theriaque d’Andromaque qui est la plus fine, au deffaut de celle-là, le diatessaron peut servir, miel commun quatre onces, cassonade fine autant, mélez bien le tout dans un mortier, en bien incorporant les matieres, puis adjoûtez encore anis, coriandre & reglisse, de chacun deux onces en poudre fine ; mélez bien le tout, puis délayez-le avec une pinte de vin rouge, & le donnez au Cheval qui doit estre bridé trois heures avant, & autant après la prise, tirez luy du sang le lendemain.

Et le jour après la saignée donnez luy un lavement avec deux pintes & chopine de petit lait de vache que vous ferez bouillir y ayant mêlé parmy deux onces de scories de foye d’antimoine en poudre fine, d’abord que le tout bouillira à gros bouillons ostez du feu, & mélez parmy quatre onces d’huile d’olive, donnez le tout tiede au Cheval, si son mal continue ce que je ne crois pas, il faudroit reïterer tout ce procedé ; avec ce dernier remede j’ay veu guerir plusieurs Chevaux sans avoir eu la moindre suitte.